Cyleph, le rat de bibliothèque
Il est de connaissance commune que les Haut-Elfes, peuple élégant et sage, se doivent d’acquérir un savoir minutieux au sujet de l’histoire du monde et de toutes les formes de magie possibles.
Cyleph fut la victime de cette exigence raciale qui lui était imposée. Enfant, il souhaitait surtout pouvoir s’amuser comme bon lui semblait avec ses amis à travers les plaines enneigées qui bordaient sa cité natale. Pourtant, il était oppressé par la fermeté de ses parents pour qui la discipline sur ses études primait. Bon nombre de journées furent passé enfermé dans sa chambre, le nez dans les bouquins, choisis avec soin par son père et sa mère et affichant des équations de plus en plus complexes. Chaque page tournée lui rappelait l’amertume de sa solitude dans laquelle il était emprisonné.
Un jour, il découvrit à la bibliothèque un grimoire au sujet de la déesse du vent Havő. Quel ne fut pas ce sentiment de complaisance qu’il eut pour la première fois en découvrant le contenu de cet ouvrage. Lui qui s’était efforcé jusqu’à l’adolescence d’accumuler les connaissances sans plaisir, il ressentait enfin un sentiment d’évasion. Il était difficile de pouvoir y mettre des mots, mais les équations et les schémas des arcanes du vent devant lui semblaient à ses yeux aussi clairs et limpides que de l’eau de roche. Volume sur volume, il dévora tout ce qui avait pour lien la déesse et le vent. Petit à petit, il trouva finalement plaisir dans la lecture et, sans se faire prier, il passa ses journées à la bibliothèque à voleter entre les rayons de livres afin de satisfaire sa soif de savoir.
Il apprit toutes les langues anciennes et du monde pour ses recherches et en vint à travailler en tant que bibliothécaire, ce qui lui donna la main mise sur l’intégralité des grimoires de la réserve, non vendus sur le marché public. La magie lui parut progressivement une amie de confiance, son allégeance envers Havő renforça ses compétences. Le vent était l’élément qui lui avait rendu sa liberté, insaisissable et invisible, tout comme son esprit qui virevoltait sans arrêt à travers les pages jaunies et poussiéreuses des romans interdits. Il avait réussi à trouver sa voie, porté à la fois par les cumulus et les ouragans, rattrapant les voyages qu’il n’avait pas pu faire enfant à travers les épopées des dieux et des démons du panthéon. Il était finalement devenu ce qui le rebutait au plus haut point auparavant, un rat de bibliothèque.
Cependant, en un rien te temps, il vida les stocks des ouvrages de son lieu de travail allant même jusqu’aux librairies de sa ville. La vie lui devint alors maussade, il avait soif d’un savoir toujours plus colossal, mais aussi d’aventures qu’implorait encore son âme d’enfant.
Ses parents furent fiers de lui quand ils apprirent que leur fils allait suivre la longue lignée des siens, l’héritage d’une folie à la poursuite de la culture. Ils surent très bien qu’il s’en sortirait. Ses compétences en calligraphie allaient lui permettre de toucher à de nombreuses formes de magie qui combleraient sa maîtrise de l’élément fugace. Ils lui offrirent une tunique de magicien de première manufacture aux sombres teintures mauves et aux entrelacs dorés qui le réchauffera lors de sa traversée des terres enneigées. Il obtint aussi un chapeau pointu, celui de son grand-père, un bien très important dans sa famille puisque les hommes se le passaient de génération en génération une fois l'âge adulte atteint.
Sa sacoche en cuir remplie de parchemins et de tout le matériel nécessaire à leur confection, Cyleph partit à travers plaines et forêts, villes et déserts, à la recherche de nouveaux lieux de savoir. Aurait-il aussi l’espoir d’ouvrir sa propre bibliothèque dans le futur ? Qui pourrait le savoir ?
Annotations
Versions