Mémoires : onzième fragment
Il me trompait, je le savais. D'ailleurs, il ne s'en cachait pas. Je l'excusais voyant bien que mon état morose ne pouvait que le rebuter.
Même le goût pour mes études s'estompa. Je loupais de plus en plus de cours. Préférant croupir allongée dans mon lit, les yeux vides, rivés au plafond. Certains jours mes idées broyaient tant de noir que l'envie d'arrêter de respirer ne me quittait pas. Seul le courage me manquait. Plusieurs fois, un couteau à la main, j'étais restée à fixer mon poignet sans jamais oser le geste fatidique.
Quand elle le pouvait, mon amie me rendait visite. Après qu'elle m'ait vu si pitoyable, elle tenait à me rendre ma joie de vivre. Depuis la mort de ma mère, l'impression de traverser un noir tunnel sans fin ne me quittait pas. Finalement, elle seule éclairait un peu mon chemin.
Nous évitions qu'elle ne le croise jamais. Il ne supportait pas notre amitié. Peut-être sentait-il le danger ?
Un jour, elle me rendit visite accompagné de deux jeunes hommes : son petit ami Loïc et un ami Eric, elle tenait à me le présenter. Les voir ensemble, découvrir le tandem qu'ils formaient, mettait en lumière ma relation dysfonctionnelle et mes propres blocages relationnels.
Malgré mon déséquilibre visible, le dénommé Eric s'intéressa à moi. Je le voyais dans ses yeux, il me voulait. Ce genre de regard ne gardait, malheureusement, plus aucun secret pour moi. L'envie d'être de nouveau choyée, était trop forte. Je succombais à ses avances. Terrorisée, qu'il nous surprenne, je profitais des week-ends où il passait ses soirées la main sur un autre sein que le mien, pour rejoindre mon jeune amoureux.
Je me surprenais à faire un effort pour me rendre présentable. Je m'imaginais m'enfuir avec lui, vivre une relation normale. Bien sûr, tout cela n'était que fantasme, mais il me plaisait de le croire possible.
Je le laissais m'embrasser sans jamais aller plus loin, préférant garder l'innocence de ses baisers plutôt que de me dégoûter de sa luxure. Il paraissait patient et ne semblait pas me tenir rigueur de le délaisser, endolori par son désir.
Il sembla pourtant que je ne fus pas assez discrète. Car sans que je ne m'en aperçoive, ma belle-sœur m'aperçut rentrer chez lui. Sa suspicion la mena à engager un détective qui prit suffisamment de photos pour prouver ma culpabilité. Cette femme avait toujours vu d'un mauvais œil ma relation avec son frère. La jalousie malsaine était une histoire de famille. Elle ne pouvait résister à l'occasion qui se présentait de briser le couple que je formais avec lui.
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