Chapitre 2. Curiosité féline
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Le roi des changeformes est celui qui parvient à enterrer en lui le plus d'animaux sans voir sa santé mentale être altérée. Il n'est donc – pour la couronne changeforme – pas question d'hérédité ou de choix divin, il est seulement question d'être le meilleur et le plus solide d'entre les siens.
Encyclopédie des espèces surnaturelles, Tome 2.
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Emi poussa les lourdes portes en bois sculpté qui s’ouvrirent dans un grincement. Elle y vit un grave signe annonciateur. Il n’était pourtant plus temps de reculer. Tous les regards convergèrent vers elle et Emi eut l'irrépressible envie de se recroqueviller. Cependant la présence de son frère auprès d’elle la réconforta face à cette attention inopportune.
Elle les défia tous du regard – ils étaient plus nombreux qu’elle l’avait cru au premier abord – et avança en observant discrètement son environnement alors que les talons de ses chaussures claquaient dans le silence.
Une vaste salle de bal. Voilà à quoi cela ressemblait, conjectura-t-elle pour détourner son esprit de ce qui l’entourait. La pièce était ceinturée de colonnes élégamment cannelées. D’ordre corinthien, ces dernières voyaient leur chapiteau orné dans les règles de l’art, de décors floraux. Ces colonnades ouvraient les regards sur de grandes fenêtres qui dispensaient à la pièce la lumière couchante du soleil. Cette douce lueur rosée faisait luire les feuilles d’or appliquées sur la pierre blanchie. Au fond de la vaste pièce s’étendait un buffet qu’en d’autres circonstances elle n’aurait pas hésité à qualifier d’appétissant. Des mets d’origines diverses répandaient leurs fumets odorants à travers la salle et firent se contracter le ventre d’Emi. Bien qu’elle fût plutôt une bonne mangeuse, elle sentait qu’elle ne toucherait pas à ce magnifique buffet mis à disposition des invités. Elle n’était pas sûre que son estomac le lui permettrait.
Quand son talon droit glissa et manqua de la faire disgracieusement trébucher, Emi baissa les yeux sur le sol et constata qu’il était carrelé en damier et brillait, certainement d’avoir été astiqué avec le plus grand soin. La pièce était toute en longueur et donnait, sans avoir à lever le nez, un aperçu de son plafond haut peint à la main. Bien qu’elle aurait aimé les découvrir dans d’autre circonstances, elle admira les proportions et la décoration des lieux à leur juste valeur.
Emi s’approcha d’une des fenêtres et vit en contrebas une forêt de sapins enneigés s’étendre sur plusieurs kilomètres. Elle s’attarda un instant sur cette vue d’un calme apaisant. Mais cette accalmie ne fut pas de longue durée, parce que son père la rejoignit et se fit fort de l’en éloigner afin d’entamer les présentations.
Elle écouta et salua respectueusement, mais se fit fort de ne retenir aucun nom et aucun visage. Si bien qu’après près d’une heure, elle fut prise d’une envie folle de bailler. Décidemment, elle n’avait rien à faire là et avait hâte de partir pour ne plus jamais avoir à revenir.
Heureusement, dans cette foule inhospitalière qui ne lui avait ouvert les bras qu’à contrecœur, Emi croisa un regard connu. Celui de Maxime, son chef de clan et ami. Elle fut assez étonnée de le trouver là, lui qui se soustrayait plus souvent qu’à son tour à ces réunions. Mais, loin de s’en plaindre, elle se saisie de cette occasion pour s'esquiver. Tout plutôt que de poursuivre sa discussion avec cette sorcière proprement démoniaque qui n'avait que le mot « race » à la bouche, en compagnie de laquelle son père l’avait laissée.
C'était quand même incroyable qu'après tout ce qui était advenu à la Communauté, il soit encore possible de parler avec tant de légèreté de prétendues races inférieureset supérieures.
