Si je me souviens bien, ils étaient cinq, ou six. Je revois le hangar de Chez Marcel, les murs en ruine couverts de ses outils rouillés. La fascination que je portais à son établi quand j’étais enfant me hante encore aujourd’hui. Du haut de ma petite taille, j’étais seule à en voir le revers : la série de serre-joint en son long , à mesure que le bois s’était gorgé d’humidité, avaient fini par s’emboîter dans le MDF : sous l'établi, s'offrait à moi une étendue de fossiles de fer. J’entends encore l’écho cru de la pièce, sens encore l’odeur de la suie.

Marcel est un gentil donc, quand je lui ai demandé de leur céder l’entrepôt le temps de la réunion, il a, sans hésitation ni besoin d’explications, naturellement accepté. Ils étaient six, dont quatre hommes. Nanou régnait en maîtresse au côté de ses disciples : Léon, Looping, Émile, Claude et Élise. Rien ne les disposait à se rencontrer mais les inclinaisons de la vie font qu’un jour, se forma un carrefour où ils se croisèrent. Dans la communion de leurs singularités respectives, ils en devinrent, soudainement, presque normaux ; qui l’eut cru. Moi, il m’a semblé normal que leur sommet se déroule chez Marcel. Ce même sommet qui, sans réel intérêt ceci dit - soyez-en averti -, fera alors l’objet de notre récit.