Nouvelle
Avis aux lecteurs : Cette nouvelle est une œuvre de fiction. Les évènements sont purement imaginaires, et toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait que pure coïncidence.
Tronald Dump mourut d’une crise cardiaque…
Si chacun d’entre vous n’ignore pas ce qu’est une crise cardiaque, je doute fort que vous sachiez qui en était la victime ; et si je n’avais pas été un sacré ficanas probablement je ne la connaîtrais pas moi-même également.
Vous raconter son enfance au sein d’une famille dégénérée : père alcoolique, mère alcoolo, oncles et tantes empégués du matin jusqu’au soir ; vous parler de ses études catastrophiques ; vous narrer son adolescence complexée, ce serait une perte de temps, doublée de ce commentaire que bien souvent j’ai lu écrit en rouge de la main de mes divers professeurs de Français : ‘’Hors sujet’’ ponctué d’un magnifique point d’exclamation (quand ils n’en mettaient pas deux !!)
Hors sujet, car l’intérêt de ce récit est la mort et l’après mort de Tronald Dump. Notez toutefois qu’il avait réussi à se faire élire président d’un tout petit pays, situé dans un tout petit sous-continent, lui-même sis dans un petit continent d’une petite planète tournant autour d’un minuscule soleil, le tout englobé dans une minuscule galaxie, située à des années-lumière de la nôtre.
Grâce à mon antenne para-cosmique, vous l’ignoriez peut-être, mais je peux, savoir tout ce qui se passe dans l’univers habité… (Eh oui, mortels du XXIème siècle, vous ne pouvez pas savoir les progrès que nous avons faits en mille ans ! Nous avons des fusées qui filent à Mach-lumière 20, c’est-à-dire à vingt fois la vitesse de la lumière ; de quoi faire retourner autant de fois Einstein dans sa tombe… Mais c’est hors sujet là aussi et c’est pour cela que j’ai placé cette digression entre parenthèses…)
Pour en revenir à Tronald Dump, il était devenu président de ce petit pays, qu’il dirigeait d’une main de fer, secondé par une pléthore de sbires de sicaires, de tueurs à gage, de mercenaires, de délateurs, de sycophantes ; bref, de personnes peu recommandables, êtres patibulaires qui donnaient plus envie de changer de trottoir si on les croisait, que de leur taper sur le dos et les inviter à boire un café dans le premier bistrot, chargés de faire respecter ses ordres et ses contre ordres, chargés de faire régner la terreur, surtout auprès de la population qui se divisait en deux races essentielles : la race crème, l’élite, et la race kaki, l’inférieure, celle dont ils pouvaient exterminer les individus en toute impunité, pour le simple plaisir de faire des cartons.
Ceci étant écrit, j’en viens aux faits. Tronald Dump est mort d’une crise cardiaque. Tout le pays a poussé un « ouf » de soulagement en s’écriant : « Qu’il aille au diable ! ... » « Qu’il rôtisse en enfer ! ... ». Quant à suivre son corbillard, même pas en rêve. Pensez donc ! Aller aux funérailles de ce tyran, de ce despote, de ce satrape, de ce dément de la gâchette, pas plus évolué qu’un enfant de trois ans. Et encore ! Wolfgang à cet âge composait déjà des musiquettes pour piano. Non, vraiment, personne ne voulait accompagner Tronald Dump dans sa dernière demeure. Plutôt se ruer sur sa dépouille pour lui cracher au visage, la frapper à coups de bâtons ou de barre de fer comme cela s’est déjà vu par chez nous. (Les kakis s’en seraient donné à cœur joie !). Mais Tronald Dump, ayant prévu ces débordements festifs contre sa personne… (Même trépassé, Tronald Dump restait Tronald Dump) avait stipulé dans son testament que tous les habitants du pays devaient, non seulement, se rendre à ses funérailles, mais également, pleurer à chaudes larmes. (Notre planète n’a pas été exempte de ce genre de deuils truqués, hélas !). Lorsque j’écris ‘’tous les habitants’’, je devrais préciser : tous les habitants de race crème ; et gare à qui voudrait se dérober. Les sicaires armés jusqu’aux dents, allaient frapper à toutes les portes et, celui qui refusait, recevait une volée de coups. Les kakis, eux, n’avaient qu’un droit : celui de rester enfermés chez eux, sous peine de recevoir quelques pruneaux dans le ventre, non pas ceux qui vous font filer aux toilettes, mais ceux qui vous font filer dans l’au-delà. Ainsi, ce jour-là, tous les habitants crème firent semblant de pleurer le grand Tronald Dump, qui n’avait de grand sinon sa taille (1 mètre 95) sa connerie et sa méchanceté. Et ce même jour 14 kakis furent tués pour le plaisir. Deux autres furent tués pour avoir eu l’outrecuidance de demander si la cérémonie s’était bien déroulée. L’un des tueurs, furieux d’avoir raté sa cible, en dégomma trois d’un coup. Ce qui monta à cinq le nombre de kakis tués post-funérailles et à dix-neuf le nombre total de la journée.
