Chapitre 22B: juillet - août 1773
Je me souviens bien, c'était sept jours après la naissance de Léon - Paul, complètement remise de l'accouchement pourtant douloureux, j'allais présenter son neveu à ma sœur. Mon époux m'accompagnait avec ses filles sautillantes et guillerettes, que je ne tardais pas à assagir.
—''Caroline, Gustavine, écoutez-moi. Ma sœur est gravement malade, vous resterez sur le seuil de la porte. Je vous demanderais aussi de rester humble et sage, elle a besoin de repos et de calme.
Aussitôt arrivés dans la maison, Malou me sautait dans les bras en me racontant les rares événements de sa journée, et Michel en entendant ma voix courait en ma direction, tous deux contents d'avoir de la visite dans cette ambiance grave et glauque. Auguste fils quant à lui restait le plus souvent avec son père, qui lui apprenait malgré ses quatre ans l'économie et les chiffres.
Laissant ensuite Malou et Michel, je m'approchais de Camille en tenant mon nouveau – né dans mes bras.
—''Camille...
Ma sœur ouvrit les yeux avec peine et considéra mon fils en souriant. Elle ne disait rien mais je savais qu'elle était heureuse. Léon - Paul, que je tenais par les épaules, gigotait en agitant ses pieds dans son linge.
—''Il s'appelle Léon - Paul. Il est né la semaine dernière, le seize juillet. France est la marraine. Vous imaginez, je suis maman !
Elle m’accorda un grand sourire avant de se remettre à tousser. Si fort que mon mari intervint.
—''C'est bon elle l'a vu, ne le rendez pas malade. Sortez mon fils de cette chambre à présent.
—''C'est aussi mon fils, elle a le droit de le voir, c'est ma sœur.
—''Sortez Léon - Paul de cette pièce immédiatement !
—''Laissez - moi ! Vous ne comprenez pas ? Elle est malade, elle va mourir !
Le visage de Camille s'assombrissait d'un seul coup et une larme perlait sur sa joue. Elle était terrorisée par la mort. J'embrassais sa joue en serrant mon nouveau - né contre nous.
—''Je suis désolée Camille, vous allez guérir je vous le promets... Je n'ai pas pesé mes mots, encore pardon...
Je restais un temps à pleurer dans son cou, avant de la laisser, le cœur déchiré.
France venait souvent me voir pour prendre des nouvelles de Léon - Paul, me donner des conseils précieux, m'aider à m'occuper de lui, aussi elle s'étonnait de voir qu'il n'était plus dans ses bandelettes. Je lui expliquais que je trouvais cela méchant de forcer l'enfant a cette immobilité parfaite, et comme c'était mon enfant, j'assumais. Ma cousine s'ennuyait chez elle, seule avec son fils, elle me confiait avait besoin de nouveau de cajoler un bébé. Elle regardait pensive Léon - Paul, qui gigotait nu et rose sur le lit, tout en lui caressant les cheveux elle me disait.
—''Les bébés me manquent, j'aimerais tant en avoir un autre...
—''Demandez donc à Joseph, peut - être acceptera-t-il ?
—''Il dit que je suis trop vieille à présent et qu'il est trop tard.
Nous assistâmes au mariage d’Adélaïde, à la fin du mois de juillet. Elle était la sœur cadette d'Auguste et elle avait la chance d'épouser un homme qu'elle aimait, très tardivement cependant, trop sans doute, puisqu'elle avait déjà près de trente ans. Assise avec mon fils près de femmes que je ne connaissais que de vue, je me trouvais bien mal à l'aise. Les trois enfants de Camille étaient installés devant tandis que leur père était avec les hommes de l'autre côté. La mère d'Auguste et d’Adélaïde venait s'asseoir près de moi.
—''Bonjour, je vous ai déjà vu mais je ne me rappelle plus où...
—''En effet, je suis Louise, la sœur de l'épouse d'Auguste.
—''Je suis désolée pour votre sœur, j'ai appris quel mal la rongeait.
S'en suivit un long silence confus, puis elle sourit en regardant mon fils.
—''Je peux ? Tendait – elle les bras vers lui
Je lui donnais mon nouveau - né et elle le prenait tendrement contre elle.
—''Est - ce un garçon ou une fille ?
—''Un garçon. Il s'appelle Léon – Paul, il a vingt - trois jours.
—''Saviez-vous qu'un de mes cousins s'appelait aussi Léon - Paul ? C'est une belle coïncidence ! Connaissez-vous l'histoire de Léon – Paul, bla, bla, bla
Mon fils commençait à s'agiter, il voulait le sein de sa nourrice. Et puis j'en avais marre de rester assise là à écouter la belle - mère que ma sœur détestait, alors je récupérais mon nouveau - né, et me levait.
—''Je suis désolée, je dois vous laisser, au revoir !
Elle me regarda d'un air surpris, je la coupais dans ses belles paroles.
J'allais ensuite me mettre au dernier rang, pour ne pas qu'elle ne me voit et attendais la fin de la cérémonie sans grand intérêt. à la sortie, j’apercevais la famille Meursault, mais eux rentrèrent sans prêter attention à moi. Il faisait chaud, Léon -Paul avait faim et pleurait, malgré mon petit doigt pour le calmer, et j’attendais bêtement assise sur le parvis que mon mari vienne me chercher. Les minutes passaient lentement, et je n'avais aucun moyen de le joindre, si seulement quelqu'un d'intelligent pouvait inventer un système pour parler à distance et recevoir une réponse instantanée... chaque voiture qui se garait était pour moi un espoir, mais à chaque fois ce n'était pas lui. M’aurait-il oublié ? Comment ferais-je s'il ne venait pas ?
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