Heureusement que cette femme pédante et pétrie de hautsprincipes n'avait pas véritablement réclamé l’opinion d’Emi sur la question. Parce qu'elle ne croyait pas qu'elle aurait pu se retenir de répliquer qu'après tout ce qu'ils avaient fait, les sorciers ne pouvaient prétendre au haut du panier. Pas quand on savait qu’ils avaient été responsables du massacre et de la quasi-extinction de changeformes, thérianthropes et vampires. Pour une race prétendument supérieure, les sorciers avaient fait preuve de la plus grande irresponsabilité. Comment assurer la survie de la Communauté en tuant des surnats par milliers ? Cela n’avait aucun sens. Même un vain sentiment de prééminence ne justifiait pas ces actes. Quand on était roi, il fallait bien des sujets desquels être obéis, n’est-ce-pas ? Dominer un royaume dépeuplé était pour le moins futile.
Emi s’était toujours demandé comment tant de sorciers avaient pu adhérer à une telle idéologie professée par quelques débris malintentionnés. Quelque part, elle avait une réponse. L’idiotie. Qu’est-ce qui raisonnerait autrement un tel sentiment de supériorité ? Les sorciers étaient indéniablement les dignes héritiers d’Hécate, terriblement égocentriques…
Qui aurait pu suspecter, trois siècles plus tôt, qu’il faudrait avoir honte d’appartenir à cette espèce ? Si Emilia se rengorgeait encore visiblement d’être qui elle était, Emi en était pour sa part plus embarrassée qu’autre chose. Plus encore, en présence des changeformes, thérianthropes et vampires. L’idée même du sang qui avait été versé l’écœurait.
Comment pouvait-on laisser des êtres aussi malveillants que cette Emilia Trucmuchepolluer l’air de leurs inepties et participer à laisser fleurir la haine si peu de temps après le massacre ? Pour Emi, peu importait à quel point sa magie était supérieureà celle de tous les autres, cela n’avait apparemment pas rendu son espèce meilleure.
Et puis, les Wakahisa n’étaient pas des modèles du genre sorcier, puisqu’ils étaient eux-mêmes des sangs mêlés. Ils étaient un beau mélange de l’ancienne génération, incarnée par les valeurs surannées de la branche maternelle de leur lignée et de la nouvelle génération, plus calculatrice et libérée du carcan des règles édictées depuis si longtemps par la Communauté.
— Je vois que tu as fait la connaissance d'Emilia, une femme vraiment charmante, s'amusa Maxime une fois qu'Emi l'eut rejoint.
Emi concentra toute son attention sur son interlocuteur. Maxime n’avait pas l’air à l’aise, à sa place.
— Tu n'aurais pas dû venir, tu sais ?
— Je sais bien, mais comment aurais-je pu passer à côté de l'entrée dans le monde de la troisième née Wakahisa ?
Elle se pencha vers lui et murmura :
— Ce n'est pas parce que tu es l'ami d’Ibuki que tu as à subir ce type de réunions. Je sais à quel point tu les détestes.
— Alors même que tu es sa sœur préférée ?
Ibuki, son aîné de six ans, était certainement le frère préféré d’Emi. Le moins envahissant, habituellement. Celui qui la comprenait le mieux, qui comprenait le mieux son besoin d’indépendance. Ce qui n’expliquait pas qu’il ait, si évidemment, envoyé son ami à sa rescousse. Elle n’avait décidemment pas besoin de protection.
— Sa sœur préférée, je ne sais pas, mais très certainement la seule.
Maxime secoua la tête, remuant ses boucles qui tiraient étrangement du noir le plus profond au rouge le plus intense. Elles captaient de façon fascinante la lumière tamisée des lieux.
— Tu sais bien que je mets un point d'honneur à assister à la présentation de tous les membres de mon clan qui en ont le privilège.
Parce qu’il leur fallait bien un allié dans ces eaux troubles…
Un allié particulièrement féroce, se fit-elle la réflexion, en observant plus attentivement Maxime. Il avait des allures de démon avec ses bottes, son pantalon en cuir moulant et ses yeux d’obsidienne impénétrables. Sans parler de ce regard attentif et féroce qu’il posait fréquemment autour de lui. Oh oui, il était pour le moins effrayant. Au point que si elle ne le connaissait pas si bien, elle aurait pu croire que c’était de lui qu’elle ferait mieux de se protéger.
