Comme à son habitude depuis qu’elle avait accueilli Chrees Moure chez elle, Alicia se leva beaucoup aux alentours de 7h du matin. Elle était très épuisée et avait une fois de plus les cheveux ébouriffés, la nuit ayant été un peu agitée. Elle finit par se demander si elle finirait par s’habituer à ce nouveau style de vie un jour. Quoi qu’il en soit, au bout de dix minutes, la jeune femme trouva enfin la force de sortir de son lit et de prendre la direction de la salle de bain. Comme chaque jour, mademoiselle Garnier jeta un coup d’œil à son reflet dans le miroir pour voir la sale tête qu’elle avait avant de foncer sous la douche.

Après plusieurs dizaines de minutes à prendre soin de son corps et à choisir les vêtements qu’elle allait porter durant toute la journée, mademoiselle Garnier alla préparer son petit-déjeuner et uniquement le sien. Parce que Moure s’était montré insolent la nuit d’avant, elle avait décidé de repousser l’heure à laquelle elle le nourrissait généralement.

Confortablement assise dans son siège, la jeune femme manipulait son téléphone portable, vérifiant l’endroit où les affaires qu’elle avait commandées se trouvaient. Elle fut alors très ravie de savoir qu’elle les recevrait dans quelques heures, ce qui voulait dire que son programme pour corriger le mauvais caractère de Chrees Moure allait également commencer dans quelques heures. Alicia se dépêcha de finir son petit-déjeuner, puis se rendit au rez-de-chaussée avec son sac à dos.

Au moment où mademoiselle Garnier arriva au rez-de-chaussée, elle aperçut Fuji devant la porte de son établissement. Celle-ci alla donc lui ouvrir la porte.

- Je suppose que John sera une fois de plus en retard, dit-elle en laissant son employée entrer.

- Il semblerait.

- Dommage. Il avait pourtant bien commencé. Quoi qu’il en soit, comme je vous l’ai dit hier, je serai absente pendant deux ou trois heures. Ce sera donc à vous de gérer le bar pendant que je ne suis pas là.

- Tu peux compter sur nous.

- Sur toi surtout, rétorqua Alicia en posant sa main sur l’épaule de mademoiselle Nakaharu.

Alicia dit ensuite à son employée qu’elle serait dans son bureau pendant les dix prochaines minutes, qu’elle avait quelques documents à récupérer avant de partir à la banque. Alors qu’elle rentrait dans la pièce, certains souvenirs refirent surface dans l’esprit de mademoiselle Garnier. Elle se souvint notamment de la fameuse nuit où Moure et elle s’étaient rencontrés, de la façon dont il l’avait menacée avec son couteau, et la manière dont elle l’avait mis hors d’état de nuire dans son bureau. En y repensant, Alicia esquissa un léger sourire. Elle dit que si elle n’avait pas ce client de dernière minute, jamais elle n’aurait pu passer des nuits agréables.

Mademoiselle Garnier s’approcha de son vieux tableau qu’elle décrocha par la suite. Derrière celui-ci se trouvait le coffre-fort dans lequel elle conservait tous ses documents importants et plusieurs dizaines de liasses d’argent. La jeune femme aux cheveux roux récupéra tout l’argent qui était à l’intérieur, ainsi que des documents bancaires et son titre de propriété. Elle rangea soigneusement le tout dans son sac à dos avant de tout refermer derrière elle et de quitter la pièce.

- Bon, je suis partie, dit-elle à Fuji en passant devant elle.

- OK, à tout à l’heure.

-----*-----

Il fallut une vingtaine de minutes à Alicia pour arriver à la banque. Après s’être garée devant le bâtiment, la jeune femme attrapa son sac à dos et descendit de son véhicule. Tandis qu’elle marchait en direction de l’entrée, mademoiselle Garnier sortit ses documents bancaires de son sac à dos. Parce qu’elle était concentrée sur cette tâche, elle ne regarda pas vraiment devant elle et se heurta malheureusement à une personne sortant de l’édifice.

- Je suis vraiment désolée ! Attendez, je vais vous aider, rétorqua-t-elle en voyant les documents d’Alicia sur le sol.

Lorsque mademoiselle Garnier leva son visage pour qui le visage de la personne qu’elle venait de heurter, la jeune femme se figea complètement. Elle n’arrivait pas à en croire ses yeux. La nuit où elle avait enfermé Chrees Moure dans son sous-sol, elle avait pris la peine de le dépouiller de tous ses effets personnels et les avait rangés dans un carton qu’elle avait placé dans une des étagères de son armoire à linge. Parmi ceux-ci se trouvait son portefeuille dans lequel il y avait la photo d’une jeune femme. À ce moment, Alicia s’était dit qu’il s’agissait de quelqu’un de très important pour lui, ce qui avait également été la raison pour laquelle elle avait voulu le libérer juste après. Jamais Alicia n’aurait cru qu’elle rencontrerait cette fameuse personne un jour, et encore moins qu’elle lui rentrerait dedans.

