Prologue !

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Cinq mois et onze jours ! C’est le temps exact qui vient de s’écouler depuis que ma vie a basculé, le soir du vingt-quatre décembre de l’année dernière.

Eh oui, je me suis fait plaquer pour le réveillon de Noël et devant toute ma famille de surcroît. L’homme que je pensais être le bon m’a fait une déclaration devant toute l’assemblée. Mais là où j’ai cru qu’il allait me demander en mariage, il m’a tout simplement jetée comme une vieille chaussette usagée, qui a fait son temps. Il m’a reproché mon immaturité et mes copines cinglées. Et personne n’a le droit de s’en prendre à mes âmes sœurs, elles ne sont peut-être pas tout à fait nettes, j’en conviens, mais elles restent les plus importantes dans ma vie et les plus fidèles aussi !

Et puis, elles au moins, ne m’ont jamais traitée de foldingue !

Cinq mois et onze jours et je n’ai toujours pas décolérer. D’ailleurs, heureusement pour lui, depuis, je n’ai jamais eu l’occasion de recroiser sa route. Parce que, si sur le coup, je me suis trouvée comme deux ronds de flans flasques devant lui, ne sachant plus quoi dire, depuis, je ne suis plus à court d’insanité à lui balancer. J’en ai même fait un carnet, que j’ai appris par cœur, histoire d’avoir de la répartie à notre prochaine rencontre. Parce qu’il est bien connu, qu’il n’y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas. Bref, je suis parée à toutes éventualités.

— Salut les pétasses, alors, qu’est-ce qu’on boit ?

Je relève les yeux vers Léo qui vient d’arriver dans le bar où nous nous sommes donné rendez-vous. Notre endroit à nous, notre fief comme on dit ! Elle se laisse tomber à côté de moi, en me bousculant par la même occasion.

Cette nana est aussi douce qu’un camionneur.

— Tout dépend de la raison pour laquelle tu nous as donné rendez-vous, avec, je cite, le nom de code « urgence » dans ton message !

Joy vient de croiser les bras sur sa poitrine en se renfrognant. Elle ne semble pas ravie de cette petite soirée improvisée. Mais c’est le contraire qui serait étonnant. Elle est comme ça, méthodique, organisée avec les pieds sur terre, à peu près tout le contraire de Léo et moi, je suis un savant mélange des deux, enfin, la plupart du temps.

— Ouais, ouais, ouais, j’y viens ! Détends-toi un peu, sinon, tu vas nous faire un infarctus avant l’âge de trente ans, ma chère « Rafiki ».

J’éclate de rire. Décidément, je ne me ferai jamais à ce nouveau surnom que Léo à attribuer à Joy, sans son consentement, soit dit en passant. À chaque fois qu’elle le prononce, je ne peux m’empêcher de voir le singe dans le roi Lion.

— Un problème « la morue » ?

Je me renfrogne, OK, le mien n’est pas beaucoup mieux. Note à moi-même, ne jamais laisser les copines, vous donnez un sobriquet totalement ridicule, surtout en état d’alcoolémie avancé, car après, cela vous suit jusqu’à la fin de votre vie. Tout ça, car lors d’une soirée bien arrosée, je suis tombée amoureuse d’un poisson rouge dans son bocal. Il paraît que j’ai passé la nuit à lui déclarer mon amour, en lui disant que je n’étais quand même pas trop mal foutue, pour une morue. Bref, si moi j’ai complètement oublié cet évènement, ce n’est malheureusement pas le cas de Léonie. En même temps, cette nana, c’est un puits sans fond. Je n’ai jamais compris comment une si petite chose pouvait avaler une aussi grande quantité d’alcool et arriver à tenir debout.

Encore un mystère scientifique, qui ne sera jamais élucidé !

— Dis donc Cléo, il y a combien de temps exactement que tu es arrivée ? Demande Léo qui me fixe en haussant les sourcils.

— Vu le nombre de verres sur la table, je dirais au moins deux heures, lui répond Joy. Ce qui d’ailleurs, pourrait expliquer son air réjoui, alors qu’elle tire la gueule depuis des mois.

