La bouteille
Je mis un certain à comprendre ce qui venait d'arriver. Je repris peu à peu mes esprits, réalisant à nouveau où j'étais, et pourquoi. Je cherchais du regard Merlin, et finit par le trouver qui s'affairait assis à son bureau, examinant différents objets et parlant à voix haute.
- Non, non. Pas celle-là non plus...
- Je pensais qu'il n'était pas possible de supprimer une Quantique !
Il me lança un regard par dessus ses lunettes noires, comme s'il reprenait conscience de mon existence.
- Ha ! Oui. En effet. C'est impossible ! Mais vous connaissez l'histoire du génie dans la lampe je suppose ? Pour supprimer un être Quantique, c'est un peu la même chose. Il suffit de confiner un Quantique dans un espace réduit, vraiment très réduit. Une sorte de bouteille métallique de la taille d'une petite fiole à parfums.
Merlin s'était finalement levé, puis avait saisi sur une étagère un objet d'un métal très brillant, qu'il faisait tourner entre ses doigts.
- Ha ! la voilà. Vous voyez ? C'est ici, à l'intérieur de cette bouteille qu'il me faudrait vous faire entrer. Vous y resteriez un certain temps. Convenablement cachée au fin fond d'un désert, je dirais... Une éternité. Il arrive parfois que des chameliers retrouvent un de ces objets. L'esprit Quantique, après des millénaires de confinement, éprouve alors un immense sentiment de gratitude pour son bienfaiteur. Ces histoires sont à l'origine des légendes sur les lampes magiques, Aladin et la lampe magique, vous connaissez ?
- Vous n'y arriverez pas !
- Mais si voyons ! c'est enfantin, dit-il en vissant la bouteille à la base de la sphére brillante où tournoyaient les arcs de cercle qui m'enfermaient.
Je commençais à sentir monter en moi une forme d'angoisse. Je voyais Merlin derrière les lignes lumineuses qui tournaient. Ses lunettes noires lançaient des reflets inquiétants. Il avait un sourire satisfait, et procédait aux réglages de son appareil. Il se mit à abaisser, très lentement, un curseur sur son tableau de bord.
- Au revoir, jolie poupée... Accrochez-vous à vos oreilles ! Ou peut-être devrais dire, adieu ? Vous commençez à comprendre, n'est-ce pas ?
La sphère qui me contenait réduisait rapidement. Au bout d'une minute, elle commençait à m'enserrer. C'était plus difficile, maintenant. Je voyais Merlin un peu tendu, car je devais offrir une résistance. J'atteignis finalement la taille d'un petit ballon d'enfant. La lumière devint très intense ainsi que la douleur, et je sentis qu'il me fallait, également, résister à une forme d'aspiration vers le bas, un vide. Celui de la bouteille. Je criais, peut-être, avant de perdre conscience.
Je passais, mince petite chose, dans un puit, fait de lumière et d'oubli.
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