Feyn est assis dans la salle de commandement, il supervise la mise en place du tube de connexion qui va relier les deux vaisseaux. Immédiatement, Idle reconnaît la musique qu’Akasha passe pour apaiser l’ambiance et aider le commandant à se concentrer : elle-même en avait déjà fait quelques remix, même si ses frères et sœurs étaient parvenues au consensus interdisant leur émission dans le nid.

Devant son ami, un écran en réalité augmentée affiche le point de vue de plusieurs caméras : deux caméras, probablement installées sur le « ventre » d’Akasha montrent le tube qui se déploie à l’extérieur comme un origami, une à l’intérieur montre ce qui sera la coursive reliant les deux vaisseaux et quatre autres affichent des marqueurs de positionnement trop zoomés pour pouvoir les situer. Ce sont pourtant ces dernières qui retiennent toute l’attention de son grand raton laveur.

Un autre écran présente une reconstitution en relief de la scène, annotée sous toutes ses coutures de marqueurs de distances, de vecteurs vitesses et autres représentations de forces et contraintes. Sur cet écran, la petite peluche se rend compte que le déploiement est pratiquement terminé. Faisant preuve de patience, Idle s’installe dans son siège et observe les opérations en silence.

Au bout d’une dizaine de minutes, plusieurs indicateurs sur la liste flottant à côté de Feyn s’éteignent. Presque simultanément, Akasha annonce : « Commandant, la passerelle de connexion est prête. Comme convenu, les joints d’étanchéités n’ont pas été déployés. »

Satisfait, Feyn s’étire comme il a l’habitude de le faire lorsqu’il a terminé une opération importante. Remarquant la présence de son amie, il se tourne vers elle et lui adresse un sourire amical.

« Tu vas rentrer dedans ? Lui demande-t-elle.

– Oui, il va falloir que je me prépare.

– Tu ne veux toujours pas que je vienne avec toi ? l’implore-t-elle.

– J’ai promis que tu resterais à l’abri et ça peut être très dangereux dedans et tu sais comment est Nevi avec les promesses…

– Mais si on est deux, ça sera moins dangereux, non ? réplique-t-elle avec candeur.

– Je préfère avoir quelqu’un à bord au cas où il y aurait un problème. Viens, on va préparer la combinaison. », termine Feyn.

Les deux se lèvent de leurs sièges et sortent du poste de commandement. Passant les deux premiers hubs – le nom que Feyn donne aux croisements – ils s’arrêtent au troisième et descendent vers la zone violette, vers le sas de préparation et la nouvelle passerelle.

Comme pour un rituel, Feyn répète les mêmes gestes : il commence par se défaire de son uniforme qu’il range dans un petit casier qu’un tag RA identifie par « Effets personnels ». Il détache sa queue et s’apprête à la ranger au même endroit quand Idle s’en saisit et lui dit : « Je ne te la rends que si tu reviens ! ». La remarque fait rire le raton laveur qui accepte son marché tandis qu’il attrape le plastron de la combinaison.

Avec l’assistance des petits bras robotisés que pilote Akasha, Feyn se glisse dans l’armure, faisant passer ses bras à l’intérieur des ouvertures prévues pour les épaules. Le vaisseau lui tend ensuite les bras et gants, un à un et l’aide à les enfiler. Une fois ceux-ci parfaitement ajustés, Feyn enfile le pantalon, lourdement armuré, ou plus exactement, lourdement isolé. Enfin, vient le moment symbolique d’ajuster le casque et le visage de Feyn disparaît derrière la visière composite du casque. Quelques lueurs témoignent de l’allumage des affichages tête-haute et les lampes, organisées comme des oreilles sur le casque, s’illuminent.

Le commandant lance une série de vérifications et au bout de cinq minutes de procédures absconses, il se tourne vers un autre casier et commence à s’équiper d’un harnais portant toute une collection d’outils plus étranges les uns que les autres. Ney saurait probablement le nom de chacun d’eux. Elle saurait aussi s’en servir !

La combinaison vivante se retourne vers un dernier casier que la réalité augmentée désigne sous le nom « Armurerie ». Après en avoir déverrouillé le panneau avec son code de sécurité, il en sort un pistolet qu’il attache à sa hanche à l’aide d’un patch adhésif. Refermant le casier, l’astronaute se tourne lentement vers Idle.

La petite renarde blanche s’approche de lui, flottant dans les airs. D’une main, elle s’accroche à lui et le regarde au travers de la visière.

« Tu vas revenir ! articule-t-elle avec angoisse.

– Je te l’ai promis non ? » lui-répond Feyn à travers le canal de réalité augmentée.

Sans lâcher sa prise sur l’armure, Idle se blottit quelque seconde contre le plastron. De sa main droite, l’astronaute la serre quelques instants contre lui. Elle se dégage alors dérivant dans la coursive sans le quitter des yeux. Doucement, il lui fait signe, le pouce levé.

Elle le regarde, une boule au ventre, pénétrer dans le sas qui conduit à ce vaisseau qui dérivait très certainement pour une bonne raison.