Le rite de l'Autre-monde
Après plusieurs heures de sommeil, Aigneas fut réveillée par Fergus tenant une torche à la main.
— Allez, lève-toi, insista-t-il, c’est l’heure de la célébration de Samhain !
Ils quittèrent leurs grottes et rejoignirent des résistants marchant, torches à la main, tel un défilé, la vieille Beira en tête. À l’issue d’une galerie caverneuse, ils firent irruption dans une haute salle formant une coupole rocheuse avec un oculus naturel laissant passer la lumière de la lune. Au centre sur le sol était tracé un triskèle incrusté dans un large cercle, entouré de trois menhirs sur lesquels étaient gravés des motifs circulaires. Tandis que la vieille sorcière s’avançait vers un haut tas de bois au centre, les résistants se disposèrent autour du large cercle. Fascinés et intrigués, Aigneas et Fergus regardèrent Beira qui leva lentement les mains vers l’orifice à travers lequel on voyait la lune. Les résistants lancèrent ensuite leurs torches dans le bûcher et en moins d’une minute un grand feu grandit et illumina toute la salle de sa lumière orangée et chaleureuse. Tandis que les résistants admiraient le brasier, Beira se tourna vers eux et déclara avec une voix grave à l’écho surnaturel :
— Dieux de l’Autre-Monde, nous vous vénérons tel nos ancêtres il y a maintes générations ! En cette nuit de Samhain, notre monde et celui des esprits ne font qu’un ! Ici se termine une saison et en commence une autre ! La lumière s’éteint pour laisser à place l’obscurité ! Puisse le feu nous illuminer et nous protéger des esprits ténébreux !
Fascinée et effrayée, Aigneas avait l’impression qu’une atmosphère étrange et indescriptible avait envahie la caverne et que le temps s’était mystérieusement arrêté. La vieille Beira continuait de faire des gestes rituels et les flammes semblaient danser et émettre des râles fantomatiques en réponse. Tous les résistants admiraient ce spectacle comme si rien d’autre n’existait, c’est pourquoi ils furent tous secoués par un tremblement de terre inattendu. À peine remis de leur surprise, Aigneas et Fergus aperçurent des soldats fascistes accompagnés de Stewards surgir des galeries avoisinantes. N’hésitant pas à ouvrir le feu, ils tuèrent une bonne partie des résistants et les rares qui étaient armés ne tuèrent que quelques fascistes avant d’être abattus. Saisissant un pistolet perdu par un résistant, Fergus invita Aigneas à le suivre et ils s’encoururent dans la même direction que les autres Écossais. En chemin, Aigneas vit Beira étalée sur le sol, du sang s’écoulant de sa poitrine. La jeune fille se précipita vers la vieille sorcière et chercha une lueur de vie dans ses yeux agonisants. Tandis son sang se répandait sur le triskèle tracé au sol, Beira murmura :
— Quiconque interrompt la cérémonie de Samhain ne sera pas à l’abri de la colère du monde des esprits !
Beira expira dans un dernier souffle et Aigneas se mit à la pleurer sa mort. Elle fut arrachée de sa tristesse par Fergus qui la saisit par l’épaule et l’emmena avec lui.
— Ne restons pas ici, insista-t-il en courant, je connais une issue de secours qu’il nous faut gagner au plus vite !
Ils s’engagèrent dans un couloir étroit et Fergus abattit les soldats et Stewards qui étaient à leur trousse. Arrivés dans une petite caverne, le jeune garçon ouvrit une caisse et en sortit une mitraillette Sten qu’il lança à Aigneas.
— La sortie est derrière ces caisses, dit-il en les montrant du doigt, tire sur tous les fascistes qui viennent tandis que je nous dégage un passage !
Tandis qu’il soulevait les lourdes caisses, Aigneas se mit en position près de l’entrée en braquant sa mitraillette. Au moment même où surgissaient deux Stewards, elle tira une courte rafale mais ne put contenir le recul de son arme qui la secoua. Les fascistes ne furent pas touchés mais se mirent à l’abri tandis que les balles ricochaient sur le mur rocheux. L’un d’eux, dissimulé derrière un coin, tira avec son pistolet mais Aigneas évita la balle qui sifflait tout près de son oreille. Elle rispota en tenant mieux son arme et réussit à abattre l’un des deux Stewards. Elle voulut en faire de même avec l’autre mais elle avait beau appuyer sur la gâchette, son chargeur était vide. Fergus l’empoigna et ils se précipitèrent vers la cavité caverneuse qui s’offrait à eux. Après avoir laissé Aigneas y pénétrer en premier, le jeune résistant arma une grenade et la laissa tomber au sol tandis que des soldats accouraient vers eux. La grenade explosa ne laissant pas le temps à ces derniers de fuir, les tuant dans son souffle destructeur. L’onde de choc fit aussi s’écrouler une partie du plafond de la caverne bouchant le trou par lequel Fergus et Aigneas s’étaient enfuis. À cause des parois étroites et rocailleuses, les jeunes résistants avançaient à tâton dans l’obscurité. Au bout du tunnel, Fergus toucha un amas de pierres qui bloquaient le passage et en retira plusieurs rapidement. Il réussit à ouvrir un passage à travers lequel lui et Aigneas purent se faufiler à l’extérieur, à l’air frais de la nuit. Cependant, ils furent accueillis par le capitaine Cromwell en personne et plusieurs soldats qui braquaient leurs armes sur eux.
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