Elle était vraiment étonnée qu’il ait fait le déplacement pour elle, considérant le mépris qu’il éprouvait pour ces évènements mondains. Bien qu’il ne s’en cache pas, toutes les portes lui restaient ouvertes. Peu importait à quel point sa tenue était inconvenante et son comportement sauvagement et honteusement plus proche de celui des changeformes et thérianthropes que du sorcier qu’il était.
Emi posa une main hésitante sur l'épaule de son ami.
— Tu es un bon chef, Maxime. T'en abstenir n'y changerait rien.
Il répondit à ses préoccupations d'un sourire de travers. Honnête, mais de travers. Il ne fit pas mine de se dégager de son contact, non plus. Pourtant elle savait qu'en plus de détester se trouver au milieu d'une foule, il répugnait également à tout contact. Son regard noir convainquait même les plus hardis de ne pas trop l'approcher. Non pas qu'Emi se considérât comme particulièrement courageuse, simplement elle avait la chance de faire partie des quelques personnes dont il tolérait les attentions. Insigne privilège dû à son statut de cadette d’Ibuki, qu’il considérait comme son frère de cœur. Il l’a considérait donc comme sa petite-sœur.
— Tu ne me feras pas dire que m'occuper un peu de toi est une corvée. Je t'aime bien, n'en déplaise à tes bien trop nombreux frères protecteurs.
Sur le ton de la confidence, il poursuivit :
— Si tu n'as jamais été menacée par un gamin de seize ans haut comme quelques pommes, tu ne peux pas comprendre comment je me suis senti face à un Daiki aussi menaçant qu'un chat tout hérissé d'être tombé dans une cuvette de toilettes.
Son plus jeune frère, avait été bien hardi de s’attaquer à un si gros morceau. Cependant, Emi se sentie rassurée de savoir Maxime bien trop gentil pour lui en avoir tenu rigueur. Il avait dû se contenter d’hocher sagement la tête et de le repousser de son bureau sans la moindre récrimination ou le moindre rappel à la sacrosainte hiérarchie du clan.
Elle imaginait bien son petit-frère débouler chez Maxime, sans même s’être annoncé ou avoir frappé à la porte et proférer des menaces pour le moins infondées, la voix fébrile et le menton courageusement relevé. Emi sentit son cœur se serrer à cette seule image. Comment ne pas succomber à cette preuve d’amour fraternel ? C’était particulièrement idiot, mais touchant, également.
— Je vois qu'on se moque de ma famille, Maxime. Mais qui vois-je... ma chère sœur, coupable de collusion ? Mon ami, je ne croyais pas te trouver en si mauvaise compagnie ! Tu ferais bien de mieux choisir tes fréquentations.
Emi grogna pour toute réponse et Maxime se garda bien de répliquer.
Voilà bien un frère qu’elle n’avait pas la moindre envie de câliner. Était-ce sa propre façon d’exprimer son amour fraternel ? Elle en doutait parfois. Emi se retourna en soupirant intérieurement pour croiser les yeux bruns rieurs de son frère. Oui, certainement, c’était là un signe d’affection, sinon il n’aurait pas l’air aussi fier de son bon mot.
Les yeux de Maxime firent la navette entre Emi et Aki. Considérantson sourire railleur, la jeune sorcière devina qu'il s'apprêtait à lancer, à Emi ou à sa famille, des pots entiers de fleurs.
— Je ne sais pas pourquoi j'adore cette famille, mais c'est le cas.
— Parce que nous sommes adorables, proposa Aki avec une moue qu'il devait, de fait, considérer comme adorable.
— Je dirais plutôt étranges.
Le visage d'Aki se transforma si diamétralement à ces mots, que c'en était à pouffer de rire. Emi succomba au ridicule de la situation, même si elle dissimula son grand sourire derrière sa main.
— Étranges ? Sérieusement, tu ne peux pas faire mieux que ça ? Étranges sonne comme bizarres, anormaux. Nous ne sommes certainement pas si ... pathétiques, assura Aki, avec une moue assez férocement indignée.
