Elizabeth

Lorsque mes parents se sont couchés, je sors lentement de ma chambre en essayant de ne pas faire craquer le parquet. Sa vieillesse ne joue pas en ma faveur et il laisse échapper quelques grincements.

J’ouvre puis je referme précipitamment la porte de la chambre d’ami. J’entends Timy se retourner en faisant craquer le bois du lit.

- Elizabeth ?

- Désolée de te réveiller, je chuchote.

Sur la pointe des pieds, je franchis la distance entre la porte et le lit. Je me glisse entre les draps chauds, près de celui que j’aime. Je me blottis contre son corps et ses bras m’accueillent avec amour.

- J’espère que mes parents ne s’imaginent pas que je suis encore vierge, je me confie.

- Ils pensent que tu es encore une petite fille et ils veulent te protéger.

- Me protéger de quoi ? Tu ne vas pas me violer dans mon sommeil quand même !

- Tes parents ne veulent pas que je sois tenté par ton corps parfait, me rassure-t-il. Et puis n’oublie pas que tu as dix-huit ans.

- Mais plus pour longtemps puisque je suis née en février, je réplique en me serrant toujours plus contre lui.

- Je sais que tu es plus mature que ça parce que tu as sauté deux classes. Mais pour tes parents tu resteras toujours leur petite fille chérie qu’il faut protéger.

Je l’embrasse sur la bouche puis je me repose contre son épaule. Maintenant que nous pouvons être ensemble, je ne vais pas le laisser dormir seul. Peut-être qu’au fond de moi, j’ai peur que tout cela ne soit qu’un rêve. Dans tous les cas, je ne souhaite pas lâcher l’homme que j’aime. Je veux passer chaque nuit de ma vie dans ses bras.

***

La veille du 25 décembre, nous nous retrouvons tous les quatre autour d’une magnifique table bien décorée. Nous avons passé la journée à tout préparer pour ce soir. Nous sommes enfin heureux du résultat.

Ma mère a préparé une dinde rôtie qui provient d’un éleveur du coin. Tous les légumes viennent de notre potager et la buche de Noël au chocolat a été réalisée par la maitresse de maison.

Quant à moi, je me suis occupée de la décoration de la table. Mon père a installé les dernières illuminations dans le salon et éclairé le sapin. Timy a appris à faire la cuisine auprès de ma mère. Il est le pire cuisinier que je connaisse mais au moins, il fait un effort pour s’améliorer.

L’homme que j’aime a suivi mes indications en matière de mode. Il porte un jean avec une chemise blanche et ses sneakers en cuir. Le costume et les lunettes lui donne une allure beaucoup plus imposante alors je comprends qu’il s’habille ainsi pour donner des cours.

Je compte profiter de cette soirée dans la bonne humeur pour avouer à mes parents notre départ dans une nouvelle ville. Cassidy n’est pas encore au courant et j’ai peur de le lui avouer.

- Nous avons une nouvelle à vous annoncer, je commence en tenant la main de Timy sous la table.

- Mon Dieu, ne me dis pas que tu es enceinte ! s’exclame ma mère en tapant du point sur la table.

- Maman ! je m’écris.

- Nous allons juste déménager à Oxford, reprend Timy. Elizabeth s’inscrira pour son master dans l’université de la ville.

- Nous devons nous éloigner de Cambridge si nous ne voulons pas qu’un scandale éclate, je complète. Je suis sûre que tout se passera bien pour moi et pour Timothy dans cette nouvelle ville.

- De toute façon vous n’avez pas le choix, conclu ma mère en soupirant. Heureusement que tu restes en Angleterre Elizabeth. Je ne supporterais pas te voir partir à l’autre bout du monde.

- Je suis une adulte maman, je suis capable de faire des choix.

Ma mère jette un coup d’œil à mon petit ami. Je donnerais cher pour savoir ce qu’elle pense à ce moment-là.

- Je compte sur vous Timothy pour prendre soin de notre fille, dit-elle avec sévérité. Vous êtes plus âgé qu’elle alors vous n’avez pas d’excuse.

- Sinon gare à vous, plaisante mon père en se servant une nouvelle coupe de vin.

- Ne commence pas à enchainer les verres, lui reproche ma mère en s’emparant de la bouteille. Laisses-en pour nous aussi.

- Nous avons de très bonnes caves à vin, explique mon père. Hélas, ils ne pourront jamais concurrencer les vignobles français.

- C’est normal, les vins français sont exquis, je m’exclame. Nous en avons gouté plusieurs lors d’une sortie avec la prof de français, alors je sais de quoi je parle.

Mon père se renfrogne dans sa chaise. Ma mère ramène les entrées puis apporte la dinde sur la table. Elle est énorme et Timy semble impressionné par le résultat. L’odeur qui s’échappe du plat me donne envie de tout avaler d’un coup. Je me rends compte à quel point la cuisine de ma mère m’avait manqué.

Nous mangeons le désert en silence tellement c’est délicieux. Timy se ressert une part de buche sous le regard pétillant de ma mère. Finalement, elle apprécie beaucoup monsieur Grayson. Bien loin du tumulte de la ville, mes parents oublient rapidement qu’il a été mon professeur à l’université.

- Il est l’heure d’ouvrir les cadeaux, s’exclame joyeusement ma mère en quittant la table.

Mon père l’aide à prendre les paquets cachés dans les placards. Ils posent tout sur la table vide heureux de nous voir les ouvrir. Ma mère donne un énorme paquet rectangulaire à Timy.

- C’est un panier comportant des produits artisanaux de la région, explique ma mère une fois les emballages déchirés. Elizabeth a pensé à un livre de cuisine, comme ça vous n’aurait pas d’excuse pour ne pas faire à manger.

- Je vous remercie beaucoup pour cette attention, réponds-t-il en souriant.

Il se lève pour aller chercher un cabas laissé dans la chambre d’ami. Je sais que ce sont des bouteilles de vins qui coutent une fortune. Mon père qui est un connaisseur est surpris avant de remercier chaleureusement mon petit ami pour ce cadeau.

- Voilà pour toi Elizabeth, reprend Timy en me donnant une poche Valentino.

- Cette robe est magnifique ! je m’exclame en lui sautant au cou.

Mes parents semblent un peu gênés par cette attention. Ma mère me donne un énorme paquet qui pèse assez lourd.

- C’est l’un des ordinateurs portables les plus performants, explique mon père. Le vendeur a dit qu’il était parfait pour les étudiants.

- Merci beaucoup, ça me fait très plaisir, je réplique sincèrement en les embrassant.

Cette journée de Noël se finit plutôt bien et je vais encore une fois m’endormir dans les bras de mon Timothy.

- Elizabeth ! appelle ma mère en me voyant sur le pas de la porte de la chambre d’ami.

- Ne recommence pas avec ça. Je veux juste dormir avec mon petit ami, je grogne. De toute façon, tu sais très bien que nous couchons ensemble.

- Je ne vais pas te sermonner pour ça mais j’espère que tu te protèges, grimace ma mère avant de disparaitre dans sa chambre.

Je me glisse dans celle de Timy puis je le rejoins dans les draps.

- Tu viens vraiment de dire ça à ta mère ? Je ne vous connaissais pas si rebelle mademoiselle Davinson, rit mon petit ami.

Nous rions sous les draps pour ne pas que mes parents nous entendent. C’est la meilleure réplique que j’ai sorti à ma mère depuis ma naissance.

Je suis tellement bien depuis que j’ai rencontré Timy que je me sens pousser des ailes. Nous allons enfin construire quelque chose ensemble.