I Love Paris
J’entends les gens crier autour de moi, et je vois des formes colorées partir dans tous les sens… Je comprends que ce sont les touristes et passants qui s’enfuient tandis que je tente de me redresser, avant de tomber du pied dans lequel j’étais encastré pour m’écraser au sol une dizaine de mètres en contre-bas. Ça fait mal… Ils ne pourraient pas recouvrir le sol de moquette ?
Ma vue se précise à mesure que je retrouve mes esprits, et je lève les yeux au ciel en me concentrant. Je La vois qui fonce vers moi, ailes déployées et faux prête à l’emploi. Je n’ai que le temps de m’envoler que la lame dessine un sillon profond dans le bitume. Dans la seconde, une vive énergie s’en dégage, et le sillon se change en fossé long de plusieurs dizaines de mètres et de la largeur d’un camion.
— Mais tu es malade ! Tu vas blesser des innocents !
Elle a toujours les larmes aux yeux et la rage au ventre quand Elle me répond.
— C’est de TA faute ! C’est TOI qui a initié tout ça !
Je suspends mon vol et la dévisage avec étonnement.
— Quoi, fallait pas T’énerver ? Ce n’est pas un comportement de bébé capricieux, ça ?
Mais quand est-ce que j’apprendrais à fermer ma gueule, moi ? je le sais, pourtant, qu’on ne contredit pas une femme en colère… Mais que voulez-vous, je suis comme ça, j’aime les sports extrêmes… Elle décolle à pleine vitesse et me frappe, fendant définitivement les boucliers en deux alors que la puissance du choc fait vibrer l’air au point de plier la Tour Eiffel en deux puis s’effondrer sur elle-même, et là, je hurle.
— Il y avait des gens dedans sale connasse !
Son sourire sadique en dit long sur la culpabilité qu’elle éprouve.
— Et alors ? ils seront bien chez moi… Plus de souffrance, plus de peine…
— Plus d’amour, plus de joie ! Tu ne sais rien de ce qui fait la vie des humains ! nos souffrances nous rendent plus fort. Nos moments intenses dans leurs globalités, bons comme mauvais !
Je La charge en m’enflammant et La frappe de mon poing et de toutes mes forces, L’envoyant s’écraser sur le béton dans un long sillon de béton enfoncé et déchiré, alors que j’entends s’approcher les sirènes des forces de l’ordre. Les premiers véhicules s’arrêtent en dérapant, et leurs passagers sortent stupéfaits de voir un ange dans les cieux et un autre à terre, mais personne n’entreprend rien. Jusqu’à ce que l’un deux se réveille, nous braque et nous ordonne de ne plus bouger. A ce moment-là, ils reviennent tous à eux, policiers, gendarmes, militaires en Opération Sentinelle… Ça fait beaucoup de flingues…
La bouche en sang, Elle relève la tête.
— Trop de parasites insignifiants… Élimines-les, Azraël, je te l’ordonne !
Il se passe quelque chose en moi. Je perds pied, mon esprit s’enfonce en moi, je ne commande plus à mon propre corps tandis que celui-ci s’embrase de longues flammes noires et que cette même couleur s’insinue dans les plumes de mes ailes. Je crie, je me débats, mais rien y fait… Je suis prisonnier de moi-même, et mon esprit s’affaiblit à mesure que ma volonté flanche…
Ma tête regarde les hommes et femmes en armes attroupés autour de nous, mon bras droit se tend et ma main s’ouvre, avant de se refermer sur de longues flammes qui forment la faux de Pestilence, et je m’élance. Je me hurle à moi-même d’arrêter, je supplie, je prie, je pleure, je me roule en boule dans ma propre tête… Mes enfants, je suis désolé… Papa a échoué…
Non ! Plutôt crever que de décevoir mes enfants ! Je me redresse et hurle ma rage, avant de me jeter en avant vers l’écran qui me sert d’yeux pour le frapper de toutes mes forces.
Je vois la charge s’arrêter et je continue. Je veux reprendre le contrôle de mon corps. Je vois aussi le sourire de la Mort se muer en stupeur.
— Comment oses-tu te débattre ?
J’ai beau me dire qu’elle ne m’entendra pas, je crie.
— Vas Te faire foutre ! Mon corps, ma vie, mon libre arbitre et mes décisions !
Surprise, mes lèvres ont bougé, et je contrôle mes doigts. Je les desserre lentement et lâche la faux, et ma détermination me rend petit à petit le contrôle de mon être alors que je lutte pied à pied contre Son autorité sur les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse dont j’ai absorbé l’essence. Elle semble terrifiée.
— Mais comment fais-tu ?
Je repose lentement les pieds par terre et Lui souris avec compassion.
— J’ai quatre bonnes raisons de ne pas perdre. Une épouse extraordinaire et trois merveilleux enfants.
Elle affiche un sourire amplie de haine et de rage non dissimulées.
— Très bien, alors je sais ce qu’il me reste à faire !
Elle prend son envol, et avant même que la peur se soit emparée de moi j’ai attrapé Son pied pour La jeter au sol dans un profond cratère !
— Restes-là, vipère ! Espèce de dragon !
Du fond du trou s’élève une voix rauque.
— Dragon, dis-tu ? Soit, je serais ce dragon !
Putain, faut vraiment que j’apprenne à fermer ma gueule…
Le béton se craquelle puis se fend avant de s’écarter. Quelques personnes sont jetées au sol par le tremblement, mais la majorité s’écarte à temps pour laisser sortir une créature monstrueuse, recouverte d’écailles noirs comme le plus profond des désespoirs, aux yeux reptiliens jaunes et à la langue fourchue. Pourquoi je ne l’ai pas comparé à une inoffensive musaraigne, moi ?
— Alors, mon chéri… Je te plais comme ça ? Je me suis faite belle exprès pour toi !
Les gens en armes ouvrent le feu, et franchement, je les comprends, mais ça ne semble pas la déranger, puisqu’Elle inspire un grand coup et balaie les environs de son souffle enflammé. C’est à peine si j’ai le temps de m’interposer et de suivre le jet avec ce qu’il reste de la balance de la Disette.
— Fuyez !
Ils sont intelligents, ils obéissent du premier coup… Les pieds dans le goudron fondu, je ne décolère pas.
— OK, alors on va se la jouer film épique de cape et d’épée !
Je m’embrase, et mes flammes, comme les plumes de mes ailes, retrouvent leur couleur d’origine tandis que je m’élance sur Elle, l’épée de Guerre prête à frapper.
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