Je suis cerné entre mes deux copines, écraser par leur corps qui m’entoure, alors que je suis complètement vautré sur la banquette. Bon, elles n’ont pas tout à fait tort non plus. Il est vrai que je suis arrivé bien avant l’heure et il se pourrait aussi, que j’aie passé le temps en sirotant quelques cocktails. Mais très franchement, j’en avais besoin et je me sens bien.

— Accouche « la morue » !

— J’avais juste envie de prendre un peu de bon temps, d’ailleurs, on commande, j’ai soif.

Léo me fixe avec un grand sourire, alors que Joy semble essayer de me faire la morale d’un simple regard. C’est qu’elle pourrait réussir à me faire peur avec cette tête-là.

— Joy, arrête ça tout de suite. On dirait un croisement entre éléphant Man et oui oui !

— Je vois que tu sembles aller mieux toi, me répond-elle. Il y avait longtemps que ta bouche n’était pas allée plus vite que ton cerveau.

Je hausse les épaules en déposant mes pieds sur la table basse devant moi. J’ai l’impression de me sentir bien et cela ne m’était pas arrivé depuis une éternité.

Les mecs sont tous des connards, chat échaudé ne craint plus l’eau chaude, ou un truc dans le genre, bref, vous aurez compris l’idée !

— Mata Hari, si au lieu d’épiloguer sur mon état de santé, tu allais plutôt nous chercher de quoi nous réhydrater, avant que l’on finisse par réellement se dessécher.

J’accompagne bien évidemment ma demande d’une petite moue désespérée. Elle se lève en soupirant, mais elle y va. C’est fou la capacité d’empathie de cette meuf. Elle doit être la fille spirituelle de mère Thérésa et Mata Hari avec quelques gènes du père Fouras.

— Bon, en attendant « la morue », tu te décides à me raconter pourquoi tu viens de t’enfiler plusieurs cocktails sans les copines.

— Et toi, tu te décides à me dire pourquoi tu as utilisé le nom de code « urgence » pour nous faire venir ici.

Nous nous toisons à coup d’œillade, cherchant à connaître les petits secrets de l’autre, chacune campant sur sa position. Vous avez déjà vu les films de cow-boys ? Quand ils se font face et qu’ils se fixent l’œil noir, prêt à dégainer ? Ben c’est pareil, les flingues en moins ! Le tout, dans notre cas, c’est de savoir laquelle finira par baisser la garde la première.

— Accouche !

— Toi d’abord !

Je me concentre en plissant les paupières. Ma cocotte, si tu crois que je vais te laisser gagner, tu te fourres le doigt dans l’œil et bien profond. Je suis au top de ma forme, au taquet, au max de ma concentration. Je viens juste de finir de me convaincre moi-même, quand une silhouette qui me semble familière passe à proximité.

Je détourne la tête et je perds le contact visuel juste, une demi-seconde, pour connaître l’identité de ce fantôme. Une demi-seconde de trop, bien évidemment. Puisque, je n’ai pas le temps de repérer ce qui m’a attiré l’œil que ma meilleure amie est déjà debout sur la banquette en train de crier « J’ai gagné »

Ma curiosité me perdra !

Le temps se fige, ma respiration se coupe, mon sang bourdonne à mes oreilles et ma vue se brouille. Non, ce n’est pas possible, je dois être en train de rêver, c’est un cauchemar et je vais me réveiller. Je me pince par réflexe, même si je sais très bien, que la scène qui se déroule devant mes yeux est parfaitement réelle. Connor ou connard, comme nous l’avons surnommé, depuis qu’il m’a planté en plein dîner de réveillon, en me laissant seule avec ma famille qui n’en a que le nom. Je me suis retrouvée au milieu de mes parents, en train de se demander ce qu’ils avaient bien pu faire au Bon Dieu, pour avoir hérité d’une fille comme moi. Ouais, pour votre information, je suis le vilain petit canard, celle qui ne vaut rien, enfin, par guère plus que notre chien Marcus, qui a fini enterré dans le jardin.

Je l’aimais bien ce chien !

