Maître Alphonse
Je me réveille le lendemain avec la sensation d’avoir tout rêvé : la lettre, mes questions, le message envoyé… Je me surprends à sourire… Oui, c’est cela, ce n’était qu’un rêve. Je n’ai jamais reçu de lettre ni hérité d’un manoir en Écosse. Je ris doucement dans mon clic-clac trop petit pour moi. Trois coup brefs frappés à la porte me font sursauter. Je me lève tant bien que mal, enfile un peignoir sur mon pyjama et me précipite vers la porte. Je me retrouve face à un homme élégamment vêtu qui s’incline devant moi.
« - Mademoiselle Alyana Richard Atsurui ?
- Euh… oui… Bonjour…
- Bien le bonjour mademoiselle. Je me présente : je suis Lord Alphonse Strauss, avocat de feu défunt votre père. Dès que j’ai eu votre mail, j’ai de suite accouru à votre rencontre.
- Mon… mon mail ?
- Il me semble vous avoir fait parvenir la lettre de votre défunt père, n’est-il pas ? (J’acquiesce de la tête, impossible pour moi de prononcer un seul mot) Bien, bien. Une voiture vous attend en bas de votre immeuble. Nous décollerons pour l’Écosse dès que Mademoiselle sera prête. Permettez-moi de prendre congé. »
Sur ces mots, le Sieur Alphonse me fait une révérence et se retire. Je ferme tout doucement la porte, complètement interloquée. Accouru à ma rencontre ? Décoller pour l’Écosse ? Je ne comprends qu’à moitié ce qui se passe. Ce n’était donc pas un rêve : j’ai bien reçu une lettre de mon père et j’ai bien hérité d’un manoir en Écosse. Je décide de ne plus réfléchir et de tenter ma chance. Après tout, ici je suis seule, je ne manquerai donc à personne. Je prends un sac et y mets quelques vêtements, mon ordinateur et son chargeur, sans oublier le bijou que ma mère m’a offert pour mon huitième anniversaire : un collier avec un pendentif énorme. Un bijou de famille disait-elle. Je passe par la salle de bain et après avoir jeté un dernier regard à mon appartement, je ferme la porte. Sans savoir que c’était la dernière fois que je le voyais.
Au bas de mon immeuble, un petit attroupement s’est formé à grand coup de « Ohh ! » « Ahhh ! ». Je m’avance à mon tour, sous les quolibets des jeunes du quartier : « Hey la girafe ! » « Hey la grande courgette tu vois pas ce qui se passe de là haut ? », suivi de quelques rires des badauds. Je baisse les yeux comme à chaque fois, jusqu’à ce que je sens la main de Maître Alphonse se poser sur la mienne.
« Il est temps mademoiselle. »
Il me conduit jusqu’à un hummer limousine et m’ouvre la portière avec un clin d’œil. « Rapport à votre taille mademoiselle. » Ce qui a le don de me faire sourire. Le silence se fait autour de moi. Je ne pense que personne ne s’attendait à ce que le hummer soit là pour moi. Je profite de ce moment, une sorte de petite revanche perfide. Je remercie Me Alphonse et monte à bord du véhicule somme toute impressionnant. A travers les vitres fumées, je jette un œil sur ceux qui étaient il y a encore cinq minutes mes voisins et ferme les yeux.
En ce jour, j’entame un nouveau départ.
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