Chapitre 32

3 minutes de lecture

Écrit en écoutant notamment : Rebelion x Vertile – Numb [Rawstyle]

Je ressors fin prêt un quart d’heure plus tard. Difficile de prétendre que je n’appréhende pas le rôle de passif, mais en général, quand je me suis décidé, je ne fais plus machine arrière ; ce serait juste trop frustrant pour moi.

Alors que je m’attendais à voir Enzo poser des yeux indiscrets sur mon corps, je suis interpellé par son air dépité :

— Je crois qu’on vient de se faire poser un lapin.

— Ça peut arriver ! Tout ce que je sais, c’est que le gars passe à côté d’une bonne soirée. Du coup, tu relances l’autre ?

Il marque un temps de pause tout en cherchant l’inspiration autour de lui.

— Ouais… enfin non, j’ai plus tellement envie, tout d’un coup.

— Je comprends pas, t’avais l’air motivé !

— Je sais, mais ça m’a cassé dans mon élan. Et je préfère finalement me reposer pour demain.

— Ok… tu veux que je reste, ou pas ?

— T’es pas obligé...

— D’accord.

Je récupère les quelques affaires que j’avais déposées et le laisse me raccompagner dehors. Il me détaille pendant quelques secondes d’un regard intense, presque tragique, puis nous nous saluons d’une poignée de main. Après quelques pas, je me retourne, envahi par l’impression que cette soirée pourrait bien être la dernière passée ensemble. Il a déjà disparu.

La nuit grise, la rue déserte et immobile, tout ce paysage resplendit déjà de nostalgie, d’un plaisir révolu.

Je profite du passage d’un résident du lieu pour franchir le portail, puis arrive devant la porte et frappe quelques fois sans grand espoir. En plus, je ne suis plus assez couvert pour supporter la fraîcheur qui s’est brutalement installée ; c’est à se demander ce que je suis venu faire ici, au lieu de simplement rentrer chez moi. Il va encore m’envoyer paître, comme la dernière fois…

* *

*

* *

Le 12 juillet.

— Montpellier, nous voilà ! s’écrie Andreas lorsque nous quittons la gare d’Avignon pour la dernière étape de notre voyage depuis Paris.

J’ai tellement hâte de revoir Lucas ! Même si j’ai eu des nouvelles régulières, rien ne vaut quelques jours de vacances dans le Sud pour nous retrouver. J’ai dû passer deux rattrapages fin juin, mais désormais, l’année est validée.

Ma saison sportive s’est bien poursuivie, même si je n’ai pas pu améliorer la marque de 47’’72 établie sur la piste de Palaiseau. Quelle course de fous furieux quand j’y repense…

Jordan a bien réussi à me priver de l’une ou l’autre victoire par la suite, mais j’ai l’impression d’avoir franchi un palier important cette saison et j’ai de belles ambitions à nourrir pour l’année prochaine. Je vais évidemment renouveler ma licence dans mon club, toujours en compagnie de Stéphane.

Andreas, lui, a pu reprendre la compétition trois mois après sa blessure. Je dois avouer que ça a été un immense soulagement pour moi de le voir rapidement retrouver son niveau sur 3000 mètres steeple.

Il a heureusement fallu moins de temps pour se réconcilier ; j’étais d’ailleurs loin de penser que ça arriverait dans la foulée de mon ultime soirée en compagnie d’Enzo ! Je me demande ce qu’il est devenu, lui qui semblait tiraillé entre son envie de se poser avec un mec et son désir de nouvelles expériences.

***

« Dans quelques instants, notre train arrivera en gare de Montpellier Saint-Roch avec un retard de dix minutes. La SNCF et les membres de l’équipage vous souhaitent une excellente journée. »

Je plie mon ordinateur et le range dans mon sac, tandis qu’Andreas aide une mamie à descendre sa valise. Nous remontons le quai jusqu’au hall de la gare, entourés de voyageurs plus ou moins pressés.

— Baptiste, Andreas !

Je reconnais immédiatement la voix de Lucas et le repère rapidement devant le panneau d’affichage des arrivées.

— Ça fait trop plaisir de vous voir ici ! s’écrie-t-il.

— Ouais pareil ! Je me souvenais plus que t’étais mignon comme ça, ajouté-je pour le taquiner.

— Dis pas ça, sinon je risque de retomber amoureux !

Nous franchissons les grandes portes vitrées de la gare et sommes aveuglés par un soleil brûlant, qui se réfléchit sur le parvis et le chauffe à blanc. Le ciel est d’un bleu profond, resplendissant, et un vent sec me caresse les cheveux. Je dépose un instant mon sac de voyage et prends une grande inspiration satisfaite, entouré de mes deux amis.

~ FIN ~

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