Chapitre 12

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Écrit en écoutant notamment : Vortek's – Phonk Off Tekno


Dimitri – IV (suite)


Dimitri récupère les boissons au bar et rejoint Kenzo, déjà installé à une table le long du mur imitation brique.

  • Merci mec ! dit ce dernier. Et sinon, qu’est-ce que tu penses de notre nouvelle recrue ?
  • Tu parles de Martial ?
  • Qui d’autre ! C’est cool qu’il ait à peu près notre âge, par contre, il est super timide avec nous, c’est dingue.
  • Ouais carrément, sauf avec le boss, là le courant a l’air de bien passer. Perso, j'ai seulement échangé quelques mots avec lui jusqu’à maintenant ; on devrait l’inviter à boire un verre un de ces jours.

Kenzo se penche sur son verre et en aspire bruyamment une gorgée à travers une paille colorée. Il reprend :

  • Pourquoi pas… Mine de rien, tu lui as plus tapé dans l’œil que moi, alors que je suis censé être irrésistible ! Si t’avais vu son regard tout à l’heure quand je te prenais…
  • Irrésistible ! Rien que ça, Kenzo ! Bon, c’est vrai que t’as quelques arguments à faire valoir, et je suis bien placé pour le savoir. Heureusement que je commence à avoir l’habitude… Pauvre Martial, il mettrait deux jours à s’en remettre !
  • En plus, je suis sûr qu’il a un petit cul splendide. Je sais pas, ça me plairait bien de lui organiser une petite « soirée d’intégration » chez moi !
  • Hmm, est-ce qu’on devrait pas le laisser taper des lignes de code tranquille ?
  • Rabat-joie ! s’écrie Kenzo.

Son regard se plante dans celui de Dimitri, comme s’il y cherchait la moindre faille de sécurité. Au bout de quelques secondes, il parvient à lui décrocher un sourire.

  • C’est vrai… je me le ferais bien aussi… Défi ?
  • Accepté ! dit Kenzo en lui tendant la main. Tu vas voir, les lits de l’hôtel à Saint-Malo vont grincer comme jamais.
  • Je compte bien y arriver avant, haha ! Par contre, il ne risque pas de se rendre compte de quelque chose si deux gars le draguent en même temps ?
  • Bof… ça l’étonnera pas, il se dira qu’on est du genre à sauter sur tout ce qui bouge. C’est pas vraiment faux pour moi, je suis un méchant garçon ! conclut-il en vidant son verre d'une traite.

***

Je marche dans les rues de Nantes en direction du studio. On est vendredi, je vais déjà terminer ma deuxième semaine ! Il aura fallu trouver un appartement dans un délai très raccourci, mais je suis satisfait du quarante mètres carrés que j’ai déniché en plein cœur de la ville. Maintenant que j’ai les moyens de me le payer, ça me change des studios étudiants deux fois moins spacieux. Pour l’instant, le tout manque clairement de décoration, mais chaque chose en son temps, car j’ai déjà un travail de ministre.

Il faut s’approprier tout l’environnement technique du site, ce qui n’est pas une mince affaire. J’ai surtout l’impression de harceler les prestataires qui s’occupent de la maintenance du site. Heureusement, Daniel a tenu à me faire relativiser : « Si tu savais combien on les paye, ils ont intérêt à nous accorder du temps ! ». Je me rends compte qu’il faudra encore quelques jours ou semaines au même rythme avant de pouvoir réellement me lancer dans les projets que Daniel m’avait vendus. J’espère qu’il sera compréhensif par rapport à l’inertie dans le départ de mon travail.

