Une autre femme
Lorsque je partirai d’ici, je serai une autre femme.
La femme que je suis devenue n’a plus rien à voir avec celle que vous avez connue.
Ici, le temps s’écoule, lentement ; il n'y a rien à faire, chaque seconde ressemble à la précédente.
Le sommeil m’a désertée. Noctambule, je rôde et déambule dans les corridors nocturnes de mes sombres pensées.
J’ai oublié les douces musiques du silence. Là où je vis — mais s’agit-il de vivre, finalement ? — tout n’est que bruits incessants, cris et résonances. Sans voir, je devine les sons de ce brouhaha assourdissant.
J’ai perdu le goût de la nourriture, le plaisir de me délecter des odeurs et des saveurs. Confrontée à la mélasse quotidienne, mon palais, si fin naguère, a fini par abdiquer.
Je n’ai plus le sens de l’espace, du grand espace. La ligne d’horizon appartient désormais à un lointain souvenir.
Tout m’apparaît gris et froid, même la lumière du jour semble avoir irrémédiablement renoncé à s’infiltrer dans ma chambre sans âme.
Lorsque je sortirai d’ici, je serai une autre femme ; la prison m’aura détruite.
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