A première vue, c'est un être particulièrement attentif, prévenant et délicat. Il fait attention à chaque pas que nous faisons, esquisse toujours un geste pour nous rattraper lorsqu'il nous sent vaciller. Ses sourcils sont si souvent froncés qu'il est étrange de le voir pleinement détendu. Il est si présent, toujours prêt à se placer devant nous s'il le faut. Il est grand, et il essaye bien souvent de nous envelopper de son étreinte cotonneuse. Sa voix ressemble à s'y méprendre aux murmures du vent, et puis ce petit souffle s'enroule autour de nous, léger et caressant. Cependant, et s'il est agréable d'avoir cet être si précautionneux, il devient omniprésent. Il est là, toujours devant notre regard, toujours dans notre vision périphérique, les yeux rivés sur nous et ses sourcils froncés d'une inquiétude parfois déplacée. Il devient un voile, un grand voilage qui rend flou tout ce qui a le malheur de se trouver autour. Il est ubiquiste, et c'est ce qu'il cherche, être présent à chaque fois que notre regard se pose ailleurs que sur lui pour ainsi rendre le reste vague, inintéressant, fade. Et sa voix, ce souffle caressant devient le vent que le voilage laisse passer lors d'un temps agréable. Il voile le monde, il voile notre monde pour que l'on ne voit plus que lui et ses yeux inquiets de tout, inquiets de nous, pour nous, à cause de nous. Il nous caresse de ce petit filet de voix comme la flûte charme le serpent dans les contes. Il est difficile de comprendre pourquoi cet être se fait voilage sur le monde. Cherche-t-il à être le centre d'au moins un monde ? Ne cherche-t-il qu'à manipuler ? Comprend-t-il ce qu'il fait ? Il est impossible de le savoir tant l'inquiétude de ses yeux forme un bouclier sur tout le reste. Restez sur vos gardes si d'aventure un être-voilage vient à flouter votre monde, n'oubliez pas qu'il ne se limite pas qu'à un seul être.