TI - 6 L'esthète
*** Contenu sensible ***
C’était elle. Enfin, il l’avait trouvée...
Des mois qu’il la cherchait et finalement, elle était là, installée à la terrasse d’un café, à seulement quelques minutes de chez lui. La petite trentaine, blonde vénitienne aux cheveux longs et bouclés, de grands yeux ambrés, un corps sculpté dans l’opale ; pour lui, elle incarnait la perfection même.
Assise, jambes croisées, celle qu’il imaginait déjà sienne, était totalement absorbée par la lecture du livre qu’elle tenait d’une main, tandis que l’autre exécutait de lents va-et-vient de son cou à la naissance de sa poitrine ronde qui se dessinait sous son chemisier noir, légèrement transparent.
Tout en l’observant à la dérobée, il parcourut la distance qui les séparait, gravit les deux marches de la terrasse, puis s’assit à l’une des tables voisines. Elle dégageait un parfum délicat, douce fragrance de fleurs exotiques. Il s’en délecta un instant, puis s’adossa au siège en constatant l’arrivée imminente du serveur.
À en juger par la couverture, le roman qu’elle dévorait était de type érotique, et à en croire sa gestuelle, il ne la laissait pas indifférente.
Il commanda donc sa boisson ; ce n’était pas encore le moment de l’aborder.
Le garçon lui avait apporté son café depuis quelques minutes quand la demoiselle décroisa les jambes. L’instant qu’il attendait fébrilement se présentait enfin.
— Très bon choix, si je puis me permettre, lâcha-t-il d’une voix chaude.
— Je vous demande pardon…
— Votre livre, précisa-t-il en esquissant un geste du menton.
Elle observa son vis-à-vis durant quelques secondes en rosissant sensiblement, puis murmura :
— Je ne pensais pas qu’un homme puisse connaître cette auteure…
— J’aime les choses délicates, les écritures qui rappellent des caresses. Il se trouve qu’elle excelle dans ce registre, susurra-t-il en vrillant ses iris bleus à ceux de la belle.
Il bluffait, il ne savait pas qui elle était, n’en avait même jamais entendu parler. Mais l'improvisation était un art qu’il maîtrisait à la perfection.
La beauté rougit de plus belle avant de baisser de nouveau la tête vers le livre qu’elle venait de refermer.
— Je n’aurais sans doute pas dû l’emmener avec moi. Vous devez sûrement penser que je suis délurée.
— Pas du tout, rassurez-vous… je suis certain que vous êtes une jeune personne tout à fait délicieuse, affirma-t-il, un sourire séducteur accroché aux lèvres.
— Céleste, se présenta-t-elle en relevant le visage. Elle avait remarqué l’infime pause que l’inconnu avait marquée au milieu de sa phrase.
— C’est un prénom superbe. Il vous sied à merveille. Je suis sûr que c’est votre mère qui l’a choisi.
— On ne peut rien vous cacher, répondit-elle en échappant un éclat de rire cristallin.
L’homme avança la main avant de se présenter à son tour :
— je me prénomme Christopher. Je suis enchanté de vous rencontrer, Céleste.
~oOo~
Le soleil se cachait derrière les immeubles lorsqu’ils se levèrent de table. Chacun était resté à sa place durant la discussion, mais à présent qu’ils marchaient sur la plage, chaque pas rapprochait inexorablement leurs corps.
Christopher plaisait à la gent féminine, parfois à certains hommes également ; peu lui importait le genre, il aimait être regardé comme un objet de désir. Ainsi, lorsque l’obscurité prit possession des rues et que Céleste proposa un dernier verre, il l’entraîna jusque chez lui.
Il lui fit brièvement visiter la maison, puis l’emmena directement au salon. Assis l’un en face de l’autre sur le canapé, sous le son de la pluie d’orage qui martelait les hautes fenêtres, ils partagèrent des cocktails dont la belle ne retint que la multitude de couleurs.