Plus intéressant, il m’a aussi fait assister à un tournage ce mercredi. Je savais que l’ambiance serait particulière, mais voir ces deux beaux garçons faire l’amour m’a vite fait virer au rouge. Il était difficile de me convaincre que ce n’était pas du voyeurisme, pas plus qu’en regardant le film une fois monté… Et pourtant, j’ai eu l’impression de déranger leur intimité. Surtout celle de Dimitri…

C’est lui qui m’a finalement fait accepter l’offre de Daniel. Le boss de Brittany Twinks a bien ri lorsque je l’ai rappelé même pas vingt-quatre heures plus tard… Après être rentré à Paris le dimanche, j’ai feuilleté la plaquette qu’il m’avait filée avant de partir ; mes yeux ont failli choir de leurs orbites lorsque j’ai reconnu ce fameux Nils Foxx. Évidemment, c’était juste son nom de scène… Dimitri dans la vraie vie.

Il est tellement désirable dans sa tenue légère ! Ces lèvres ne demandent qu’à être embrassées, ce torse fin à être caressé avec volupté.

Je repense à ma réponse à Sarah lorsqu’elle m’avait demandé un jour comment je définissais le sentiment amoureux. Des sentiments incontrôlables qui poussent à des actions insensées. C’est exactement ce que je suis en train de faire : il est tellement idiot de vouloir un garçon si différent de moi, mais je ne pouvais pas laisser cette occasion s’envoler.

Jusqu’ici, nos interactions se sont limitées à quelques simples salutations les deux ou trois fois où il est passé au studio. J’ai encore du chemin à accomplir avant d’entrevoir un rapprochement. Le pire dans cette affaire est qu’il y a bien un mec qui s’intéresse à moi, ce fameux Kenzo. On n'entend parler que de lui, bien qu'il soit tout juste plus ancien que moi au studio ! Hier, il est venu me proposer de sortir ensemble ce vendredi soir, mais j’ai dû refuser étant donné que j’avais déjà pris mes billets de train depuis plusieurs jours, pour rentrer en famille et célébrer l’anniversaire de ma mère.

Pour ne pas le froisser, je lui ai proposé de remettre cette sortie à plus tard, par exemple lors du voyage à Saint-Malo de la semaine prochaine. De toute façon, je ne suis pas très pressé : je sais d’avance que je serai super embarrassé face à lui. Autant miser mes jetons sur le mec du bar d’échecs : même si je ne crois qu’à moitié Daniel sur ce coup, on a déjà la passion du jeu en commun.

***


Après trois heures de voyage porte à porte, je débarque chez mes parents - et mon frère accessoirement, qui est en Terminale. Contrairement à mes vieux, qui m’embrassent tour à tour, ce dernier ne se fait pas remarquer.

  • Encore collé sur son ordi, j’en suis sûre, soupire ma mère à son propos.
  • Je m’occupe de vous le faire descendre, dis-je avec un sourire. Tenez, j’ai déjà ramené quelques petites spécialités nantaises.

Je dépose sur le plan de travail de la cuisine la bouteille de Muscadet du coin et une boîte des berlingots qui font la renommée de la ville. Mon frère daigne relever une oreillette de son casque lorsque je franchis le pas de sa chambre.

  • Yo frérot, alors ça ken des mecs à Nantes ?

Ok, je ne m’attendais pas à ce type d’accueil.

  • J’ai des pistes, mais rien de très sérieux. Et toi ?
  • Bah ça se passe ! Regarde-moi cette meuf, dit-il en me montrant un profil Instagram. Demain, y'a soirée thème Halloween avec toute la classe pour fêter la fin des cours. Je compte bien planter mes dents dans son cou, si tu vois ce que je veux dire.
  • Pas mal, pas mal… J’avais complètement oublié que les vacances scolaires existaient...

En fait, c’est plutôt logique, Daniel profite aussi des vacances universitaires de la Toussaint pour emmener notre équipe à Saint-Malo en semaine. Ce sera plus facile pour les acteurs qui ont leurs études en parallèle…

  • Tu joues à quoi ? ajouté-je en jetant un œil à son écran.
  • Ghost of Tsushima ! Il est ouf.

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