Elizabeth

Le professeur démarre sans avoir remarqué la présence de Jason. Il faut dire qu’avec l’obscurité et le froid, peu de monde déambule dans les rues. D’ailleurs, je ne sais pas ce qu’il faisait là. Est-ce qu’il m’a suivi ? Peut-être qu’il se doutait de quelque chose et voulait savoir ce que je cachais.

Je reste silencieuse durant tout le trajet et le professeur ne remarque rien jusqu’à ce que nous arrivions chez moi. Je n’arrête pas de penser au visage de Jason et à me demander ce qui va se passer ensuite.

- Quelque chose ne va pas ? demande Timothy inquiet.

- Jason nous a vu nous embrasser dans la voiture. Il était là professeur… je veux dire Timy, je panique.

Il fronce les sourcils en se crispant sur son siège. Mon amant réfléchit un certain temps avant de reprendre contenance.

- Prends des affaires que tu laisseras chez moi, nous discuterons de ça tout à l’heure, déclare-t-il sûr de lui.

Je ne réponds pas et je file chercher des affaires dans mon studio. Je n’ai pas le temps de me réjouir de cette situation. En quelques minutes, j’ai pris des vêtements, des affaires de toilettes et des sous-vêtements que j’ai fourrés dans un sac.

Je redescends en vitesse pour revenir à la voiture. Il démarre en trombe sans me jeter un coup d’œil. Le professeur semble vraiment perturbé mais quelque chose me dit que ce n’est pas uniquement à cause de Jason.

Nous arrivons en un temps record à l’appartement de Timothy. Je dépose mes affaires à l’entrée. L’enseignant ne parle toujours pas et m’indique de le suivre dans la chambre. Il me montre le côté du dressing libre pour que je range mes vêtements.

- Cet appartement a été aménagé pour une famille, c’est pour ça que c'est si grand, explique-t-il sans grande conviction.

Il sort de la pièce pour se diriger dans ce qui semble être un bureau. Ensuite, je le suis jusqu’au salon où il est train de sortir deux verres pour y verser du whisky.

Il s’assoit sur le canapé et je prends place à ses côtés. J’attends qu’il me parle de Jason parce que je ne sais pas quoi ajouter d’autre.

- Est-ce que tu te souviens de Nancy Rathbone ? demande-t-il.

- Bien sûr, je réponds plutôt surprise par cette question.

- Natasha une ancienne conquête et elle se sont alliés contre moi pour me faire payer de les avoir laisser tomber, commence-t-il avec difficulté. Je dois leur verser cinquante mille livres à chacune pour réparer leur cœur brisé.

Je bois une gorgé pour me donner du courage. Ce qu’il est en train de me révéler ne va pas me plaire. Il se tourne vers moi l’air contrit.

- Je reconnais mes torts envers elles mais leur comportement est tout de même disproportionné. J’ai pris la décision de leur donné ce qu’elles veulent pour te protéger. Une fois qu’elles auront leur argent, elles ne m’embêteront plus. Dans le cas contraire, elles risquent de découvrir la vérité sur nous. Je sais qu’elles sont prêtes à tout pour détruire ma vie.

Timothy repose le verre vide sur la table basse.

- Mais Nancy ne se doute vraiment de rien ? je questionne angoissée.

- Si tu fais référence à ce qu’elle a dit le jour de votre première rencontre, il ne faut pas t’en faire. Elle a juste dit ça pour m’énerver et exposer mes préférences féminines au groupe. Toutefois, c’est une femme plus dangereuse que Natasha.

Je me renfrogne dans mon siège en finissant mon verre. Ma tête tourne un peu mais je me concentre pour garder les idées claires.

- Je vais m’occuper de Jason, j’affirme en prenant sortant le téléphone de ma poche. Occupe-toi de ces femmes et je ferais de même pour lui.

Je déverrouille l’écran lorsque Timothy pose une main sur mon bras. Il me regarde avec intensité avec des émotions à la fois tristes et joyeuses. Il dépose ensuite un baiser sur ma joue en signe d’encouragement.

- Je suis tellement heureux d’être avec une femme comme toi et je comprends que Wright veuille sortir avec toi.

- Comment ça ? je l’interroge interloquée.

- J’ai bien vu comment il te regardait et ça me rendait fou, avoue le professeur. Mais je ne peux pas lui reprocher d’avoir des gouts particulièrement soignés.

Je suis heureuse d’entendre ça de la bouche de l’homme que j’aime. Il se lève pour laver les verres tandis que j’envoie un SMS à Jason.