Un an jour pour jour après la mort de TTD…
Permettez-moi, chers lecteurs de faire une nouvelle digression à propos de ces trois lettres. Les deux premières, désignant son prénom : Tronald, Tronald, la dernière son nom de famille : Dump. (Nous en avons connus nous aussi de ces diminutifs : JJSS ; JFK et j’en passe…) Pourquoi le même prénom, direz-vous… (Vous noterez que cette déviation narrative n’est pas si hors sujet que ça !). Parce que ses parents, tout stupidement, s’étaient caché l’un l’autre le prénom qu’ils souhaitaient donner à leur enfant. Chacun l’avait écrit sur un petit morceau de papier qu’il avait plié en huit, et qu’il avait soigneusement caché là ou l’autre n’aurait pu le trouver. Et lorsque le nouveau-né a poussé son premier vagissement, et que l’officier d’état civil leur a demandé le prénom dont ils comptaient affubler leur peu ragoûtant rejeton, ils ont soigneusement déplié leur morceau de papier et le leur ont tendu. Celui-ci a haussé les paupières, lu et relu chacun des billets, puis s’est tourné vers eux et leur a dit d’un ton ironique :
« Vous n’allez tout de même pas lui donner ces deux prénoms ! Ca ne s’est jamais fait ! »
Les parents, tous yeux écarquillés, se sont d’abord regardés, puis les ont tournés vers l’officier et d’une voix tombée des nues et remplies de points d’interrogation, lui ont demandé ce qui n’allait pas dans ces deux prénoms, qu’ils avaient pris soin de chercher (chacun de son côté) dans le martyrologue.
« Tout va très bien, leur a-t-il répondu. Mon grand-père portait le même, mon voisin de palier également et l’un de mes collègues, celui qui passe son temps à se gaver de sucreries en regardant des séries télévisées à deux balles, aussi.
— Alors, où est le problème ?
— Il est là, leur a-t-il répondu en leur restituant les morceaux de papier. Vous ne pouvez pas donner deux fois le même prénom. »
Les deux parents ont relu les prénoms qu’ils avaient écrit, ils se sont même échangé les billets (l’officier s’était trompé de destinataire) et, comme ils étaient déjà pas mal chargés d’alcool, ils ont commencé à se faire des reproches mutuels, l’un prétendant que l’autre l’avait copié ; l’autre, affirmant la même chose, et les insultes et les coups ont commencé à pleuvoir car aucun des deux ne voulait renoncer au prénom qu’il avait choisi. Ils firent tellement d’esclandre que le pauvre officier – fait rare – accepta de les satisfaire et enregistra sur le livret de famille : Tronald, Tronald Dump, né le X à Y.
Je reviens à l’histoire qui nous occupe…
Un an après le décès de TTD, les nouveaux élus (qui étaient de son même bord) durent faire appel à un medium car, dans son testament, le défunt satrape avait également stipulé qu’à chaque anniversaire de sa disparition, on devait rentrer en contact avec son esprit, afin de recevoir les consignes de gouvernance pour l’année à venir. (Les dictateurs passent mais le pouvoir reste !). Cela devait se faire sous la vigilance de ses sbires, dont j’ai l’honneur de vous présenter, les quinze les plus ignobles, les plus infâmes, les plus dégueulasses, les plus sordides. Trois fois cinq individus dont rien que les prénoms (pourtant des plus banals dans ce petit pays) effrayaient les crèmes et les kakis (plus ces derniers que ces premiers, toutefois) et, qu’aucun parent n’osait donner à ses enfants.
