Si je la croisais ailleurs que dans cette pièce, est-ce qu'elle me tuerait plus tôt ? Ou le ferait-elle payer à ma sœur pour m'atteindre ?

Remettre mon pouce en place me fit un mal de chien et je pris mon pull pour le serrer autour de ma taille, afin de l'utiliser comme un garrot. Je retournai ensuite sur mes pas pour prendre la bougie avec moi et je parcourus ce sombre couloir qui donnait sur de vieilles portes comme la mienne. Il y avait des cadres penchés sur les murs et leurs images étaient soit arrachées, soit recouvertes par de la moisissure.

Un gros bruit me fit sursauter. Je me tournai vers la porte d'où il semblait venir et j'avais peur de l'ouvrir. J'imaginai que je n'y trouverais pas pire que ma mère, car cela ne pouvait pas exister. Personne d'autre n'était capable de dire devant tout le monde qu'elle n'en avait rien à faire si ses filles venaient à mourir avant elle.

Peu importe, elle n'avait jamais été une mère pour moi. Juste une génitrice qui avait décidé de faire des enfants et obtenir l'argent pour s'acheter des cigarettes et son pastis. J'imagine que l'enfant qu'elle désirait vraiment était son seul et unique garçon, pas ses cinq filles.

Lui seul était le grand roi dans la maison. Ayant le droit de tout et n'importe quoi, elle lui avait même donné cent euros pour rester deux heures sur l'ordinateur. Je suis même sûr qu'elle l'aurait applaudi s'il avait mis le feu à la maison.

Ma main se mit à trembler en se rapprochant de la porte et je sentais mon cœur s'emballer. Celui-ci battait tellement fort que je pensais qu'il allait sortir de ma poitrine et se barrer d'ici plus vite que moi. Je respirai profondément pour tenter de me calmer et j'ouvris la porte en regardant prudemment ce qui se trouvait derrière.

• Jessica ?!

La pièce était très peu éclairée, mais je reconnus immédiatement la voix de ma sœur Jade. J'étais à la fois heureuse, surprise et inquiète de la voir. Ce n'était pas elle que je venais d'entendre hurler.
Je me précipitai vers elle et posai cette maudite bougie qui me brûlait les doigts sur la table de chevet pour la délivrer de ses liens. J'étais parvenue à libérer sa main droite et remarquai son œil au beurre noir, ainsi que des brûlures sur ses bras. Soudain, l'angoisse s'intensifia en entendant la voix de ma mère juste derrière moi.

Mon cœur se mit à tambouriner dans ma poitrine. Une sueur froide me parcourut le long du dos et la peur paralysa mes jambes. Tournant mon regard vers Jade, celle-ci remit discrètement sa main dans la chaîne pour faire croire à notre mère que je n'avais pas réussi à la libérer.
Elle me tira violemment par les cheveux pour me ramener dans la pièce où je me trouvais, pendant que j'entendais Jade hurler mon nom.