Je trépigne d’impatience. Mes mains tremblent d’excitation. Je repense évidemment à ce qu’il s’est passé dans la salle de bain. Sur la première double page se trouve une carte de Noctalya, sûrement le monde de mon père. Cette carte est très détaillée et haute en couleur. Au centre se trouve Nymphea : un cercle noir avec des étoiles où une mer couleur turquoise semble se dévider. Tout autour se trouvent quatre continents : en haut à gauche, Fairya, en forme de demi-lune entourée d’une myriade d’îles bleutées, à sa droite Limerya d’un vert sombre ; en bas à gauche Akurya de divers tons ocres, rouges et oranges et à sa droite Tensya. Entre ces deux-là se trouve le Lac Rosea ainsi que le fleuve Arc-en-Ciel. Sur tout le pourtour de la carte se trouve une sorte de grand nuage : je ne comprends pas. Ce monde ne serait-il donc pas rond comme le nôtre ? Ou alors reste-t-il des zones inexplorées ?

Je me mets à lire avec passion. Ce premier tome concerne le continent de Tensya : le monde des Titans. Il semblerait qu’il y ait trois types de magies là-bas : élémentaire (eau, feu, terre et air), psychique (contrôle des âmes de tous les êtres vivants) et militaire (art et stratégie de la guerre). Le plus souvent les talents sont héréditaires. Tous les Titans sont dotés de pouvoirs magiques : plus la lignée est royale, plus ceux-ci sont puissants. Un petit rappel est encadré : la famille royale est composée des Némaska, des Malakim et des Atsurui. Les Falanim et les Ritsua font partis du peuple. Je n’en reviens pas : les paroles de ma berceuse me parlent du monde de papa depuis le début. En revanche, le livre ne parle pas de l’Aokiring. Sur la page suivante, une consigne simple :

Pour découvrir la nature de votre magie vous devez effectuer le test du Register afin de vous perfectionner dans votre domaine.

Le test du Register… Qu’est-ce que c’est ? Je tourne les pages en quête d’un indice, d’une marche à suivre. Rien. Légèrement agacée, je referme le livre et prends le coffre en main. Je cherche le petit trousseau de clés et en prend une. La première est la bonne : le déclic se fait et la boîte s’ouvre. Sur une doublure violette, un vêtement couleur carmin repose. Je le prends en main et le déplie. Il s’agit d’une cape avec une capuche d’un tissu tellement doux qu’il glisse entre les doigts. En filigrane, des rosaces en fils d’argents parsèment le vêtement. La doublure ressemblerait à de la laine teintée d’un violet sombre.

Fascinée, je la passe sur les épaules et noue les lacets à pompons argentés autour de mon cou. Je me mets à pavaner devant un immense miroir doré m’imaginant lancer des sorts. Alyana… Je m’arrête. Alyana… Cette voix masculine m'est étrangère et familière en même temps. Alyana, prononce ton nom devant le miroir. Je m'exécute : debout bien droite devant ce grand miroir ovale aux bords dorés décorés d'angelots et de rosaces fleuries, je prononce mon nom entier d'un air solennel, comme dans les films. Devant mes yeux ébahis, le miroir se noircit entièrement et quatre petites images apparaissent : une goutte d'eau, une flamme, une feuille et un rocher. Puis il s'efface comme si une main invisible l'essuyait de l'autre côté. Le miroir se brouille, c'est comme si je me trouvais devant un écran de télévision en recherche de chaînes. Il se stabilise, devient rouge sang avant de me réfléchir portant ma cape sur une tenue noire ressemblant à une combinaison, ouverte sur le ventre, à ma taille se trouve une énorme ceinture à la boucle dorée sur laquelle divers objets sont accrochés. Je regarde mon visage où je vois un troisième œil s'ouvrir au milieu de mon front. Surprise, je hurle et tombe à la renverse. J'entends le miroir exploser avant de sombrer.

Evaïs. Yeux bleus.