Chapitre 30G : janvier - février 1782

3 minutes de lecture

Je pleurais doucement dans mon lit ce premier janvier, car mon petit Émile ne fêterait pas son anniversaire cette année, ni plus jamais. C'est ainsi que je me rappelais du jour de sa naissance et je riais toute seule.

Il était né sans aucune autre aide que mes mains, un peu pressé puisque je l'attendais pour le mois de février, mais tout de même en excellente santé.

A onze heures et demie du matin, un dimanche, je m’apprêtais à ramasser le morceau de pain qu'André venait de jeter par terre pendant son repas, lorsque Léon – Paul arriva en sanglotant, en se tortillant de douleur, criant qu'il avait trop mal.

Intriguée par une telle arrivée et inquiète pour mon fils aîné, je libérais André de sa chaise pour m'occuper de son frère. Celui-ci, qui maîtrisait désormais le quatre pattes comme un chef, se sauva la bouche encore toute maculée de yaourt.

J'allongeais Léon – Paul qui ne pouvait pas rester en place, en me demandant bien ce qu'il lui arrivait. Je tentais de le raisonner.

— ‘’ Écoutez-moi. Dites où vous avez mal.

—''Sniff… Sniff… C'est Pierre… Oh maman c'est atroce…

—''Mais que vous a-t-il fait ?

—''Il m'a donné… Sniff… Un coup de pied…

—''Mais où enfin ?

—'' Mais là… Ici… Me pointa t-il dans ses sanglots son intimité.

—''Oh… Allongez-vous, je vous apporte une tisane.

Je lui préparais une tisane pour calmer sa douleur, en surveillant d’un œil André qui avait pris l'habitude de se cacher dans de petits coins pour faire ses bêtises, notamment sous la table du salon où je l'avais surpris un jour dévorant les biscuits pourtant proscrits.

Léon–Paul, une fois sa douleur passée, m'expliqua le soir venu les raisons de ce coup de pied mal placé. C'était encore une fois le fils d'Anne qui, agacé que mon fils qu'il avait insulté l'ai tapé, aurait décidé d'en venir aux pieds. Mon mari soupira simplement lorsque je lui exposais la situation, le soir venu.

André répondait désormais à son prénom, aussi quand je l'appelais depuis la cuisine pour telle ou telle chose, il arrivait d'un quatre pattes décidé. Souvent, il savait que je lui donnerais un morceau de pain, ou un carré de sucre, alors il s'asseyait à mes pieds et patiemment, attendait.

Une fois, il se leva en s'accrochant durement à ma robe, et tira mon vêtement pour attirer mon attention, j'avais été heureusement surprise, il avait reçu un baiser, et un morceau de pain.

Alors, satisfait et tout heureux, il repartit en galopant, son collier de baptême qui tintinnabulait au rythme de ses pas, son linge défait qui traînait par terre en attrapant la poussière, laissant entrevoir ses langes blancs un peu tâchés, accrochés grâce à deux épingles usées à ses petites fesses de bébé.

Pour Gustavine, ses quatorze ans signifiaient l'arrêt de ses études, une déception pour elle qui ne pourrait jamais vraiment être sûre de les reprendre un jour, mais une étape franchie avant sa probable formation de sage–femme à Paris, vers ses dix–sept ou dix–huit ans, qui durerait normalement trois mois.

Michel aurait fêté ses dix ans ce mois–ci, mais il n'était plus là et je devais arrêter de me morfondre, car cela me faisait trop de mal.

Souvent nous discutions le soir avec mon mari, en écoutant le feu de cheminée crépiter.

—''Vous vous rendez compte Léon, dans moins d'un an, nous serons mariés depuis dix ans. C'est fou comme le temps passe vite… D'ailleurs qu'avez-vous prévu pour le premier anniversaire d'André ? Je pensais lui donner la première robe d’Émile, un beau gâteau aux fruits et éventuellement une bougie pour mettre dessus.

—''C'est une bonne idée… je n'en avais pas alors c'est bien d'avoir trouvé.

— ‘’ Ça ne va pas ? Vous m'avez l'air absent.

Mon mari ne répondit rien, seulement, il essuya ses lunettes passivement, devant ma figure déconfite.

—''Non ? C'est juste une impression alors. Je me débrouillerais pour l'anniversaire, reposez – vous.

Je fis donc comme je l'avais dit, pour le dernier anniversaire où nous serions tous les six réunis, avant que Léon–Paul ne parte, vers le mois de juin.

André faisait la tête ce jour-là, et c'est moi qui lui souffla sa première bougie, avant que la cire blanche ne fonde sur le gâteau. Je lui enfilais devant toute l'assemblée sa nouvelle robe, il s'accrocha à la mienne en faisant son timide qui suçotait ses doigts, désormais, il n'y avait plus qu'a attendre qu'il ne marche pour pouvoir le sortir du berceau, qui devenait progressivement trop petit pour lui et dangereux aussi, puisqu'il avait tendance à beaucoup bouger et à vouloir se lever dedans, ce qui m'occasionna plusieurs fois des sueurs froides.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire Lanam ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0