Chapitre 2 - La traversée (7)

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Mardi 13 juillet 1965, à bord du France

Aurianne et Koen sont seuls dans la cabine, assis sur le bord du lit, comme deux enfants qui savent qu’ils vont faire une bêtise et qui hésitent. Koen a débandé.

— Tu désires faire l’amour avec moi ? demande la Française.

— Euh… oui.

— En es-tu sûr ?

— Non, et toi ?

— Oui, sinon je ne serais pas restée.

— Pourquoi le désires-tu ?

— La curiosité, sans doute. Frédéric a dit que vous avez des capotes…

Koen en prend une dans la table de nuit et la sort de son emballage pour la montrer à sa partenaire. Ils se couchent sur le lit, la tête sur les oreillers. Ils se caressent mutuellement, Koen est toujours très hésitant, elle lui prend la main et la glisse à l’intérieur de sa culotte ; le futur médecin se remémore des planches anatomiques de la vulve et essaie de repérer les différents organes, à l’aveugle ; il trouve facilement le clitoris et le stimule, elle est surprise, elle l’encourage à continuer pendant qu’elle se défait de sa culotte.

Koen, qui a lu quelques traités, sait que les femmes ont des orgasmes clitoridiens, il continue à la stimuler, puis se met entre ses jambes et tente un cunnilingus ; elle semble très réceptive, gémit, son sexe s’humidifie. Koen insiste jusqu’à ce que le corps d’Aurianne soit secoué par un violent orgasme, avec plusieurs répliques. C’est donc vrai, se dit-il, les femmes jouissent plus intensément que les hommes.

— Ça va ? lui demande-t-il.

— Très bien, répond-elle en riant, tu es moins ignorant que je le pensais, tu n’as vraiment jamais fait l’amour à une femme ?

— Nous sommes allés trouver une prostituée avec Frédéric, mais ce n’était pas glorieux. Je t’assure, je n’ai jamais mis mon pénis dans un vagin.

— Nous allons essayer en Andromaque, couche-toi sur le dos.

La jeune fille prend la queue dans sa main, du liquide s’échappe du méat, elle s’étonne :

— Tu as déjà joui ?

— Non, c’est du liquide pré-éjaculatoire, comme la cyprine chez toi.

Koen bande de nouveau, Aurianne lui donne le préservatif, il le déroule. Elle place ses jambes de chaque côté du corps puis enfonce doucement le membre à l’intérieur de son vagin, ignorant une petite douleur.

Elle chevauche Koen en souriant, elle racontera certainement à Angèle, sa meilleure amie, qu’elle a fait l’amour avec un homme, depuis le temps qu’elle la serinait d’essayer et lui avait donné de nombreux conseils, mais osera-t-elle préciser qu’il était homosexuel ?

Koen pense à l’étrangeté de la situation plus qu’à son plaisir, ça y est, il a réussi, il peut aussi avoir une relation hétérosexuelle. Il se détend, compare les sensations de son pénis dans un vagin à celles dans un rectum. Aurianne accélère ses mouvements, Koen sent le plaisir monter, il laisse échapper des soupirs, encourage sa partenaire, lui indique qu’il va éjaculer.

Koen a un souci, il n’aimerait pas devenir père, il sait qu’il n’est pas stérile. Il tient le préservatif pour éviter toute fuite alors que son érection faiblit et qu’Aurianne libère son membre. Il regarde ensuite son entrejambe, ainsi que la capote, elles ont des taches rouges.

— Tu as tes règles ? demande-t-il à Aurianne.

— Non, c’était mon hymen, j’étais vierge.

— Vierge ? J’ai défloré une fille ?

— Pour un premier coup, c’était un coup de maître.

Koen est abasourdi, il n’avait pas pensé qu’il serait le premier, il croyait que c’était un jeu de sa part de dire qu’elle n’avait jamais branlé un homme, juste pour mater la bite bandée de son frère. Machinalement, il prend un mouchoir et nettoie la vulve de la jeune fille, puis sa propre verge. Ils se couchent l’un à côté de l’autre, main dans la main, sans rien se dire, réfléchissant à ce qui s’est passé, jusqu’à ce que Frédéric frappe à la porte et entre.

— Ils sont charmants, dit-il en les voyant, ai-je définitivement perdu mon Koen ?

— Non, répond celui-ci, il reste encore beaucoup de marches sur l’échelle de Kinsey avant que je sois seulement hétérosexuel.

Le frère et la sœur retournèrent dans leur cabine. Ils se déshabillèrent entièrement avant de se coucher, d’habitude ils mettaient un pyjama.

— Voilà, dit Amaury, je ne suis plus puceau, et toi ?

— Moi non plus. Je ne sais pas ce qui nous a pris, nous n’avions pourtant pas trop bu.

— Tu le regrettes ?

— Non, pas du tout, dit Aurianne, J’ai apprécié que tu sois avec moi dans la cabine d’à côté, je me sentais plus en sécurité que si j’avais été seule avec un inconnu.

— Pas de souci, alors.

— Un seul souci, tout cela restera sans lendemain, ils ont leur vie et nous avons la nôtre. L’idéal serait de rencontrer des Parisiens, pour qu’on puisse avoir une relation à plus long terme avec eux.

— C’est le 14 Juillet demain, peut-être un miracle lors de la fête. La fraternité.

— Tu rêves…

— Oui, je rêve. Bonne nuit, sœurette.

— Bonne nuit, frérot.

Ils échangèrent un bisou avant de s’endormir.

Comme ce récit est un conte de fées, le rêve devint réalité : le frère et la sœur firent connaissance avec Pierre et Gilles lors de la fête du 14 Juillet, passagers de seconde classe et Parisiens, l’un gay et l’autre pas. Koen en fut fort satisfait, une seule expérience avec Aurianne suffisait pour qu’il ne mourût pas idiot.

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