La nouvelle ère
Deux ans plus tard, dans un monde qui a bien changé, Aurélie est au lycée agricole : « J'apprends tout ce qui peut lui être utile pour les survivalistes bio en autonomie financière. C'est ma nouvelle religion. » Suite à la reprogrammation psychique de Patrice, il y a quelques effets secondaires. Lorsque Aurélie est en charge de la ferme le week-end, elle a du mal à résister au charme des bottes de paille avec son binôme, fille ou garçon, lorsque ce n'est pas un prof. « Je m'assure de ne provoquer aucune tension avec quelques techniques d'envoûtement que Patrice m'a appris, ses trucs d'hypnose et autre, mais pas de chimie, pas la peine, je sens bien l'envie et la disponibilité de mes partenaires. Tout le monde veut de l'amour. La plupart en ont même à revendre. Moi je suis gratuite. »
Pendant les vacances Aurélie rentre chez Aline. "Je revois Natacha, elle est en pharma, à chaque fois je la trouve encore plus belle. Frédéric a trouvé son sosie fille, Dominique, une grande brune aux cheveux longs et lisses, aux yeux clairs et au style gothique presque naturel tellement c'est en elle. Quand Frédérique est en fille, on les appelle les jumelles. « Natacha me parle d'elle de façon étrange : Elles sont troublantes et hypnotiques. Pour moi, cette histoire de jumelles reconstituées est déroutante, captivante, envoûtante. Dominique a l'air vraiment accrochée à son Fred, elle est possessive mais prête à faire toutes les concessions pour ne pas le perdre, elle n'attend qu'une chose, c'est qu'on aille voir ailleurs. »
Patrice n'est jamais très loin de Natacha, il œuvre toujours avec le père Simon. Marwah fait aussi partie de leur groupe maintenant. Une équipe de choc. SOS possédés. Marwah nous raconte : « Je n'ai pas rechuté. J'ai quelqu'un en moi qui m'en empêche. C'est comme un vaccin psychique qu'on m'aurait inoculé. J'apprends à vivre avec mon hôte, dans ses rèves et quelques fois en méditation avec le père Simon. Mais je n'arrive pas à mémoriser nos conversations. Un jour j'ai mis son smartphone en mode dictaphone. C'est là que j'ai compris que mon hôte et le père Simon se sont bien connus. Je me sens un peu flouée, utilisée à des fins étranges. Je suis guérie mais quelle est ma part de contrôle dans tout ça ? Parfois je ressens mon hôte trop présente, elle pense quelquefois à ma place. Bientôt elle agira à ma place ? Mais je sens quand même que c'est une âme bienveillante et aimante, qui ne me veut pas de mal mais plutôt du bien, surtout au père Simon. »
Quant à Noël : " Je travaille au conseil général et à la préfecture, Aline est à la mairie. « Des fonctionnaires effacés en société mais les leaders d'un monde libre en privé, héros de leur quotidien dans un cocon d'amour à l'abri de l'orage de haine qui gronde dehors. Aline fait souvent des rèves étranges : "Je me vois ailleurs, avec Aurélie, dans longtemps, il y a plein de nouveaux visages et on est heureuses. Et puis je fais une sorte cauchemar aussi, toujours le même où je suis quelqu'un d'autre, je ressens du danger, je suis poursuivie par des flashs. »
Patrice se sent bien avec Natacha. Le soir avant de s’endormir, ils ont un rituel. D’abord il lui parle comme jamais il ne s’est confié, même à Aline ou au Père Simon :
- J’ai trop d’activités. Entre le boulot, les interventions pour l’Église et le reste, je n’ai plus assez de temps pour toi, pour nous.
- Pour toi aussi mon chéri. Tu devrais prendre des vacances et dormir. En tous cas j’ai le temps de réviser en ce moment, tu ne rentres qu’un jour sur deux. Tu as une double vie, c’est ça ?
- Si elle n’était que double… Tout n’est pas clair, j’ai des absences. Des fois je me retrouve dans des lieux sans savoir quel jour ou quelle heure il est, sans savoir comment j’y suis arrivé. Je me demande si ce n’est pas l’évêque qui m’hypnotise ou autre. Peut-être des missions confidentielles. Ça commence à me poser des problèmes avec le travail. Au boulot ils sont un peu tendus quand je ne peux pas justifier mes absences.
Ensuite le rituel se poursuit avec un petit câlin, il lui embrasse toutes les taches de rousseur de son visage puis finit dans sa bouche. Et lorsqu’elle le fixe de son grand regard clair, ses mains vont explorer tout le reste de son corps, un voyage fait de collines à caresser, d’un buisson à explorer, de grottes dans lesquelles se réfugier quand l’orage crie de sa voix rauque qui appelle le désir. Ses mains reviennent se perdre dans ses cheveux bouclés pour prendre son visage et l’orienter en bas et elle descend débusquer la bête qui après quelques soubresauts finit dans sa bouche. Ensuite le rituel continue avec le gros câlin, leurs esprits n’ont plus la maîtrise de leurs corps, ils se voient d’en haut, deux animaux qui s’agitent l’un dans l’autre, gémissants, transpirants, se griffant de plaisir, une première vague d’amour qui vient s’échouer sur les rochers de leurs cœurs, elle se retire dans la mer, ils s’endorment, elle revient, ils se réveillent et s’aiment à nouveau, cette fois-ci en silence, et ainsi de suite jusqu’à être à court de pulsions avant de sombrer dans leurs rêves, échoués sur la plage où le sable garde la cicatrice de leurs ébats. Et chaque matin il lui demande :
- Tu veux m’épouser ?
- Quand on sera une famille, avec un bébé, après les études, si tu tiens jusque là.
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