Pour mieux encore se moquer de ces gens qui lui avaient tout volé, Avenant proposa à sa fidèle clientèle, alors qu’on cherchait un nouveau dirigeant, le nom de son ami Cabriole. Il parla aussi du pays d’où il venait, de cette cité Diamant où on changeait de dirigeant tous les dix ans.

 Un soir, Avenant glissa à l’oreille de son ami, son ancien serviteur et son amant d’adolescence :

— J’ai été roi, un jour, je deviendrai dirigeant et je serai à nouveau bon.

 Cabriole applaudit son souhait et l’écouta jouer de l’ocarina avec cette question au bout des lèvres : « Combien de pierres avait-t-il vendues depuis toutes ces années ? ». Il savait que les précieuses roches étaient connectées à l’ocarina et se demandait si un jour Damaulnoy ne serait pas entièrement sous la coupe d’un sort collectif. Car à y voir plus clair, Avenant ne pourrait pas redevenir bon. Son cœur était bien trop émietté.

 Il contempla son ami qui observait le plafond comme s’il eut une image du passé sous les yeux.

 Cabriole était conscient du mal qui avait dissous le cœur de ce brave. Parfois, Avenant parlait comme s’il était Célestéa. Tous deux avaient de grandes discussions sur leur vengeance. Mais en vérité, c’était Avenant tout seul qui décidait. Pas de fantôme à proprement parler, et comme le marchand l’imaginait.

 Cabriole savait qu’un jour prochain, il devrait le tuer. Ne serait-ce que pour apaiser le mal qui le rongeait.

 Il y avait souvent songé, sans y parvenir. Après tout, Avenant avait été son seul amour.

 Aujourd’hui, il était préférable de partir une dague plantée au cœur.