Maxime se garda bien, une nouvelle fois, de répliquer à ce monologue déconcertant du sorcier le plus mélodramatique de son clan. Homme intelligent. Cependant, Emi vit à sa posture et à la tension qui avait disparue de ses épaules que sa crispation s'était envolée. Et ce, grâce à leur seule présence et leurs pitoyables tentatives d’humour et de taquineries. Un petit sourire en coin avait même fleuri à la commissure de ses lèvres. Lui qui détestait ces rassemblements et qui avait toujours l'air d'être sur le point de s'enfuir, était à présent aussi détendu que cela était possible, entouré de tant de regards scrutateurs.
C'était l'effet qu'ils faisaient. Les enfants Wakahisa, quand ils étaient ensembles, amusaient toujours tout le monde, que ce soit avec eux ou à leur dépends. Emi pensait que cela tenait surtout à l’amour et à l’affection qui pointaient leur nez derrière leurs échanges parfois houleux. Quoi qu’il en soit, leur anticonformisme la rendait fière. Il était en effet fort mal vu, dans leur société, d’exprimer ou de montrer aux autres ses sentiments, de se toucher ou de discourir autrement qu’avec une extrême froideur et de traiter d’autre chose que de sujets « convenables ». Elle assumait leurs « originalités », puisque c’était ce qui faisait d’eux une véritable famille.
Le silence agréable et amusé qui régnait depuis quelques secondes entre eux fut brusquement troublé. C’en était palpable. Une tension inattendue avait pris place entre eux. La bouche de Maxime se crispa et Aki frissonna brusquement. Si elle devait se fier aux regards fixés sur un point derrière elle, et au souffle chaud dans son cou qui la fit sursauter, ils avaient un « invité ».
Emi se retourna pour croiser la plus belle paire d'yeux noisette qu'elle avait jamais eu l'occasion de croiser. Ils ne tiraient pas seulement sur un orange surnaturel, ils étaient aussi fendus. Comme ceux d'un chat ou d'un serpent. C'était à vrai dire assez fascinant.
Cette caractéristique lui était familière, mais elle ne parvenait pas à la replacer. Elle fût obligée de lever le yeux pour le dévisager. La chaleur qui émanait de son corps la brûla malgré les quelques centimètres qui les séparaient. Son aura était presque agressive, comme si elle s’apprêtait à sortir du grand corps pour se jeter sur Emi. Elle l’écrasait par sa force, poussant sa magie à répliquer et à le provoquer un duel. Sombre perspective.
Au-delà de la prégnante odeur de musc qui lui piqua presque le nez, elle perçut quelques touches de vert. Il sentait la forêt. D'une certaine façon comme Aki qui crapahutait entre les arbres, mais pas tout à fait. Il y avait quelque chose de plus sauvage chez lui. Comme si l'odeur de sève qu'elle sentait venait plutôt du fait qu’il s’était un peu trop fait les griffes sur l'écorce d'arbres. Il sentait la forêt en automne. Et à présent, il était indéniable que c’était sur elle que ce félin se faisait les griffes. Parce qu’elle sentait son pelage l’effleurer, même si jamais leurs corps n’entrèrent en contact.
Il se pencha vers elle, si bien que ses cheveux légèrement longs frôlèrent son front. L’impression que ce doux contact laissa derrière lui l’informa sur l’identité de son vis-à-vis. Elle avait cru être caressée par un plumage soyeux. Incongru pour un félin. Mais il n’était pas un félin, du moins pas seulement.
Un changeforme.
Comme inconscient de la révélation qui fit jour dans son esprit, il leva la main pour la poser sur la joue d’Emi.
Elle put sentir simultanément, comme une caresse contre sa peau, le pelage de son félin, la viscosité des écailles de son reptile et les plumes délicates, mais fortes, de son rapace. Oh oui, indéniablement un changeforme.
Bien que le touché ait été délicat, il la réveilla de son immobilisme scrutateur et lui fit prendre conscience de la situation. Elle recula d’un pas et s’éloigna de son contact. Il n’avait pas le droit de la toucher ainsi. D’autant qu’ils se trouvaient au milieu d’une pièce bruyante, à côté de son chef de clan et d’un de ses frères. Ce n’était pas parce qu’il était le roi de son espèce, qu’il pouvait se permettre une telle incivilité publique.
