Ils sont fous ces Romains !
Paisiblement installé dans le jardin contre le tronc d'un saule pleureur, Gaston était plongé dans son livre sur les gladiateurs qu'il avait eu pour son anniversaire. Sa mère n'avait pas vraiment été ravi de ce cadeau, un peu trop sanglant à son goût, mais il venait de son beau-frère, le parrain, et ne souhaitait pas faire d'esclandre. Surtout après avoir vu le sourire s'élargir sur le visage de son fils au moment où il avait sorti de son emballage la dizaine de tomes de la bande dessinée qui relatait l'histoire de ces esclaves combattants pour la liberté.
Il avait déjà lu dix fois toute la collection d'Astérix de son père, c'était peut-être le moment pour qu'il franchisse un palier dans ses lectures. Elle se rassurait en se disant qu'il ne réclamait pas encore à voir les péplums barbants de ses souvenirs, mais émit un sourire en se rappelant les muscles saillants de Russel Crowe dans Gladiator. Des muscles qu'il avait perdu depuis.
L'histoire racontait l'épopée du Thrace Spartacus et de ses deux compères Gaulois Crixus et Œnomaüs. Enfin ce dernier ressemblait à un gaulois mais personne n'en était sûr. Le premier tome se passait dans le ludus à Capoue une fois que Spartacus eut été acheté par le laniste Lentulus Batiatus et qu'il en fasse un gladiateur de type Mirmillon avec un grand bouclier, aussi appelé Gaulois, alors que de part son origine, il aurait dû être de type Thrace avec une toute autre armature ethnique.
Les scènes alternaient entre les phases d'entraînement au combat et les moments de discussions entre esclaves dans les cages du ludus. Gaston lisait avec intérêt en espérant arriver vite aux combats dans l'arène et imaginer la foule des spectateurs romains scander le nom de Spartacus et chanter ses louanges. Parfois il posait son livre et, munie de son épée en bois, simulait un combat imaginaire avec les branches-lianes du saule.
Sa maman regardait amusée son petit bonhomme de huit ans tout sec, comme s'il n'avait pas de muscle, se prendre pour un guerrier. Elle aimait le voir grandir, gagner en autonomie et s'adonner à ses passions, mais elle espérait surtout qu'il ne considère pas sa soeur comme un adversaire. On pouvait aisément penser qu'avec son caractère de lion, elle ne se laisserait pas faire. C'était d'ailleurs son signe astrologique.
Elle scruta l'horizon et apprécia les lueurs rouge-sang du coucher de soleil qui baignaient la plaine et appela son fils.
- Allez Gaston, c'est l'heure de rentrer, le repas est prêt ! C'est une salade César comme tu aimes !
Le mini-gladiateur brandit son épée en direction de sa mère en déployant ses micro-biceps et clama en essayant d'avoir une voix grave.
- Avé César, ceux qui vont se nourrir te saluent !
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