Tandis que mademoiselle Garnier se questionnait sur l’improbabilité de cette rencontre, Amélia lui demanda soudainement si elle allait, ce qui ramena la jeune femme aux cheveux roux sur terre.

- Oui, oui, je vais bien. J’étais juste un peu surprise par ce qui venait de se produire, répondit-elle.

- Je suis sincèrement navrée de ce qui s’est passé. J’avais les yeux rivés sur mon téléphone et je ne regardais pas où j’allais.

- Vous n’avez pas à vous excuser, mademoiselle…

- Long ! Amélia Long ! s’exclama-t-elle en lui remettant les documents qu’elle avait ramassés.

- Eh bien, mademoiselle Long, je dois aussi vous avouer que je ne regardais pas devant moi en marchant. Vous n’êtes pas la seule fautive dans cette histoire.

Les deux jeunes femmes se redressèrent et restèrent silencieuses pendant quelques secondes. Durant cette courte période, Amélia ne put s’empêcher de trouver Alicia quelque peu étrange, surtout avec la façon dont elle la fixait. C’était comme si elle avait quelque chose marqué sur son visage.

- Excusez-moi, mais pouvez-vous arrêter de me regarder de la sorte ? demanda-t-elle.

- Je suis désolée. C’est juste que j’ai l’impression de vous avoir déjà vu quelque part. À vrai dire, je pense vous avoir vu la photo d’une connaissance à moi, répondit-elle.

À ce moment, Amélia se demanda de qui elle pouvait bien parler, d’autant plus qu’elle était certaine de ne jamais avoir rencontré la femme devant elle de toute sa vie. Cependant, sa curiosité fut mise à l’épreuve quand Alicia la questionna pour savoir si elle connaissait un certain Chrees Moure.

- Vous connaissez Chrees ? rétorqua mademoiselle Long.

- Pas au sens propre du terme. Il y a de cela 4-5 jours, il est passé dans le bar que je tiens, l’air complètement abattu. Nous avons discuté pendant un bon moment. Il m’a notamment parlé de la mauvaise phase qu’il traverse et c’est là où il m’a montré une photo de vous en me disant à quel point tout était votre faute, que si vous n’étiez pas partie, tous ses malheurs ne se seraient jamais produits.

En écoutant ce que venait de lui dire Alicia, Amélia ne put s’empêcher d’être en colère contre son ex-petit ami. Une fois de plus, il l’avait fait passer pour la méchante de l’histoire en rejetant toute la faute sur elle alors qu’ils n’étaient même plus ensemble.

- Est-ce qu’il est venu vous voir ? demanda mademoiselle Garnier.

- Je ne crois pas non.

- C’est bizarre. Il m’avait dit qu’il allait passer vous voir durant la semaine.

- Il n’est pas venu. À vrai dire, je n’ai eu aucune nouvelle de lui depuis 5 jours.

- J’espère qu’il ne lui est rien arrivé de grave. Il avait l’air d’être une personne plutôt gentille quand je l’ai croisé.

- J’en doute.

- Quoi qu’il en soit, il semble tenir beaucoup à vous…

Mademoiselle Garnier poursuivit en lui disant que si elle venait à obtenir des nouvelles de la part du jeune homme, qu’elle la tienne au courant.

- Je ne connais même pas votre nom.

- Alicia Garnier.

Elle ajouta alors qu’elle était la propriétaire du bar Dionysos et lui donna également l’adresse de son établissement. Alicia s’excusa ensuite auprès d’elle Amélia, lui déclarant qu’elle était en retard pour son rendez-vous. Mademoiselle Garnier rentra alors dans la banque, laissant son interlocutrice derrière elle.

Amélia observa Alicia disparaitre derrière les portes de la banque. Elle ne pouvait alors s’empêcher de penser à tout ce qu’on venait de lui dire, ce qui renforça son inquiétude vis-à-vis de la soudaine disparition de Chrees. Elle se demandait notamment où il avait bien pu passer et décida de contacter tous ses amis après ses heures de travail. Elle devait en avoir le cœur net. De son côté, mademoiselle Garnier venait peut-être de tomber sur un moyen de briser Chrees moralement. Cependant, elle aurait besoin d’en apprendre plus sur lui. Quoi qu’il en soit, sa priorité pour le moment était tout autre.

A suivre !!!