Parce que oui, il n’était pas n’importe quel changeforme, il était leur roi. Raphaël.
Lui-même sembla prendre conscience de ce qu’il avait fait et leva les yeux vers Maxime, dont le regard s’était considérablement assombri. Il était très visiblement mécontent.
— Maxime ! Heureux de te revoir. Cela faisait longtemps qu’on ne t’avait pas vu par ici.
Bien qu’elle soit énervée par son comportement, Emi ne parvint pas à détourner son regard de l’aura de Raphaël qui semblait toujours irrésistiblement appeler la sienne. Et ce malgré le regard mécontent dont les couvait son frère. Elle ne fit donc pas attention à la discussion qu’ils entretinrent.
Absorbée par la profondeur de son regard et de son aura, elle n’avait que peu prêté attention à sa personne. Pourtant sa chemise d'un rouge intense appelait les regards. Ses yeux étranges étaient frangés de longs cils châtains et à moitiés dissimulés derrière les boucles désordonnées qui formaient un nid emmêlé sur son crâne. La cicatrice qui s'étendait de son œil gauche au dessous de son oreille ne gâchait en rien l’aura de menace qui l’entourait. Elle avait beau être assez disgracieuse, avec son tissu boursoufflé et la façon dont elle étirait la peau de sa joue, elle donnait à ses traits, plutôt classiques, une étincelle qu'il ne posséderait pas autrement. Associée à ses yeux étranges, il n'en était rendu que plus saisissant. Elle qui avait trouvé Maxime menaçant… Àcôté du changeforme, il semblait presque aussi inoffensif qu’un chaton.
Emi détourna le regard en prenant conscience du temps affreusement long qu'avait pris son examen. Il n'était pas dans son habitude de fixer si impudemment un inconnu. Enfin, inconnu, il ne l’était pour personne. Tout le monde savait qui il était. Et tout le monde savait également qu’il était bien plus animal qu'homme. La curiosité féline qui l’avait poussé à la toucher ne le démentait pas. À coup sûr, il avait voulu examiner ses étonnants yeux bleus, reflet de son pouvoir d’Eau. Là où un homme aurait respecté son intimité, l’animal s’était laissé guidé par son instinct.
— … et toi, que fais-tu là ?
Emi reprit ici le cours de la conversation et attendit avec intérêt la réponse du changeforme.
— Je suis ici pour des raisons professionnelles. Je ne suis pas du genre à perdre du temps dans ce genre d’endroits, alors que j’ai déjà tant à faire.
Effectivement, personne n’ignorait que sa cour était bouleversée par une série de meurtres. Il devait être bien occupé à tenter de déjouer le complot dont il faisait très certainement l’objet. Parce que de persistantes rumeurs soufflaient qu’il s’agissait là d’une rébellion.
— Tu viens chercher des alliés ? l’interrogea Maxime, sans faire semblant d’être étonné.
— Pourquoi ? Tu te proposes ?
Raphaël avait dit cela sous le sceau de la plaisanterie, mais dans son regard avait brillé un sincère espoir. Sitôt dit, il reprit ses airs neutres.
— Pourquoi pas ?
Ils en discuteraient probablement plus tard. Ce n’était ni l’heure, ni le lieu pour parler de choses si délicates.
Il ne venait pas concrètement pour sceller des alliances, mais plutôt pour faire le premier pas dans cette direction, pour accoster des clans. Une manœuvre de séduction, en quelque sorte. Si Emi avait appris une vertu de son père, c’était la patience. Dans les relations internationales, elle devait être le maître mot. Ne jamais se précipiter, respecter les étapes.
Raphaël recula d’un pas et hocha la tête en direction de Maxime puis d’Aki, qu’il avait pratiquement totalement ignoré durant la discussion. Avant de se détourner, il rencontra brièvement le regard d’Emi.
Elle le trouva toujours aussi curieux. Elle eut la vive impression que ce ne serait pas la dernière fois qu’elle le verrait. Emi ne savait pas trop si elle devait s’en inquiéter ou non.
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