Leurs lèvres se réunirent pour la première fois après de nombreux verres que ni l’un ni l’autre ne comptaient plus, laissant bientôt place à de longues embrassades passionnées. Lorsque Céleste commença à déboutonner la chemise de son hôte, ce dernier se leva et la prit dans ses bras, il la porta ensuite jusqu’à sa chambre où il l’allongea sur des draps de soie.
Déposant de tendres baisers sur chaque parcelle de peau, effeuillant chaque centimètre de chair qu’il découvrait, il la déshabilla avant de lui attacher les poignets aux montants du lit. Puis il se leva pour se dévêtir à son tour, laissant à sa maîtresse, le temps de jouir de la vision de son corps glabre et musclé, avant de la rejoindre sur le matelas.
Christopher s'avéra être un amant d’une douceur infinie. Sa main, telle une plume, effleurait à peine sa peau. Sensation électrisante pour Céleste qui se cambrait à chacun de ses passages.
Il caressa sa joue puis chemina jusqu’à sa bouche. Là, ses doigts inspectèrent la surface parfaite et si appétissante de ses lèvres, gorgées de désir sucré, luisantes sous leur fine couche de glaçage rosé. Attisant un peu plus l'envie, il se délecta encore de ce mets si attrayant tandis que la beauté répondait par de longs soupirs gourmands.
Christopher poursuivit son exploration et s'arrêta au-dessus de la poitrine ferme. La belle pouvait sentir son souffle chaud effleurer la pointe de ses seins, son impatience grandissant au fur et à mesure des secondes qui s'égrenaient. N'y tenant plus, elle souleva son buste avant de poser son mamelon au contact des lèvres entrouvertes.
L’invitation ne pouvait être déclinée.
Christopher le lécha avec gourmandise, s'en délecta à pleine bouche puis descendit entre les cuisses largement écartées.
Céleste se consumait de désir, les sensations ressenties faisaient palpiter son bas ventre, petit fruit mûr à point qui ne demandait qu’à être croqué.
Christopher laissa sa langue en explorer chaque pli avant de plonger à l’intérieur pour mieux en déguster le précieux élixir.
Céleste allait atteindre la jouissance quand Christopher s'enfonça en elle.
Leurs râles de plaisir emplirent chacune des pièces de la maison jusqu'aux premières lueurs du jour.
Épuisée par une nuit comme elle en avait rarement connu, Céleste s’endormit, un sourire gourmand qui en demandait encore accroché aux lèvres.
Trois jours durant, ils ne virent pas la lumière du jour, faisant l’amour dès qu’ils étaient éveillés et ne s’arrêtant que lorsque la fatigue les gagnait. Chaque seconde, le corps de Céleste implorait celui de son amant, elle voulait être dévorée de baisers, consommée à coups de langue, sucée du bout des lèvres.
~oOo~
Ce ne fut que dans la nuit du quatrième jour que Christopher s’éveilla de sa transe. Trop parfaite, Céleste avait bien failli le détourner de son dessein. Mais elle était sa plus belle trouvaille, il ne fallait pas la laisser filer.
Sans faire le moindre bruit, il se leva avant de se rendre dans son atelier. Là, il récupéra son matériel, puis redescendit dans la chambre.
Son amante dormait toujours à poings fermés.
Il les épuisait toutes, ainsi, lorsqu’il rendait leur beauté immuable, elles ne souffraient pas, ne hurlaient pas. Elles s’endormaient doucement, lovées au creux de ses bras, avec, gravées à jamais sur les rétines, les images des nuits d’amour qu’elles venaient de connaître.
Avec un soin tout particulier, il retira chaque mèche de cheveux cascadant sur la poitrine de la belle puis pratiqua une minuscule incision à la base de son cou. II inséra ensuite un tuyau à perfusion dans l’orifice créé.
Ce fut à peine si Céleste bougea.
Demain, elle serait fin prête pour devenir le clou de sa collection. Demain, son odalisque rejoindrait les autres poupées dans leur vitrine. Et, pour sûr, elle serait sa plus belle création, une douce gourmandise pour le seul plaisir de ses yeux.
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