Bref, connard vient d’entrer dans le bar, dans mon bar, putain de merde ! Ici, c’est chez moi et il n’a absolument rien à y faire. Je voudrais pouvoir me diriger vers lui et lui donner le fond de ma pensée, tout en lui vidant le contenu de mon verre sur son somptueux costume. Non, mais franchement, qui vient boire un verre, dans un bar branché, en costume ? Personne, mis à part un connard, bien entendu. Mais étonnamment, mon cul semble ancré dans la banquette. Impossible de me lever, un peu comme si, une force invisible était en train de me retenir dessus.

Ou alors, j’ai pris beaucoup plus de poids que je ne l’aurais crue ces derniers mois.

Tout à coup, une masse vient se matérialiser devant moi, m’empêchant d’observer la scène surréaliste à laquelle, je suis en train d’assister. Je relève la tête prête à donner le fond de ma pensée à cet individu, mais c’est sur Joy que mon regard tombe.

— Alerte rouge, les meufs !

— Ouais, je sais, j’ai vu ! Pourquoi crois-tu que je sois en train de grimper sur le dos de Cléo sinon ?

Ceci explique cela, le poids en fait, c’est tout simplement Léo, qui joue les équilibristes sur la banquette.

Il me faut un verre et un truc fort de préférence !

Quelque chose qui est susceptible de me mettre dans le coma, si je ne veux pas risquer de lui sauter dessus pour l’étrangler.

— Joy, dis-moi que tu n’es pas revenue les mains vides !

— Tu me prends pour qui ? Même si j’ai bien failli jeter mon plateau dans la gueule de connard. Mais finalement, je me suis dit que je ne pouvais pas te laisser te déshydrater et que ce serait du gâchis.

Je lui souris, elle me sourit, nous nous sourions, je l’aime cette fille !

— Ben, pousse-toi de là alors !

Elle hésite et Léonie vient de reprendre l’ascension de mon dos, alors je me retourne en la foudroyant du regard.

— Putain Léo, tu m’as pris pour le mont Everest ou dans une ancienne vie, tu étais un chien ? Il ne manquerait plus que tu te mettes à me renifler le cul, pour parfaire le tableau.

— Beurk, non, t’es dégueulasse, s’exclame-t-elle en mimant une expression de dégoût qui me donne juste envie de rire.

— Ben, alors descends de là !

— OK, mais tu me promets de te tenir tranquille et de ne rien faire de stupide et d’irréfléchi.

— Qui moi ? Vous me connaissez ?

— Ben justement !

Elles ont répondu à l’unisson, c’est ce que l’on appelle un cri du cœur. Je pourrais paraître vexer, sauf qu’elles ont raison. Je suis plutôt connue pour être plus réactive que réfléchie. Mon corps est un peu comme ma bouche, les deux vont en général plus vite que mon cerveau, ce qui me met souvent dans des situations, un peu embarrassantes.

OK, très embarrassante.

— Promis !

— Cap ou pas cap, me répond Léo ?

— Cap bien sûr !

Elle se rassoit en souriant et Joy la rejoint, me laissant le champ libre sur les verres d’alcool qui se trouve sur la table. Je suis la number one du cap ou pas cap, personne ne m’a jamais battue, je suis capable de tout, rien ne m’arrête, même pas un connard !

Je me jette sur le premier cocktail accompagné de mes amies, mais je ne prends pas le temps de le savourer, je l’avale cul sec. D’ailleurs, je suis parfaitement incapable de dire ce qu’il contenait. Je suis bien trop absorbée par connard, qui est en train de siroter son verre au bar, tranquille, comme si tout aller pour le mieux.

— Bon, Léo, tu vas enfin te décider à nous dire pourquoi tu nous as fait venir, avant que Cléo ne roule sous la table.

— Je vais très bien ! M’insurgé-je.

Et je suis sérieuse, même connard ne me fait plus aucun effet. Je suis entourée de mes copines, il ne m’en faut pas plus pour être heureuse.

— Bon, je me suis dit que notre amie Cléo ici présente avait besoin de se changer les idées. Nous sommes bientôt aux vacances scolaires et nous allons donc être libres comme l’air.

— Accélère le mouvement. Lui demande Joy.

— Laisse là finir, sinon, nous en avons encore pour la nuit et moi, j’ai soif !

— Je disais donc ! J’ai eu l’idée du siècle. Nous allons partir toutes les trois faire le tour de France en camping-car !

