Chapitre  LII (1/2)

3 minutes de lecture

Je me réveillai le lendemain matin avec les bras presque aussi ankylosés que les pensées. J’étais sur le flanc, collée contre le dos d’Orcinus comme si une force supérieure risquait de l’arracher à mon étreinte pendant mon sommeil. Mes mains étaient accrochées à lui comme une aussière à un taquet, mes seins se pressaient contre sa peau et mon souffle faisait frissonner les petits cheveux de sa nuque. Je le serrai sur mon cœur comme s’il risquait de disparaître et, tout en se retournant doucement pour me faire face, il accrocha aux miens ses yeux d’ambre ou de lave au fond desquels brillaient deux points d’interrogation presque incandescents.

« - Tout va bien, Lumi ? Tu as fait un cauchemar que tu te serres contre moi comme ça ?

- Non… Pas du tout. J’aime te sentir près de moi, c’est tout.

- Ce sont les remarques légèrement abruptes de ta sœur sur mon charme irrésistible qui t’ont rappelé à quel point tu as de la chance de dormir avec moi tous les soirs, peut-être ?

- Exactement !

- …

- Au fait, je suis désolée que Suni ait cassé ton pendentif.

- Ce n’est rien… Elle a eu peur, elle s’est accrochée à moi et la lanière s’est cassée. Elle n’a pas fait exprès. Et heureusement, elle l’a rattrapé à temps! Il suffira de trouver un nouveau cordon de cuir et ce sera réparé. Je trouverai ça facilement à Héliopolis ou à Port-Eden. En attendant, je l’ai posé sur l’étagère, dans la voilerie. Il veillera sur toi. Du moins, quand tu dormiras sur ta paillasse et non sur la mienne.

- Je paierai la réparation.

- Ce n’est pas la peine, Lumi.

- Bien sûr que si ! Tu as sauvé la vie de ma petite sœur, Orcinus. C’est le moins que je puisse faire.

- …

- …

- Quand même, je n’en reviens pas qu’elle ait pu te dire qu’elle te trouve beau comme ça, sans aucune gêne…

- Tu n’en reviens pas qu’elle me trouve beau, ou qu’elle me le dise aussi franchement ?

- Qu’elle te le dise, évidemment ! Pour le reste, je suis bien d’accord avec elle… D’ailleurs, ce n’est pas surprenant qu’elle ait aussi bon goût, puisqu’elle est ma sœur ! Elle n’est pas aveugle, je ne peux pas lui en vouloir… Mais j’espère quand même qu’elle ne dit pas ça trop souvent à des hommes qu’elle ne connaît pas. A Champarfait, ce n’est vraiment pas l’usage.

- Chez nous non plus… Mais c’est flatteur, ceci dit. J’aurais peut-être dû m’installer ici, j’ai la cote avec les demoiselles de ce pays, apparemment !

- Pffff…

(Il m’embrassa.)

- …

- Tu sais, Suni n’est pas très délicate mais elle a raison : je suis heureuse de me réveiller près de toi tous les matins, Orci, même si je ne te le dis pas souvent.

- Tu veux dire que tu ne me le dis jamais…

- …

- …

- Je t’aime, Orcinus.

- Moi aussi je t’aime, Lumi. Et je vais inviter ta chipie de petite sœur plus souvent, si ça te rend aussi sentimentale !

- Ce n’est pas elle, c’est toi qui me rends aussi sentimentale, quand tu me regardes avec ton sourire trop mignon, tes grands yeux de soleil et ta peau douce… »

Je joignis le geste à la parole, caressant au fil de mes mots la fraîcheur corail de ses lèvres, le velouté doré de sa joue et la fermeté moelleuse de son ventre. Puis je l’embrassai avec appétit, titillant sa langue au rythme de la mienne, laissant ma main gauche caresser sa hanche tandis que la droite s’égarait sur son sexe impatiemment dressé… Il laissa échapper un gémissement, ferma une seconde les paupières, puis vint sur moi et me parcourut des pieds à la tête dans un long regard très gourmand.

Ses doigts prirent ensuite le même chemin, pianotant sur ma peau avec un rythme mi-alangui, mi-exigeant. Ils explorèrent le creux de mes chevilles, la rondeur de mes hanches, le moelleux de mes cuisses, les courbes de mes seins et les secrets de mon intimité. Ils éveillaient en moi des sensations sans cesse renouvelées, comme une page qu’il ne cessait jamais vraiment d’écrire. Et ma peau, qui faisait office de parchemin, frissonnait sous ses lèvres sans jamais se lasser.

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