53 – Idle : 403 Forbidden
La peluche regarde Ney s’éloigner dans le couloir. Elle va interroger le complice du méchant. Elle sait qu’elle gagnera. Elle gagne toujours à ce jeu. Idle aussi a ses jeux préférés, mais la plupart ne demandent pas de gagner. Sauf un, mais c’est quand les gens essaient de lui faire du mal. Sa grande sœur le sait peut-être, mais elle garde le secret. C’est son secret.
À côté d’elle, Feyn est adorable. Ses oreilles rondes et grises sont rigolotes et il porte un masque noir qui lui donne un air rusé. Et c’est le meilleur astronaute qu’elle connaisse ! Il n’est pas très à l’aise : Akasha découvre sa nouvelle condition et quelque part ça lui fait peur. Mais l’IA est gentille et la peluche blanche le sait très bien. Elle a sauvé Feyn en lui expliquant comment ajuster et enfiler la combinaison et en la guidant dans les débris du vaisseau.
Feyn la regarde et lui demande : « Quelque chose ne va pas, Idle ?
– Tout va bien, lui répond-elle.
– Tu n’arrêtes pas de te dandiner, lui fait-il remarquer.
– Ça fait longtemps que j’ai pas été aux toilettes, explique-t-elle.
– Ah ? Ils doivent en avoir ici, affirme-t-il.
– Mais je ne veux pas te laisser seul ! s’effraie-t-elle.
– On est dans un poste de la sécurité : on ne risque rien, lui explique Feyn.
– Tu es sûr ? l’interroge Idle.
– C’est ce que veut dire le mot sécurité, s’amuse-t-il. Allez, va ! C’est par là. »
Idle se lève et se dirige vers la salle des commodités. Un androïde policier la regarde alors qu’elle pousse la porte. Comme tout le reste des colonies les toilettes sont propres et le micro-carrelage compose des formes amusantes. Idle s’approche de l’une des cabines et, après avoir discrètement vérifié qu’elle était disponible, s’y enferme. La présence de gravité rend le processus plus simple qu’à bord de l’Akasha. Idle se demande si le nom du vaisseau va changer maintenant que l’IA n’est plus à bord. Elle espère juste qu’ils ne se contenteront pas de mettre un stupide numéro derrière le nom actuel.
La biologie des nevians est beaucoup plus simple que celle des mammifères si on se réfère au système digestif. Leur nourriture est exclusivement composée de gel nutritif mélangé à des nanites. Pour être exact, il n’y a pas de digestion à proprement parler. Toutefois, ces peluches produisent quand même des déchets : un excédent d’eau, les nanites usagés et divers produits issus de la combustion du glucose avec l’air.
Son affaire terminée, Idle s’assure de la propreté des lieux et appui sur le bouton lançant la procédure de dessiccation et de séparation des éléments. Ils seront probablement stockés dans une petite poche qui sera expédiée au centre de recyclage. Sur l’Akasha, il fallait apporter soi-même ces petites poches au recycleur, ici, tout est automatique.
Ouvrant la porte de la cabine, la petite nevian tombe nez à nez avec un homme : celui des informations, ce fameux Bishop. Le type la regarde avec un air empreint de sadisme et de folie. Il commence à s’avancer avec un poignard, mais Idle l’arrête d’une simple question : « Vous avez envie de jouer ? »
L’homme hagard, la regarde quelques instants avant de sourire. « Je t’écoute, lui dit-il.
– Pense à un nombre et je le devine, le défie Idle.
– Ok. Vas-y, l’autorise Bishop amusé.
– dix-sept ! répond la peluche blanche.
– Un coup de chance ! se défend le fou avec mauvaise foi. Recommence !
– Cent-soixante-sept virgule deux-mille-trois-cent-quinze, répond à nouveau Idle.
– Impressionnant, hésite l’homme.
– J’en ai un autre de numéro, le défie-t-elle.
– Lequel ? hasarde le fou en reculant d’un pas.
– 45E782738204B435424F232AAAACCCD323D2CCA909740134278F23EF23F3F267…
– Stop ! » hurle l’homme en l’interrompant.
Le fou se laisse tomber à terre, sur les genoux. Sa lame rebondit à côté de lui. Il sanglote et regroupe ses bras sur son visage en pleurant : « C’est le code… C’est le code… Elle va détruire le maître. Elle va détruire le maître… »
Les suppliques de l’homme durent encore plusieurs dizaines de seconde et Idle le regarde avec le cœur serré : elle n’avait pas prévu cette réaction. Lui faire peur d’accord : mais là, elle sait qu’elle l’a fait souffrir.
La porte des toilettes s’ouvre d’un coup et le robot qui en gardait l’entrée fait irruption. Reconnaissant le miséreux au sol, il fait feu. De sa cabine, Idle voit l’homme se transformer en lambeaux de chair… et beaucoup de sang gicle.
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