Le soir, German frappa chez Eva, bien décidé à comprendre. Celle-ci ne répondit pas, il essaya de l’appeler sur son portable sans succès. Il tenta la porte de Peter qui ouvra quasi instantanément.

- Oh German, quel bon vent ?

- Je cherche Eva et je me disais que peut-être…

- Eva, quelqu'un pour toi. Tonna Peter.

Eva apparut derrière Peter, cheveux lâchés, en tenue de sport, moulée dans son legging et sa brassière, elle était exquise. German en oublia sa colère et ses traits se radoucir. Eva le regardait méfiante.

- Que veux-tu ?

- Eva il faut qu’on parle.

Peter disparut dans son appartement. German attira Eva dans ses bras et l’embrassa tendrement. Elle se laissa faire, retrouvant dans sa chaleur un peu de sécurité.

- On va chez toi.

Eva acquiesça et cria à Peter qu’elle rentrait.

Dans son appartement, German s’assit sur le canapé et lui demanda :

- Vas-tu me dire qui est Tina Lombard pour toi ?

Elle le regarda perplexe et hésitante.

- Juste une vieille connaissance que j’aurais préféré ne pas recroiser.

- Et toutes tes vieilles connaissances déclenchent chez toi un mouvement de panique et des sueurs froides ? Allons Eva, ne me prend pas pour un idiot !

- Ce n’est pas ça…

- Alors c’est quoi dit moi ? Tu ne me fais pas confiance ?

Eva le regarda désolée. Non, d’une certaine façon, elle avait confiance en lui, mais son passé était… Était-ce qu’il était, une marque rouge dans son existence qu’elle n’aimait pas se remémorer, qu’elle ne souhaitait pas partager. Elle avait tout fait pour oublier la honte qu’elle avait d’elle-même. Elle n’était pas certaine qu’il comprendrait qui elle avait été. Après tout, ils ne se connaissaient pas depuis très longtemps.

- German, je n’ai pas tellement envie de parler de Tina Lombard. Et de toute façon, il n’y a pas grand-chose à dire. C’est juste une personne que je ne m’attendais pas à revoir et pour qui je n’ai pas particulièrement d’affection.

German s’affaissa sur le dossier du canapé, pensif. Eva toujours debout le regardait essayant de démêler les fils de sa pensée.

- Très bien pour l’instant Eva, mais tu ne t’en sortiras pas si facilement. Dit-il dans un sourire suffisant.

Eva soupira.

- Tout ce que je peux te dire, c’est que Tina fait partie d’un passé que je préférerais oublier. Dit Eva en s’installant près de German et en posant la tête sur son épaule.

Elle releva la tête vers lui et picora le coin de ses lèvres timidement. German ne résista pas à la tentation et l’embrassa à pleine bouche.

Le lendemain, en arrivant au bureau, Eva fut accaparée par Jude et Guiseppe dont la curiosité avait été piquée. Ils voulaient savoir ce qui avait motivé la scène d'hier. Aucun des deux n’avait jamais vu Eva en colère. Elle les rassura disant qu’il s’agissait juste d’un différend sans importance.

Entrant dans son bureau, son regard fut attiré par le magazine abandonné par Tina. C’était un « Madame Figaro », elle le prit en s’asseyant sur sa chaise et commença à le feuilleter. C’était un numéro spécial sur la Fashion Week. Tout à coup, son attention se porta sur un article, un nom qu’elle ne s’attendait pas à voir l’attira, la laissant accablée. Tina n’avait donc pas posé cette revue par hasard. Eva connaissait assez bien le personnage pour savoir qu’il s’agissait d’un message qui lui était destiné. Un avertissement qui disait clairement « Il sait ». La photo qui s'affichait sur la page confirmait ses doutes.

Bon sang, mais pourquoi avait-il fallu qu’elle défile pour Lucile. S’il savait, qu’est-ce que Tina venait faire là, elle lui avait pourtant recommandé de ne pas s’approcher. Comment avait-elle appris qu’elle travaillait pour Bouchard et que lui avait-elle dit, à lui ?

German entra, interrompant le cours de ses pensées, avec un « bonjour Eva » très formel. Quand elle pensait à ce qu’il lui faisait la nuit, cela lui paraissait absurde, pour autant, elle répondit par un aussi formel « Bonjour M. Baxter » tout en rangeant le magazine dans le fond de son tiroir.

Un soir, dans le bureau de German, alors qu'ils apportaient les dernières corrections sur la présentation pour Tina Lombard, Jude passa la tête à travers la porte. Il était assez tard et German persuadé que plus personne n’était dans les bureaux, profita qu'Eva tapait les mots dictés sur son ordinateur pour la taquiner de ses mains, laissant ses doigts courir sous son pull, lui dessinant des arabesques dans le dos, chatouillant le bord dentelé de son soutien-gorge.

Jude surprit le geste de German qui enleva prestement sa main du pull d’Eva, mais pas assez vite pour qu'elle ne le remarque pas.

- Excusez-moi M. Baxter. Dit-elle en regardant tour à tour Eva et German et leurs mines contrites d’enfants pris en faute. Je voulais juste vous signaler que le problème de l’atelier deux est résolu.

German se leva, mal à l’aise et remercia Jude pour son efficacité tout en la poussant gentiment en dehors du bureau.

Le lendemain, Jude prit Eva à part :

« C’était quoi ce truc hier ?

- Quel truc ?

- Ne fais pas l’innocente Eva ! Tu crois que je n’ai pas vu la main de Baxter sous ton pull ? S’il te harcèle, je le dénonce...

- Quoi ? Mais non !

- Il faisait quoi alors, il te grattait le dos ce salop.

- Jude, le harcèlement supposerait que je ne suis pas consentante.

Le visage de Jude se figea en une expression d’hébétude qui exaspéra presque Eva. Personne n’imaginait la pauvre petite Eva avec un homme comme German.

- C’est pas vrai Eva ! Tu couches avec le patron ? T’es bien la dernière que j’aurais cru capable d’une telle chose.

- Chut Jude, tu es mon amie, je te fais confiance, mais hors de question que cela s’ébruite.

- Whoua comment tu as fait pour séduire ce dieu Grec Eva, il faut absolument que tu me racontes tout.

- Moi, je n’ai rien fait, c’est plutôt lui qui…

Clara entra dans la salle de pause, elles se turent toutes les deux.

- Salut Clara dit Jude.

- Ah Jude, je te cherchais, j’ai un problème avec mon PC.

- J’arrive. »