Je sens que les yeux d’Ethan sont posés sur moi. Je ne sais pas pourquoi, mais chaque fois que je le vois, je ressens quelque chose qui me donne des papillons dans le ventre. Peut-être est-ce juste mon imagination ? Mais c’est vrai que depuis la rentrée nous nous rapprochons. Enfin, je crois. Ou je le souhaite. Ou un peu des deux. Je suis là, dans ma chambre à me remémorer toutes ces petites scènes qui me font espérer.

En début d’année, j’étais en retard pour l’école, mais je ne m’en souciais pas plus que cela. Je me promenais avec nonchalance dans le couloir jusqu’à ce que je rencontre un jeune homme avec un sac à dos noir. Je reconnus immédiatement Ethan. Nos yeux se croisèrent brièvement et un léger rictus timide apparut sur nos visages. Un frisson me parcourut le corps et je sentis le monde ralentir autour de nous.

Sans le vouloir, nos épaules se frôlèrent en passant. Nous reculâmes de surprise, nous regardant avec une maladresse qui nous fit sourire tous les deux. Ce ne fut qu’un instant, mais cela suffit à révéler la connexion naissante entre nous. Je savais que ça ne serait pas facile ; après tout, Ethan et moi appartenions à des groupes très différents. Enfin surtout moi qui restais la plupart du temps à l’écart des autres. Mais je me disais qu’en faisant un effort, Ethan pourrait s’intéresser à moi.

La semaine dernière, nous nous trouvions assis côte à côte en cours de mathématiques. Le professeur expliquait une équation complexe tandis que nous nous lancions des coups d’œil furtifs et des sourires énigmatiques.

Alors que l’enseignant récitait sa leçon, nos mains atteignirent simultanément nos crayons. Je ressentis immédiatement une petite décharge électrique, comme un message qui nous encouragerait à nous rapprocher. Nos regards se croisèrent, et quelque chose dans sa réaction indiquait qu’il n’était pas indifférent.

Cependant, avant le moindre échange entre nous, une anecdote sur le thème déclencha des murmures dans la classe. Cela interrompit ce moment envoutant en nous rappelant où nous étions. Cet instant volé s’était estompé, et la magie avait disparu.

Plusieurs situations comme celles-ci se produisirent durant ces deux derniers mois. Est-ce seulement moi ? Ou Ethan ressent-il la même chose ? Malheureusement, mes visions ne me visent jamais directement. Et cela me frustre. Je vais savoir si le chat du voisin va tomber du toit ou si la voiture qui arrive va renverser la poubelle au coin de la rue, mais jamais mon avenir.

Absorbée par mes pensées, je remarque à peine Ethan qui se retourne vers moi. Nous sommes seuls dans le couloir. Nos regards se croisent brièvement avant qu’il ne tourne les talons pour partir sans dire un mot. Mon cœur se serre encore plus fort. Encore une fois, je n’ai pas trouvé la force de lui parler. Je reste là, devant les casiers, solitaire et songeuse. Je suis à la fois en colère contre moi-même parce que je n’ai pas osé lui avouer mes sentiments, et contre lui qui n’a pas fait le premier pas.