"Chérie tu ne sais pas ce qui c'est passé, aujourd'hui au bureau ?"

"Vous avez eu une réunion avec des mauvaises nouvelles à annoncer."

"Si c'était que ça ma pauvre. Je vais te raconter..."

"Le matin, nous avions la fameuse réunion. Celle où on a du annoncer le possible licenciements de dizaines d'employés. Enfin ça si le marché stagne encore ou pire, chute. Les exigences de la direction sont claires et on a été tout aussi clair avec le personnel du service.

Monsieur le Directeur des Ressources Humaines était là. Et nous, en profitions aussi pour faire un rapide tour de table sur les missions de chacuns.

Et là, le graphiste.

"j'ai rien amené. On m'avais pas dit. Je peux aller recupérer mes copies sur l'ordinateur si vous voulez." Bref, il m'a fait passer pour un vrai imbécile. La note de service, je l'ai transmise à son responsable et connaissant Bernard il a forcément fait passer le mot.

Il m'a pas mal gonflé le jeunot. Du coup, j'ai jeté un oeil au dossier que Bernard m'avait laissé avant sa formation, sur l'évaluation de ce garçon. C'était accablant. Fainéant, procrastinateur et j'en passe. Bernard y avouait aussi, qu'il savait que le jeune graphiste colportait toutes les informations du bureau à l'atelier. Tout le monde est à cran, on fait du mieux pour rester à flots, manque plus qu'une grève pour nous saborder.

Le dossier d'évaluation était très clair et dur. J'ai recruté ce garçon, et je me serai tant trompé sur lui.

Ni une, ni deux à la pause. Je sais qu'il reste au bureau. Alors je vais lui en toucher deux mots. Et là. Sur l'ordinateur, de résidus de repas, des miettes, une odeur d'oeuf mayonnaise. Ca m'a fout des hauts le coeurs. Mais en plus, il jouait sur un jeu, sur internet. Les réseaux sociaux grand ouvert.

Depuis un mois, je m'évertue à faire des notes de services sur le sujet. Chaque responsable les reçoit et les transmet à son équipe. Pas de jeux, ni de réseaux sociaux. On a déjà du mal avec tout ce boulot, alors pas besoin de flanneries en plus.

Alors je lui dis, à mon graphiste qu'il ne faut pas. Et là il part au quart de tour. "J'ai le droit ! C'est mon temps de pause !" Je m'énerve et il continue.

Et après, j'enchaine, je lui mets devant les yeux toutes ses erreurs. Je lui sort la liste de Bernard. Deux semaines de retards sur des dossiers simples. Et il se dit à jour et pour tout le reste et bin il sait pas. Bizarrement il trouve rien à me répondre.

Il me l'a joue à l'envers, disant de voir avec Bernard, mais moi je l'ai le rapport de Bernard. Et sur ces entrefaits tout le monde débarque, le DRH y comprit. Alors on essaye de s'expliquer avec lui, mais il me coupe, fait son malin. S'énerve quand on lui parle de ses colportages à l'atelier. Je suis sûr qu'il est syndiqué ou un truc du genre.

Il commence à se montrer récalcitrant et impoli. Même avec le DRH.

Le DRH lui dit de se taire et d'aller dans mon bureau. On te la prit à part, entre quatre yeux. Et là, j'ai ressorti le dossier au DRH. On avait des preuves, des éléments à charge : la réunion de ce matin, toutes les fautes listés et précises, la prise sur le fait à ignorer les notes de services. Alors c'est toujours pareil, un fois devant ses fautes, le mec s'excuse. Mais tu m'enlèveras pas de l'idée, qu'un jeunot qui commence comme ça, c'est pas prêt de devenir un bon élément.

Alors on l'a congédié pour le reste de la journée. Cet évènement avait déjà fait pas mal de grabuge et l'équipe à besoin de travailler dans le calme. Et pourtant, après son départ, on a épluché son dossier. Pas un mauvais gars, mais depuis deux mois, c'est le vide. On se laisse le temps de la réflexion avec le DRH, mais l'évaluation de Bernard ne nous laisse pas indifférent. Et dire qu'on a besoin de gars sérieux pour redresser la barre."