Révélations

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Le vendredi d’avant la Brèche, Marianne avait passé plus d’une heure seule sur son lit, un carnet à la main, en proie à un dilemme. Elle était partagée entre son instinct de protection maternel et sa conscience. L’un la poussait à lire le journal intime de Sophia et l’autre la faisait culpabiliser pour n’avoir ne serait-ce qu’envisagé d’en arriver là.

Le dimanche qui suivit lui fit l’effet de l’ouverture de la boîte de Pandore. Alors que le reste du monde tremblait à l’idée de voir tous ses secrets révélés, elle éprouvait un soulagement inconcevable à la perspective de découvrir ceux de Sophia sans avoir à se reprocher de violer son jardin secret. Puisque ses secrets étaient désormais à la portée de tous, elle se devait de s’assurer qu’ils ne risquaient pas de porter préjudice à sa fille chérie.

Quoi qu’elle trouve, elle les épaulerait et les aiderait à se sortir de tous types de mauvais pas, addictions, et autres relations toxiques.

En allant sur le site privacide.info, où toutes les informations récoltées par le géant GAFAM sur chaque personne de la planète étaient disponibles suite à un acte qualifié de terroriste par le PDG de l’entreprise, elle pensa en profiter pour vérifier ses doutes au sujet de sa partenaire. Après tout, le site serait probablement bientôt fermé, il était déjà impensable qu’une faille de cette envergure ait pu s’ouvrir sous le nez de la multinationale. Elle repensa à tous les moments ou elle était rentrée tard, prétextant une obligation professionnelle, à toutes les fois où elle était arrivée en retard à des évènements… Elle se reconcentra sur Sophia, la priorité était de les protéger des autres et d’elle-même, ainsi elle commença par chercher le nom de sa fille.

La décence la poussa à ignorer son historique de vidéos, elle n’avait pas besoin de connaître les détails de la sexualité de sa fille, si ce n’est peut-être son orientation, ce qui serait probablement visible à travers les messages reçus et envoyés. Ses emails étaient brillamment bien écrits, adressés pour la plupart à ses professeurs. Bien qu’elle suivît ouvertement sa fille sur tous les réseaux sociaux qu’elle connaissait, elle jeta tout de même un coup d’œil au cas où un compte secret créé pour l’éviter lui aurait échappé. Son cœur se serra en découvrant un compte Instagram révélant que sa précieuse petite princesse buvait et fumait toutes sortes de substances pendant les soirées « révisions » avec ses amis. Elle s’était attendue à trouver des transgressions, elle se souvenait de sa jeunesse, mais elle espérait que son éducation pousserait Sophia à repousser les psychotropes au moins jusqu’à ce que son cerveau soit entièrement formé. Elle s’efforça de contenir sa déception, elle trouverait un moyen d’aider sa fille à laisser tomber ses mauvaises habitudes.

Elle n’était pas au bout de ses peines. Snapchat. Elle découvrit que Sophia recevait, et pire, envoyait des photos dénudées d’elle à un certain Polk. Elle nota le pseudonyme de l’individu qui corrompait son innocente princesse. Elle retrouverait bien son nom complet d’une façon ou d’une autre. Elle fut rassurée de constater qu’au moins, Sophia n’avait pas de compte OnlyFans et que ces photos n’étaient destinées qu’à une personne. Cependant à cause de cette satanée Brèche, tout le monde pouvait désormais y avoir accès. Elle se demanda quelles mesures seraient prises en Droit concernant privacide.info et son usage. Sophia ne devait pas être la seule mineure à s’être fait manipuler par un pervers.

C’était tout ce qu’il y avait à trouver sur sa fille, et franchement c’était déjà trop. Il lui faudrait faire preuve d’habileté pour la remettre dans le droit chemin sans la braquer. Lui dirait-elle qu’elle avait visité ce site, ou ferait-elle des allusions subtiles ? Elle devrait réfléchir à un plan de bataille mais elle avait trop le tournis pour l’instant.

Elle hésita à chercher le nom de sa compagne. Elle n’avait pas l’excuse de vouloir la protéger, si elle recherchait Laurie, c’était par pure jalousie et insécurité.

Elle pensa qu’après tout, peut-être y avait-il toujours quelque chose à trouver si l’on cherchait… Et si tout le monde avait quelque chose à se reprocher ? Non, elle-même n’avait aucun squelette dans le placard. D’ailleurs, ceux qui la chercheraient sur ce site seraient bien déçus de ne rien trouver de croustillant. Elle tapa son propre nom pour voir à quoi la page d’une personne blanche comme neige ressemblait. Son cœur manqua un battement, son sang se glaça et elle eut l’impression que tous ses organes chutèrent à l’intérieur de son corps. Elle referma son ordinateur et ne visita plus jamais privacide.info.

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