Il suffit d'une lettre...
Sur le globe, on peut désigner la haine par une seule lettre, parler d'une jeune fille avec un L, synthétiser la paix d'une flatulence, puis annoncer une nouvelle ère à travers les airs, avec plus de sobriété qu'un cri du coeur. Apprécier une personne ? Lui confier son essence, son esprit, voire sa vie ? On ne peut l'abréger d'une seule lettre.
Autrefois j'affectionnais une personne. Oui, un vieux souvenir du passé, préservé de la vieillesse. Plus qu'une banale passion charnelle ou un baiser transpirant dans le cou, difficile d'y graver une lettre ou d'en décrire la beauté d'une phrase bien troussée. Une fine tranche d'adolescence, libre et inconsciente de l'avenir ou des attentes de la société. La bonne société, celle qui tolère en façade la laïcité et le brassage culturel.
La séparation fut bien différente des histoires à l'eau de rose. Je suis parti d'un côté, lui de l'autre. Il n'y a eu ni chagrin, ni colère, juste un vide passager. Nous échangeons quelques fois, par réseau câblé, le coeur n'y est cependant plus. Au fond, nous étions juste jeunes, peut-être aussi arrogants. L'avenir paraissait tout tracé, la bonne société nous l'a ôté. Cette société qui au final, vous force à entrer dans le rang, sous des valeurs chaque jour baffouées sur les grandes ondes.
Une lettre peut changer une vie. Reste que c'est une lettre : fragile, délicate, substituable. L'enlever ou l'ajouter quelle différence, quand un unique L suffit pour briser une soirée d'été ? Je n'ai pas la réponse. J'ai d'ailleurs arrêté de la chercher. La solitude c'est bien aussi.
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