Je me souviens de nous
En réponse au défi « Je me souviens… »
J'ai des tas de souvenirs. Je suis de celles qui, chaque jour, enclenchent une nouvelle pellicule pour capturer le meilleur de sa journée. Depuis trente ans, j'en ai une collection bien rangée dans le fond de ma mémoire que je visionne de temps à autre quand la nostalgie me prend.
Il y a quelques jours, je faisais le tri et je suis retombée sur toi. Comment t'oublier ? En plus d'avoir été mon meilleur ami, tu as été mon confident et surtout mon premier amour. Oui je sais, tout cela fait un peu trop "cliché" mais je souhaite vraiment à tout le monde de le vivre un jour car tu resteras ma plus belle histoire.
Enfin, revenons-en à nos souvenirs. L'autre jour j'avais un petit coup de mou et pour me remonter le moral j'ai commencé à penser à toi, à nous et à tous ces moments que l'on a vécus tous les deux. Cette rencontre, il y a dix ans autour d'un gâteau pas cuit. Tu parles d'une fête pour mes vingt ans ! Le genre de petite soirée secrète que j'avais grillée en même pas trois jours tant la discrétion de mes amis était à la limite du ridicule. De ce que j'ai appris, bien après, cela ne devait être qu'un évènement en petit comité, mais l'organisation a complètement échappé au contrôle de ma meilleure amie et cela s'était transformé en une grosse fiesta. Résultats, je ne connaissais pas la moitié des gens. Au bout de deux heures, j'en avais déjà marre du bruit et de la foule alors j'étais allée dans le jardin à la recherche d'un peu de tranquillité. Tu étais là, tout seul, assis sur ta chaise, le regard loin, fixé sur un buisson sans fleur. Je me souviens de t'avoir rejoint sans dire un mot, m'être assise à la table et avoir simplement levé la tête pour regarder les étoiles. Dans le fond, j'espérais que tu ne remarquerais pas ma présence comme ça je n'aurais pas eu à faire la causette une énième fois avec un inconnu. Le silence avait duré cinq minutes avant que tu me dises " Elle est sympa cette fête ! C'est l'anniversaire de qui ? ". J'avais esquissé un sourire en réalisant qu'une partie de la population présente était surement venue juste pour la musique et la boisson et puis j'étais rentrée dans ton jeu : " Ah bon c'est un anniversaire ? Je ne savais pas, on m'a invitée il n'y a que quelques heures.". Et c'était comme ça que la discussion avait commencé. J'ignore combien de temps nous étions restés là, comme deux vieux potes de toujours, à commenter tout ce qui se passait pendant la soirée et que l'on pouvait observer depuis notre coin isolé de tous. On avait bien rigolé et je me souviens de m'être fait la remarque que jamais je n'avais été à l'aise si vite avec quelqu'un que je ne connais pas. Finalement, c'est ma meilleure amie qui avait rompu le moment lorsqu'elle était venue me demander de souffler les bougies. Je me souviens de ta tête quand tu avais réalisé que cet anniversaire était le mien. Je t'avais simplement fait un clin d'œil, souhaité une bonne soirée et on ne s'était pas recroisé.
Le lendemain, à mon réveil j'avais tout un tas de notifications sur Facebook. Entre les identifications sur les photos, les commentaires et les "Joyeux anniversaires" en pagaille sur mon mur, je ne savais plus où donner de la tête. Finalement, une seule information avait retenu mon attention : ta demande d'ami. Au début, je m'étais demandé comment tu avais fait pour me trouver puis, en y réfléchissant ce n'était pas bien compliqué il suffisait de passer par un ami en commun ou, plus simplement, par les identifications sur les photos. Je n'y avait pas répondu tout de suite et je l'avais complètement oublié jusqu'au jour où ma meilleure amie m'avait reparlé de toi en m'expliquant que tu lui demandais de mes nouvelles. J'avais trouvé ça mignon et bizarre à la fois. Comprends- moi on ne se connaissait pas finalement. C'est une semaine plus tard que j'avais fini par accepter ta demande en me disant que si tu devenais trop collant je te bloquerais (désolé de t'avouer ça là !). Heureusement, je n'ai jamais eu à le faire et je n'y ai même plus songé par la suite.
C'est ainsi que notre amitié avait démarré : cette soirée, des messages échangés et beaucoup de proposition de sortie de ta part. Moi, vingt ans, mal dans ma peau et pas à l'aise avec les hommes, je t'avais beaucoup fait galérer. Au début, je repoussais les dates de nos sorties, puis je te proposais qu'on y convie des amis, enfin je faisais tout pour ne pas être seule avec toi. Je savais que tu trouvais ça relou mais j'avais comme un mécanisme de défense avec un point rouge qui s'allumait constamment en me disant " c'est un homme bien ! Tu vas tomber amoureuse". Alors je repoussais l'échéance et je me disais que tu finirais par te lasser. C'est incroyable comme on peut être bête dans la vie. Le plus incroyable, et ce qui m'a vraiment fait chavirer je suppose, c'est que tu as tenu bon, tu t'es accroché à ce que je voulais bien te céder et tu ne m'as jamais lâché. Du coup, on a vécu des moments incroyables. Mon premier match au Stade de France, nos virées en voiture en écoutant la musique à fond, nos sorties improvisées sur Paris où l'on se retrouvait au pied de la Tour Eiffel en pleine nuit, sans oublier nos appels et messages jusqu'à pas d'heure. Mais bien sûr, l'histoire aurait été trop belle si elle avait été si simple, et nous savons pertinemment que la simplicité ne nous définit pas.
Tu le sais, un de mes plus gros défauts c'est la fierté. Alors, quand notre amitié a évolué et que tout le monde autour de moi a commencé à me dire que nous formions un beau couple, eh bien je me suis fermé. Après ça, j'ai fait taire tout sentiment qui pouvait naître en répétant sans cesse que notre lien n'est qu'amical. Et j'ai tenu pendant des années jusqu'au jour où... tu t'es mis en couple.
Franchement, cela a été horrible pour moi. Pas de te savoir en couple, mais de me rendre compte de tout ce que tu représentes pour moi trop tard. Le pire dans tout ça, c'est que moi non plus je n'étais pas célibataire. Mon cerveau est alors devenu un gigantesque chantier. Plus rien n'était clair et chaque jour je me levais avec cette impression d'être une imposture.
Aujourd'hui, j'ai fait le deuil. Enfin, je crois. Il y a des réminiscences de temps à autre mais je t'envoie un petit message et tout revient dans l'ordre. Quoi qu'il en soit, même si je l'ai compris trop tard, et qu'aujourd'hui j'en parle à cœur ouvert, tu resteras ma plus belle histoire, mes plus beaux souvenirs.
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