21. SARAH :
Depuis quelques jours, la vie reprenait son fil habituel.
Alex avait repris ses ballades sur la plage, hésitant toujours à s’approcher de sa maison d’enfance, et écoutant toujours les histoires d’Elise.
Elise qui écrivait plus que jamais, les pieds dans l’eau jusqu’à qu’ils soient tout fripés et ridés, ce qui faisait rire Tess.
Tess continuait à venir écouter si les vagues lui apportaient à nouveau la voix de son papa et rendait plusieurs fois par jour visite à Arwen.
Arwen avait repris ses occupations normalement et rendait souvent, le soir, visite à Lorenna.
Lorenna continuait à avoir peur de l’avenir. Et elle ne connaissait pas Sarah.
Sarah la plus tranquille des pensionnaires de l’hôtel.
Elle occupait la chambre Angeline depuis un an et ses rêves étaient toujours des cauchemars. L’air lui faisait du bien. Elle sortait tôt le matin, au moment où la brume planait encore au-dessus des vagues. L’air était frais et lui picotait les narines.
Si le matin de bonne heure vous passiez sur la plage d’Anaïta et vous aperceviez une femme emmitouflée dans un gros pull blanc se frottant le nez en souriant, vous aviez rencontré Sarah.
Donc l’air lui piquait les narines mais elle aimait cette sensation d’être seule au monde. Elle ne pensait à rien, le vent nettoyait son esprit de toutes pensées et elle ne ressentait que le bien être. Le sable était froid, un peu humide et formait toujours des petits monticules entre ses doigts de pieds. Elle rentrait ensuite à l’hôtel Jonas où Arwen lui avait préparé son petit-déjeuner. Du café, toujours accompagné de pain grillé au four, dont l’odeur la rendait d’humeur joyeuse.
Les deux femmes ne se parlaient pas mais toutes les deux appréciaient ce moment privilégié de tranquillité et d’intimité. Arwen aimait regarder Sarah manger délicatement ses tartines beurrées et croustillantes, parfois elle trempait le pain dans son café qui ressortait dégoulinant et tout mou. Elle faisait bien attention à ne pas à en mettre partout pendant le trajet de la tasse à sa bouche.
Le petit-déjeuner de Sarah avait manqué à Arwen. Elle était venue parfois la voir quand elle était convalescente, après avoir frappé à la porte elle passait sa tête par l’entrebâillement et lui souriait. Elle ne disait rien et lui faisait un clin d’œil, jamais elle n’était entrée. Arwen n’avait jamais entendu le son de la voix de Sarah, personne à Anaïta ne l’avait entendu d’ailleurs. Elle s’était posé la question, était-elle muette ? Elle pensait que non, elle était persuadée que le jour où Sarah se déciderait à parler, les mots qui sortirait de ses lèvres, elle ne pourrait jamais les oublier.
Puis Sarah remontait dans sa chambre et n’en sortait plus qu’aux heures de repas. Parfois elle faisait une dernière promenade le soir après le dîner puis rentrait appréhendant de s’endormir, ses rêves étant toujours de mauvais rêves. Ainsi se passait la journée de Sarah.
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