Si Paul ne voulait pas venir aux soirées entre collègue, je pouvais peut-être trouver une solution innovante.

Il était de plus en plus habituel que le groupe du jeudi soir, fête avec tout le monde les anniversaires des habitués. Comme dans un mois ça serait à mon tour d'avoir quarante-cinq ans, j'avais sûrement trouvé l'occasion, de faire d'une pierre deux coups.

J'inviterais donc les collègues de mon service ainsi que les habitués du jeudi. Je décidais aussi de changer des lieux habituels, en organisant cette soirée dans un bar situé à cent mètre de mon bureau, où il était possible de danser.

Après avoir téléphoné au patron, pendant ma pause déjeuner, de l'établissement pour convenir de la prestation, j'envoyais un mail d'invitation à mes collègues.

Pour mes 45 ans et la crise qui l'accompagne, j'ai décidé de tous vous inviter le jeudi 28 février veille de mon anniversaire.

Les modalités ne sont pas encore totalement fixées, mais vous pouvez d'ores et déjà réserver votre date et m'en avertir.

J'allais ensuite préparer le café. J'entendis le retour de mes collègues qui revenaient comme chaque midi du réfectoire où ils avaient mangé.

— Alors je n'ai pas eu d'invitation personnel, me demanda Paul avec un sourire coincé.

Il semblait vouloir en rire, mais en même temps, il était agacé de l'avoir appris par un autre de mes collègues qui avait lu le message avant lui.

Lui qui me disait que j'insistais trop, me reprochait, sur le ton de l'humour, de ne pas l'avoir prévenu avant tous les autres de mes projets.

Étant joueuse, j'allais à mon poste de travail et je préparais une douce vengeance. Un petit mail, très formel, avec en pièce jointe, une invitation personnalisée, quelque peu piquante.

« J'ai ouï dire que vous vouliez une invitation personnelle, pour l'anniversaire d'une personne d'une grande qualité intellectuelle, qui se trouve être la personne qui vous envoie ce message.

Je comprends que le protocole exige de ma part d'exécuter cette tâche, vu l'importance exceptionnelle de votre condition.

Vous trouverez donc ci-joint une invitation officielle digne de votre personne.

Bien Cordialement votre majesté »

Sur la pièce jointe, j'avais écrit en gros et en rouge un : « Tu viens Petit con ! »

« J'y ai cru !! »

« Elle ne t'a pas plu ? Elle était pourtant personnalisée et pleine d'affection ! ☺ »

Plus je connaissais Paul, moins je le comprenais. La semaine d'avant, nos discussions avaient sérieusement dérapé, il m'avait à plusieurs reprises demandé des Snap de mes seins, alors qu'un peu plus tard il m'avait avoué qu'il entamait une relation sérieuse avec une personne. Il refusait que l'on soit amis, mais il me reprochait de ne pas lui avoir demandé personnellement s'il voulait venir à mon anniversaire, ce qui aurais fait de lui une personne à part (comme un ami par exemple).

« Avoue que les hommes sont compliqués et toi particulièrement ! », ajoutais-je.

« Pas tant que ça »

« Tu as dit impossible et malsain ! et tu râles si tu n'as pas ton invitation personnelle pour mon anniversaire !!!
Et j'oubliais " j'aimerais vraiment voir tes seins", mais parler de la pluie et du beau temps c'est malsain. lol »

« Le truc que tu ne comprends pas, c'est que tu me saoules avec tes messages tout le temps pour au final ne rien dire. C'est tout ce que je n'aime pas. Et là, tu vois, tu recommences »

Paul par ses mots avait toujours eu la capacité d'exacerber mes émotions. Tantôt excitant, tantôt réconfortant, mais aussi dévastateur comme à ce moment précis. Il m'avait piqué exactement là où ça fait mal. J'avais toujours été trop bavarde et ça me complexais beaucoup. Avec Paul, j'avais eu l'impression que je n'étais pas obligé continuellement de me contrôler, qu'il m'acceptait comme j'étais. Et encore une fois, je ne mettais pas rendu compte que j'avais dépassé les bornes.

« Désolé »