Alors que conclure ?

Plus il existe d'informations disponibles, plus il est facile d'en trouver une qui confirme nos croyances. Nous entrons alors dans une hypnose collective qui profite à la porosité informationnelle sinon à la criminalisation de la vérité. Devant l'exponentialité du phénomène, le pire reste à craindre. Ajoutez à cela, la création volontaire de l'ignorance, l'agnotologie pour les plus cultivés, l'enfumage aux petits oignons, dans les règles de l'art, et nous partons vers un effondrement certain.

Car au jour d'aujourd'hui¤, le doute, le vrai, si cher aux grands penseurs et autres scientifiques, est devenu le produit, le levier pour rivaliser avec les faits réels, la science. En lui faisant perdre de sa puissance et en le relégant au simple rôle de contredire, le pseudo-doute est devenue une arme très efficace.

" Est-ce vrai que Dieu a dit ? " avait demandé le Diable à Ève. Ça commençait donc bien pour l'humanité. Et il semble, au vu des arguments avancés dans les chapitres précédents, que la progéniture du Serpent ait atteint son projet.

C'est donc la fin des haricots. Sur notre bâteau* qui vogue au gré des vents, souvent contraires, nous n'avons plus de haricots. Nous avons laissé les denrées intellectuelles les plus nourrisantes disparaître sans réagir, sans anticiper. Nous n'avons pas su veiller. Pour ne pas combattre les injonctions sociales les femmes et les hommes intelligents se taisent. Ils la ferment pour ne pas vexer cette engeance de vipère.

 — T'inquiéte Tonton, me lancera Jean-Kevin, l'air taquin, la roue tourne. La libération du temps de cerveau disponible est certes un phénomène majeur de l'histoire de l'humanité, oui, cette disponibilité n'a pas fait advenir une société de sagesse et de connanssance, plus exigente intellectuellement et qui explore les moyens d'atteindre le meilleur de façon rationnel, c'est vrai, mais...
 — Tu récites quel auteur là ? Que ce soit de toi, je n'y crois pas une seconde. D'habitude, tes propos sont beaucoup plus neuneux...
 — Et bah voilà ! Toi qui te plains depuis tout ce temps, tu fais exactement tout le contraire de ce que tu dis. Je te dis une vérité fondamentale et te voilà la démolissant à grand coup d'arguments tout pourris.

Le petit n'avait pas tort. À force de lutter, n'étais-je pas devenu un peu comme eux, intolérant à l'espoir, indiscipliné du bulbe. Je venais de balayer d'un revers de main la seule étincelle qui ouvrait la porte à une autre réflexion. Coincé dans mes certitudes, j'étais devenu l'un d'eux considérant comme vraie toute information qui me plaisait, rejetant sans même l'écouter tout discours contradictoire.

Pauvre de moi...

¤ Pour les nerveux... : https://www.projet-voltaire.fr/regles-orthographe/pleonasme-au-jour-d-aujourdhui/
* Selon l'excellent site projet-voltaire.fr, déjà cité précédemment, la référence la plus ancienne concernant l'expression " la fin des haricots " serait celle des marins, qui, au XVIIIe siècle, avaient défini une gestion des vivres par ordre de péremption. Ainsi, il convenait de manger en premier les animaux vivants et produits frais, puis les biscuits secs, les produits salés ou fumés et enfin les jambons et haricots. Ces derniers ingurgités, c’était là le signal que l’équipage du navire ne pourrait plus survivre longtemps sans rejoindre les côtes et se ravitailler.