Je manque de m’étouffer avec le deuxième cocktail que je suis en train de m’envoyer.

— Vas-y doucement quand même, ce n’est pas de l’eau et puis avec tout ce que tu t’es déjà enfilé. Me prévient Joy.

— Mais qu’est-ce que t’es Raba joie toi ! Pète un coup, cool Raoul, tranquille Emile, détend toi du string !

— C’est bon, elle est mûre !

— Encore un verre ou deux et connard ne craindra plus rien, il faut voir le bon côté des choses, répond Léonie en haussant les épaules !

Je les laisse discuter, de toute façon, je ne comprends plus grand-chose de ce qu’elle raconte. Il me semble entendre les mots camping-car et mamie camomille, mais mon cerveau est bien trop occupé à tenter de comprendre ce que mes yeux voient. Connard, avec une fille et vue comment elle se colle à lui, il ne vient sûrement pas de la rencontrer ou alors, elle est encore plus chaude que la braise. Il l’embrasse, il est en train de fourrer sa langue dans sa bouche, peut-être même, qu’il cherche ses amygdales. Il faut dire que, rouler une pelle à connard, c’est un peu comme une expédition chez l’ORL, en vue, d’une éradication amygdalite. Sa main, qui il y a peu de temps était posée sur sa taille, vient de glisser sur ses fesses.

Je rêve !

J’hallucine !

Je suis en plein cauchemar !

— Je vais me le faire, je jure que je vais lui couper les couilles et lui faire bouffer à la petite cuillère !

Je me lève, abandonnant mon cerveau derrière moi. Trois ans de vie commune et en à peine cinq mois, il m’a déjà remplacée. J’ai du mal à y croire, je pensais vraiment qu’il avait un peu plus de considération pour moi. Mon petit sucre d’orge, ma pomme d’amour, tous ces surnoms à la con me donnent juste envie de gerber. Mais vraiment, je jure que ce n’est pas une façon de parler, j’ai vraiment envie de vomir. Plus j’avance vers eux et plus j’ai l’estomac qui me remonte dans la gorge.

Putain, je vais vraiment gerber !

Au moment où je bifurque pour prendre la direction des toilettes, connard me voit. Si je pars, il va croire que je le fuis, que je me cache, qu’il peut encore m’atteindre. Je m’arrête, j’enfile mon plus beau sourire, enfin, autant que mon serrage de mâchoires me le permet et je me dirige vers eux, tentant de me contenir du mieux que je le peux.

Le reste se déroule au ralentie, comme si l’univers tout entier, voulait que je me souvienne toute ma vie de cet instant. Qu’il reste graver dans mon esprit à tout jamais.

Connard s’avance. Mon estomac se contracte.

Connard me sourit. Mon estomac se soulève.

Connard ouvre la bouche. Je ne peux plus me contenir, tant la brûlure dans ma gorge est insupportable. J’expulse le contenu de mon estomac sur sa belle chemise toute blanche et je peux enfin respirer librement. Je me sens soulager.

Il me regarde et s’énerve. Je crois comprendre qu’il me traite de folle furieuse, rien de nouveau en fait, de toute façon, je ne l’écoute pas. Il se dirige vers les toilettes, sa pétasse à ses trousses et moi, je reste là, planter.

Finalement, ce n’est peut-être pas une si mauvaise idée ce tour de France !


Bonjour et bienvenue dans ma dernière folie ^^ J'espère que le voyage en compagnie de Cléo, Léonie et Joy vous plaira. 

Cette histoire n'était pas du tout au programme, elle est née lors de l'écriture de ma Dark, cela a été mon échappatoire et c'est bien la première fois de ma vie que j'écris deux romans en même temps ^^

Mais finalement, je me suis attachée à cette bande de filles un peu folasse et un peu décallée. Il y aura donc 3 tomes, mais rassurez-vous chacun d'entre eux auront une fin, donc pas de frustration XD. Cellui-ci est complètement terminé pour le premier jet et les autres juste en projet pour le moment, puisque je suis sur l'écriture du deuxième spin-off de "A trois pas de ton coeur". J'ai un contrat d'édition et donc un dead line à tenir. 

Je vous souhaite un bon voyage en France !   

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