Il faut aller au fond des mots, en détourner le sens, jusqu’à nous désorienter, il faut taguer l’écrit, il faut surprendre, il faut choquer – chocker ferme, matelot !– rudoyer l’ortho- ne garder que le graphe, refuser le sens unique, la convention, aller voir à côté des sentiers battus, ex-plorer et non pas dé-plorer, cultiver l’insensé, garder la ligne, mais sans cesse la rhabiller, prendre, découper, rapiécer, coudre si vous préférez, récupérer, bricoler. Pour un monde nouveau inquiétant et sombre il faut de nouveaux éclairages mais nous n’avons pas le temps ni les moyens. Ils sont là dans nos dicos, académiquement rangés, endormis dans leurs appartements, On les sort quand il faut ; quelques uns sont oubliés, d’autres usés jusqu’à l’encre perdent leur sens, ou nous sont perfusés. Prendre le mal par les cornes, répéter, user jusqu’à la corne ces mots qu’ils emploient pour nous perdre et nous noyer. Les user jusqu’à,la trame et les ranimer une fois nettoyé de leur boue.