Rêve n°4.
La clameur emplit toute la chambre, par vagues successives elle s’engouffre par la porte, traverse mon corps, m’électrise. Un mouvement circulaire du cou… mes cervicales claquent une après l’autre. La tension libérée, je finis de lacer mes chaussures, j’ajuste mon casque et empoigne ma batte d’une main.
Un projecteur s’allume dans mon dos, sa puissance projette mon ombre de géant, d’un seul coup, la foule se tait. J’avance jusqu’à me retrouver dans l’embrasure, un faisceau de lumière m’irradie, il rallume les cris de l’arène.
Marsh Walk
Marsh walk
Marsh walk...
Ils scandent tous mon nom… et leurs cris rythment les battements de mon cœur.
Devant moi s’ouvre l’arc de cercle du stade, je ne le distingue qu’aux lueurs des feux d’artifices qui s’échappent de la pelouse. Je m’élance en trottinant pour rejoindre ma position. À mon passage, des mains se tendent, des « give me five Marsh » descendent des tribunes, je lève la mienne et effleure des doigts.
Je me positionne sur le marbre devant le receveur, il m’adresse un clin d’œil de défis, je lui retourne un sourire en coin. Le pichteur est prêt, entre ses doigts roule la balle, il la cache à ma vue en l’enfournant dans son gant de cuir et se met en position. Je cogne ma batte au sol plusieurs fois, arme mon coup et retient ma respiration. Dans une chorégraphie ordonnée, le lanceur déploie son bras, il lâche la balle qui tournoie sur elle-même, elle m’arrive dessus à toute vitesse. Ma batte décrit un arc de cercle, mais ne trouve pas sa cible, dans la seconde qui suit, the umpire gueule strike. Merde, loupé…
Le receveur ricane, « alors Marsh, t’as de la merde dans les bras ? » me dit-il en s’accroupissant.
J’ten foutrait moi de la merde, j’ai encore deux balles pour te faire fermer ta bouche…
De nouveau le lanceur cache sa balle, son premier lancé est passé à droite dans ma zone de strike, je sais que le second va suivre le même chemin. Tu ne m’auras pas deux fois…
La foule retient son souffle, elle attend un exploit…
Il détend son bras, mes yeux suivent la trajectoire de la boule de cuir qui file sur moi, je lâche ma batte…
Stunk…
Plein fer… La balle s’élève dans les airs, elle disparaît au-delà des projecteurs. Un instant muets, les spectateurs se lèvent comme un seul homme, d’abord ténues, leurs voix s’amalgament en une explosion de délire, j’entends à peine l’arbitre qui gueule « home run ».
Lentement, je laisse tomber ma batte au sol et entame mon tour des bases. J’atteins la première sous les hourras du public, puis la seconde, encore une…
Une secousse. Une voix enrobée de brouillard me parvient.
– Chérie, réveille-toi, c’est l’heure de te lever. Tu sais qu’aujourd’hui c’est un jour spécial…
– Hummm, ouais, je sais, je viens de faire un putain de home run…
– Dans tes rêves, chérie, comme d’habitude… Non, c’est ton anniversaire, alors happy birthday…
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