Humphrey, leur chef 129 kilos à la balance. Bill, son bras droit, 128,5 kilos à la balance. Tom, son bras gauche, 128 kilos à la balance. Peter, bras droit de Bill, 127,9 kilos à la balance. Chuck, bras gauche de Bill, 127,5 kilos à la balance. John, bras droit de Tom, 127,3 kilos à la balance. Smitty, bras gauche de Tom, 127 kilos à la balance. Duck, bras droit de Peter, 126,8 kilos à la balance. Mac, bras gauche de Peter, 126,5 kilos à la balance. Joey, bras droit de Chuck, 126,3 kilos à la balance. Fred, bras gauche de Chuck, 126 kilos à la balance. Bob, bras droit de John, 125,8 kilos à la balance. Dick, bras gauche de John, 125,3 kilos à la balance. Grump, bras droit de Smitty, 125 kilos à la balance et enfin, Jeremiah, bras gauche de Smitty, 124,99 kilos à la balance. Ils avaient plein de traits communs dont les plus frappants étaient leurs yeux injectés de sang, leurs lèvres lippues, leur double menton, et leur ventre proéminent rempli de mauvaise barbaque et de bibine. Ils avaient un point commun : ils dégainaient plus vite qu’ils ne décapsulaient leur canette. Leur degré d’instruction atteignait des profondeurs abyssales et, quand on leur parlait de culture, ils ne comprenaient de ce mot que les trois premières lettres.
Donc, on appela le medium qui fit installer les élus autour d’une table, les mains bien à plat et les doigts auriculaires se frôlant à peine. Lorsque tout le monde fut prêt, il demanda :
« Esprit de Tronald Dump es-tu là ? »
Et Tronald répondit d’une voix caverneuse :
« Oui. »
L’un des sbires (parce qu’ils étaient restés debout autour de la table, fusil prêt à tirer sur le premier qui eût voulu s’en aller), lui demanda :
« Comment allez-vous Tronald ?
— Qui es-tu ?
— Smitty, le bras gauche de Tom.
— Ah, très bien. Que voulais-tu me demander ?
— Comment allez-vous. Comment ça se passe là-haut pour vous, Tronald.
— C’est affreux ce que je souffre, répondit-il d’un ton plaintif. C’est une torture perpétuelle. Tous les jours c’est le même rituel : on me balance dans un chaudron d’eau bouillante, puis on me coupe les parties génitales avec des petits ciseaux, ensuite on me coupe les mains et la tête, pendant qu’un autre m’enfonce dans l’anus une pointe chauffée à rouge. Et à peine c’est fini, ça recommence une minute après.
Les sbires étaient atterrés d’entendre de pareilles horreurs. Du vivant de TTD, celui qui se fût hasardé ne serait-ce qu’à souhaiter le centième de ces sévices, était fusillé sans sommation. Et voilà que dans l’au-delà, on se permettait toutes ces atrocités.
« Qui sont-ils donc ceux qui osent vous faire cela ?
— Qui es-tu ? Demanda l’esprit du trépassé.
— Bill, le bras droit de Humphrey.
— Très bien. Que voulais-tu me demander ? »
Et il répéta mot pour mot la question.
« Vous ne le croirez jamais : ce sont les kakis. »
A ces mots, les sbires se regardèrent et Humphrey dit :
« Nous allons tous les tuer !
— Non ! Implora l’esprit de Tronald Dump. Au contraire. Ils exigent que tous leurs frères morts aient une sépulture décente.
— Sépulture décente ? S’écria Grump. Mais c’est impossible. Vous savez bien qu’une fois que nous les avons tués, nous laissons leurs cadavres afin d’en régaler vautours et coyotes.
— C’est affreux s’écria le trépassé. Dans ce cas mes supplices ne s’arrêteront jamais. »
Or, les sicaires, Humphrey en tête, eurent un doute : était-ce bien l’esprit de Tronald Dump ? N’était-ce pas plutôt celui d’un kaki qui se ferait passer pour lui ? Ils interrogèrent (ou plutôt passèrent à la question) le medium qui leur jura que c’était bien l’esprit de leur boss qui avait parlé… Ce furent ses dernières paroles !
Permettez-moi, chers lecteurs, de prendre une nouvelle tangente. La question que l’on faisait subir aux condamnés de cet âge que nous appelons Moyen, c’était de la bagatelle comparée à celle à laquelle fut soumis le pauvre disciple d’Allan Kardec qui était à deux jours de fêter ses 28 ans, auprès de ses parents et sa jolie Cynthia.