Salut, j’aimerais te donner des explications sur ce que tu as vu ce soir. Je te promets de te dire la vérité.

A peine ai-je envoyé le message que je reçois une réponse. Je retiens mon souffle avant de regarder.

Demain pour le déjeuner devant le bâtiment de sciences.

C’est une réponse très froide mais au moins il a donné une réponse qui allait dans mon sens. Je vais tout faire pour qu’il ne révèle rien à l’administration et pour ça je ne vais pas devoir lui mentir.

- Je m’occuperais d’envoyer l’argent dès demain pour être tranquille, me confie Timothy en retirant sa veste de costume. Natasha m’a déjà donné les deux numéros de compte.

Je vois bien que cette situation ne l’enchante pas mais je suis contente qu’il fasse ça pour ne pas éveiller les soupçons sur notre relation. Je vais devoir parler de Jason à Cassidy en omettant le chantage que subit le professeur.

Je me lève pour aller dans la cuisine tant qu’il est parti se changer. J’ouvre le frigo et quelques placards mais ils sont tous pratiquement vides. Je me demande bien comment il fait pour manger le soir avec aussi peu de choses.

Lorsqu’il revient habillé d’un pull en laine et d’un pantalon décontracté, je l’interpelle :

- Quels repas prépares-tu d’habitude ? Il n’y pas grand-chose à mange dans cette cuisine.

- Je passe souvent chez des traiteurs où je commande des plats diététiques tout prêt, explique-t-il sans prétention.

Si j’avais autant d’argent à dépenser dans la nourriture, je me serais fait des plats délicieux au lieu d’acheter de mets déjà tout prêt.

- J’ai remarqué qu’il y a une épicerie à deux rues de l’immeuble. Que dis tu d’y aller faire un tour pour s’acheter de quoi préparer à manger ?

- C’est une très bonne idée, s’exclame-t-il heureux que nous faisons des activités ensemble.

Il me confie un cabas puis nous prenons nos manteaux pour nous rendre à la superette à pied. Nous avons retrouvé notre bonne humeur sur le trajet et je suis heureuse de tenir la main de l’homme que j’aime sans risques.

Une fois arrivée, je me précipite dans les légumes. Il n’y a pas énormément de choses puisque l’établissement est petit mais il y a quand même de quoi faire de bons repas. Un plat français que nous avions vu en classe au lycée me revient en mémoire. Je prends des pommes de terre, du lait, du fromage râpé ainsi que des biscottes pour faire la gratiné.

- Tu es sûre que c’est tout ce que tu souhaites ? demande-t-il en sortant sa MasterCard Gold.

- Oui, je vais te faire une surprise ! je m’exclame avec malice.

Nous payons puis nous repartons vers l’immeuble. Le hall d’entrée est sobre mais très luxueux avec plusieurs plantes et des colonnes en marbre.

Arrivée en cuisine, je fouille dans les placards pour chercher les ustensiles qu’il me faut. Il a vraiment un matériel culinaire de qualité supérieure donc c’est vraiment dommage qu’il cuisine rarement avec. La moindre casserole doit coûter plus de deux cent livres.

Je commence vraiment à avoir faim alors je me dépêche de terminer la recette. Le professeur m’aide à couper les pommes de terre mais ne voit pas quel plat je prépare. Une fois la gratin mis au four, nous mettons la table.

- Félicitations, nous venons de préparer un gratin dauphinois, je prononce avec un bon accent français.

- Je ne connais pas ce plat français mais il a l’air très bon, me complimente Timothy.

L’alcool n’est pas encore parti de mon corps mais je me sens de meilleure humeur. Malheureusement dès que je m’assois dans le canapé, ma tête recommence à tourner.

- Je suis désolé, je n’aurais pas dû te donner de l’alcool fort, s’excuse mon amant. J’étais trop perturbé par cette histoire et je n’ai pas fait attention.

- C’est parce que je n’ai pas encore mangé, je déclare.

Il est vingt heures passé lorsque le four sonne. Timothy prend l’initiative de sortir le gratin pour le laisser refroidir.

Je me repose quelques minutes avant de rejoindre mon professeur à table. Il semble vraiment ravi du goût et ne cesse de me remercier d’avoir eu l’idée de faire ce plat.

Je suis vraiment aux anges. Je suis tellement heureuse de partager ce genre de moment avec l’homme que j’aime. Je profite de sa compagnie car demain je vais devoir affronter Jason. Je ne préfère pas faire des scènes dans ma tête. Ce soir, il n’y a que Timothy Grayson qui existe.