Après la mort
"Tu n'as que vingt-deux ans", me disent mes amis pour me rassurer, et, naturellement, j'ajoute : "Et pourtant j'ai déjà réussi à me perdre."
Je trouve dans un vieux journal les traces d'une personne qui avait l'air formidable et que j'aurais voulu rencontrer. Je ne sais pas ce qui l'a tuée. J'aurais voulu connaître l'instant exact pour pouvoir arrêter ce massacre avant qu'il n'arrive, mais j'ai mis des mois, des années à me rendre compte que c'était arrivé. Je vois mes amis et ma famille rester près de moi, à me soutenir, et je me demande ce qu'ils voient dans cette coquille vide, chiante comme la mort, capable seulement de platitudes, angoissée, sans passion, sans avenir. Ils aiment le corps chaud qu'elle a laissé derrière elle, comme s'il était encore relié à l'esprit brisé qu'ils aimaient, avant.
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