Suis-je poème ou suite de mots débridés,

Pages mises en bouches ou désaccordées

qui gobent l’air comme poisson rouge en bocal ?

Suis-je poème-friture au regard mat

mis en clôture de verre et qui bulle

sur de vaines écritures sans envergure ?

Suis-je implants forgés de graphismes osanores

flanqués de vocables fades et inodores

ronflant de vers à la Bourgeois Gentilhomme

qu’une tapageuse vanité abandonne ?

Suis-je ce poème-épave à la dérive

sur des vagues océans de terrains vagues,

naufragé malheureux de tous mes bateaux ivres

de vers surfant l’orage qui les élaguent ?

Suis-je ce poème dont l’écho invite

à aimer les débordements de sentiments

les cascades de pleurs à grand fracas bêlant ?

Mon poème à vau-l’eau poussé bien trop vite

bute contre ses ridicules ornements

chavire sur une mer de feuilles froissées

puis s’agite comme Carassin asphyxié

et git sur le fond de ma corbeille à papier

parmi ses confrères orphelins de succès.