Gustavine, aussitôt après le départ de Léna, couru chercher les enfants, pour leur faire part de notre incroyable découverte. Tous accouraient. Léon–Paul boitant, Malou sautillant, Émile trottinant et Michel tâtant le mur, on l'avait aidé à monter l'échelle, cela avait été plutôt compliqué. Je pensais que Léna était partie et ne reviendrait pas, mais lorsque je retirais et remettait la boite dans la trappe, elle revenait, et refaisait les mêmes gestes, disait les mêmes mots, c'était les mêmes paroles qui passaient au fond et Léna partait toujours au moment où une vieille femme s'apprêtait à l'aider à faire son dessin, je ne sais ce qu'elle faisait ensuite, et cela me perturbait grandement. Les enfants étaient fous, de joie, d'abord, d'avoir assisté à cette représentation de Léna, qui je le répète, avait l'âge d’Émile, puis ils eurent peur, qu'elle sorte de la boite avec son tablier violet et ses cheveux beaucoup trop courts pour une petite fille.

Aussitôt qu'elle fut repartie, Malou m'aidait à redescendre les boites, pour les cacher dans ma chambre, Léon ne devait pas voir cela, ce serait notre secret a tous les six. Le soir, je retirais de nouveau la boite pour la remettre, il me fallait revoir Léna, encore et encore, j'aurais tant voulu savoir pourquoi elle partait subitement dès que la vieille dame arrivait près d'elle…

Le lendemain, alors que Gustavine était à l'école et que les enfants jouaient dehors, je fouillais de nouveau le grenier, à la recherche de nouvelles boites, pour espérer voir Léna revenir, mais je ne trouvais rien. Chaque soir, je repassais la boite, observant chaque détail, me demandant si souvent pourquoi les deux femmes portaient un pantalon et pourquoi Léna avait les cheveux si courts, ce n'était pas un garçon, mais bien une petite fille, quelle était cette coiffure et ses vêtements inappropriés ?

Tout se passait bien, Léon n'avait rien su, grâce à la complicité de mes enfants. J'étais contente, mais quelque peu frustrée de ne rien savoir de cette petite fille, tout juste son prénom, si doux, si agréable à l'oreille. Malheureusement, j'avais oublié en rangeant la boite dans ma chambre que Léon passait me voir parfois, et la première fois depuis ma découverte où il passait, je regardais justement la petite fille qui dessinait. Il me surprenait en frappant à la porte, tant et si bien que je courais vers la boite posée sur le meuble et la renversait, dans un fracas assourdissant.

—''Que faisiez - vous Louise ? Me dit -il en ouvrant la porte et en s'approchant d'un pas assuré.

—''Rien, rien du tout, je rangeais mes affaires, la malle est tombée, mais ce n'est pas grave.

—''Bon, je vous avais prévenu que je passerais ce soir. Vous n'êtes pas prise ?

Je soupirais, et m'adressa à mon mari en passant lentement ma main sur le lit, et en fixant le sol.

—''Je vous l'ai déjà dit Léon, je ne veux pas de ce troisième enfant. Émile a trois ans, c'est trop tard désormais.

Il ne m'écoutait pas, il se fichait de ce que j'avais à dire, et m'ordonna de m'allonger sur le lit. D'abord prête à m'exécuter, je pensais rapidement aux conséquences pour moi de l'arrivée d'un nouvel enfant, parce qu'il suffisait d'une fois, la grossesse harassante, l'accouchement douloureux, puis les langes immondes à laver, les cris en pleine nuit, les fièvres dû aux poussées dentaires qui avaient emporté mon petit garçon, aussi je revenais subitement à mes esprits, en lui disant fermement :

—''Sortez de ma chambre Léon. Je suis fatiguée.

Alors que j'attendais les coups, il ne me fit rien, seulement il se releva et quitta la pièce en donnant un grand coup de pied dans la boite déjà détruite, je pleurais alors. Dans la boite cassée, c'était Léna qui n'existait plus.