Retour à l’histoire…
Que faire pour vérifier si ce qu’ils avaient entendu était la vérité ou une simple cagade ? Si c’étaient bien les lamentations de Tronald, ou les mensonges d’un kaki, voulant leur faire peur ? Ils se réunirent et en arrivèrent à la suivante conclusion : l’un d’entre eux serait sacrifié et serait interrogé par un medium. Ils furent tous d’accord sur cette idée de génie, mais ils eurent beaucoup de mal à choisir lequel devait se faire dégommer pour aller voir là-haut si Tronald y était. La courte paille ne leur allait pas du tout, les dés non plus ‘’Am-stram-gram’’ encore moins, couteau, ciseaux papier, rocher, rejeté d’office. Alors Humphrey eut une meilleure idée. Il pointa son fusil et tira. Bill, son bras droit fut tué :
« Pourquoi Bill ? Demanda Tom, son bras gauche, ainsi que les douze autres.
— Parce que Bill était un sac à hamburgers. Les médecins tôt ou tard, l’auraient condamné et sa santé se serait dégradée en peu de temps. J’ai voulu lui éviter ce spectacle. Autant qu’il mourût en pleine forme. »
Tous les sbires approuvèrent et il eut droit à de fastueuses funérailles. Smitty, Fred Peter et Duck, suggérèrent qua sa mort fût mise sur le compte d’un kaki, afin de faire un carton, mais Humphrey les en dissuada :
« Tant que nous n’aurons pas la confirmation ou l’infirmation de ce que nous avons entendu, restons prudents. D’accord les gars ?
— D’accord, répondirent en chœur les quatorze autres. »
Et la mort de Bill, fut attribuée à une négligence de sa part. Une semaine après ils firent appel aux élus ainsi qu’à un autre medium qui s’assirent à la table, les mains bien à plats et les doigts auriculaires se touchant ; et le spirite appela les deux esprits : celui de Tronald Dump et celui de Bill. Et tous deux racontèrent les mêmes supplices barbares. Mais cette fois encore, les collègues de Humphrey eurent des doutes… (Je vous rassure, ils ne passèrent pas à la question ce second medium…) et après s’être concertés de nouveau, ils en arrivèrent à la conclusion qu’il fallait sacrifier un second d’entre eux et, afin de ne pas recommencer les discussions et les palabres pour savoir qui, le sbire en chef tira sur Tom et le tua.
« Pourquoi Tom ? Demanda John, son bras droit, et les onze autres.
— Il buvait comme un trou. Toujours soul. Un jour il aurait eu un cancer du foie. Alors j’ai voulu lui éviter une telle souffrance. »
Tout le monde fut d’accord, même s’ils buvaient tous comme des trous et qu’ils eussent fini, eux aussi, par avoir un cancer du foie. Et, encore une fois, cette mort fut attribuée à une négligence de sa part. (Les kakis depuis quelques temps, n’avaient plus eu de victimes dans leurs rangs. Ils commençaient à souffler…). Une semaine plus tard, le medium entouré des élus, interrogea les trois esprits qui, tous, leur racontèrent les atroces souffrances. Mais de nouveau, les survivants des sbires, Humphrey en tête, se demandèrent si ce n’était pas la même comédie jouée par les esprits des kakis. Et vlan ! Peter fut sacrifié, puis ce fut le tour de Chuck, de John, de Smitty, de Duck, de Mac, de Joey, de Fred, de Bob, de Dick de Grump et de Jeremiah. Tous y passèrent, et tous confirmèrent les atroces supplices. Désormais, Humphrey était le seul survivant des sicaires, et vous savez comment c’est n’est-ce pas ? Tant qu’ils étaient ensemble, ils étaient craints aussi bien du vivant de Tronald qu’après sa mort. Tout le monde sait que l’union fait la force, surtout si celle-ci est armée de fusils à canon scié et de revolver six coups. Or, une fois tout seul, la force était du côté des kakis et des crèmes qui avaient toujours détesté le despote et ses tueurs à gage. Alors, tout le pays s’arma. (Ceci ne posa pas de problème puisque le dictateur avait toujours préconisé la liberté de port d’armes). Donc, tous s’armèrent, entourèrent Humphrey et vidèrent leurs chargeurs sur lui. Puis son cadavre, loin d’avoir une belle sépulture, fut laissé en pâture aux vautours et aux coyotes. Et, dans l’au-delà, les kakis se frottèrent les mains :
« Chic, encore un nouveau client ! »
FIN le 13/05/2018 île Sainte Marguerite
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