L'étudiante

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Le professeur, debout dans l'amphithéâtre, expliquait à une assemblée pour le moins clairsemée d'élèves endormis comment dater des objets découverts à l'aide du carbone 14. Le générique de Durarara!! retentit à travers la vaste salle, avec sa batterie rapide et ses accords de guitare électrique presque métals. L'étudiante à qui l'objet appartenait sursauta, réveillée en plein milieu d'un cauchemar où elle allait acheter une voiture, se faisait poignarder et personne ne venait la sauver, préférant demander si sa bagnole était une Alfa Romeo ou pas.
Sans faire attention au regard outré de l'enseignant, elle saisit son téléphone à tâton et répondit d'une voix pâteuse :

— 'llô ? C'est qui ?

— Sardine, c'est moi, Nectarine ! lui répondit son interlocutrice.

— Keskiya ?

— Tu as entendu parler de la tueuse en série qui sévit actuellement dans la ville ?

— Mouais... En quoi ça me concerne ? C'est pas moi, si ça peut te rassurer.

— Non mais je sais bien, voyons, je t'appellerais pas pour ça...

— Ah oui, tu appliquerais l'article 32 du Code des Alcoolytes et tu me couvrirais ! Alors, qu'est-ce qu'il y a du coup ?

— J'ai besoin de ton aide pour déchiffrer des messages laissés par la meurtrière, cette langue doit être très rare, toi seule es en mesure de la comprendre, ou au moins, de l'identifier...

Sardine reconnut au ton grave de son amie que celle-ci ne plaisantait pas.

— Bouge pas, j'arrive. T'es où ?

— À mon boulot.

— C'est-à-dire ? Je connais pas l'adresse de mon loft alors t'attends pas à ce que je retienne celle de ton travail...

— 78 boulevard du Colonel Carrefour. Station Poutou sur les lignes 4 et 7, Johnny Hallyday sur la 13.

— Ok, j'y suis dans 12 minutes. Si y a pas de grève. À plus.

Après que l'étudiante eut raccroché, le silence s'installa dans l'amphithéâtre. Sans plus s'en préoccuper, Sardine ramassa son sac, que son ordinateur n'avait même pas quitté, et sortit de la salle.

Douze minutes et douze secondes plus tard, elle frappa à la porte du bureau de J. Nectarine après avoir esquivé habilement les multiples contrôles à l'entrée qui nécessitaient la plupart du temps qu'elle donne son nom, ce qui l'aurait embêtée au vu de ses antécédents avec la police criminelle.

— Nectarine, ouhou ! cria-t-elle le plus discrètement possible.

"Je suis dans le bureau d'à côté," l'informa son amie dans un texto quelques secondes plus tard.

Sardine entra donc dans la pièce indiquée "B. Châtaigne", adjacente à celle portant le nom de la professeure. Elle tomba sur une jeune femme d'à peu près le même âge que son amie, mais elle ne la connaissait et cette dernière n'avait pas l'air d'attendre une visite. Elle s'excusa en referma rapidement la porte, avant de se ruer sur celle de l'autre côté. Enfin, elle entra dans le bureau où Nectarine se trouvait, en compagnie de deux personnes inconnues.

— Bonjour, mademoiselle Sardine, la salua la jeune femme assise à la table.

— B´jour, renchérit le gus planté comme un piquet à côté d'elle.

— Wesh wesh comment ça va, ma Sardine ? lança Nectarine en allant faire un check avec son amie.

— Ça va, ça va... C'est un peu bête que tu m'aies appelée juste maintenant, pour une fois que j'allais en cours... soupira Sardine. Mais bon, si mon savoir immense est requis, la fac peut bien attendre ! Alors, c'est quoi le truc à lire ?

— Mademoiselle Sardine, intervint la rousse à l'air trop sérieuse, vous devez d'abord signer une déclaration de confidentialité avant de prendre connaissance de ces documents d'importance capitale. Voulez-vous...

— C'est qui elle ? Et le mec à côté ? interrogea Sardine.

— Ah, je te présente mes collègues, Litchi et Laitue ! déclara Nectarine en inversant leurs noms en les désignant.

— Ok. Bon, madame Laitue, je suis navrée mais je ne signerai rien du tout, l'informa Sardine en croisant les bras. Vous allez tenter de me forcer, mais comme c'est vous qui avez besoin de mon aide, vous n'êtes pas en mesure d'exiger quoi que ce soit. Soit je vous aide et je resterai miss Sardine, soit je me barre et je vous laisse vous dépatouiller avec votre Banana Split.

— Dame Blanche, rectifia l'inspectrice.

— Ah bah voilà, je suis pas le seul à le tromper, marmonna le sergent en rigolant intérieurement.

Le silence retomba. Nectarine lança un regard inquiet à l'intention de son amie, qu'elle savait têtue et lunatique. L'étudiante et l'inspectrice se défiaient du regard, yeux marrons versus yeux noisettes. Finalement, un sourire de peignit sur le visage tavelé de cette dernière.

— Vous me plaisez bien, vous, vous avez du caractère... Très bien, j'accepte votre condition. Miss Sardine. Professeure, donnez-lui un papier pour qu'elle l'étudie.

Nectarine se détendit, soulagée, et tendit à son amie un des mystérieux messages. L'étudiante le parcourut du regard, fronça les sourcils, le tourna sous plusieurs angles, haussa les sourcils, loucha dessus, fronça les sourcils, et ainsi de suite. Puis, elle se pencha et fouilla dans son sac. Elle en sortit une bouteille de rhum, à la grande surprise des deux enquêteurs.

— Bien, ça ne vaut pas un miroir mais c'est mieux que rien. Je savais que j'en aurais besoin aujourd'hui, dit Sardine pour elle-même.

Elle positionna le bout de papier à côté de la surface de verre de la bouteille, de sorte à pouvoir lire son reflet. Au bout de quelques secondes, elle redressa la tête.

— C'est du latin, annonça-t-elle gravement.

— Et qu'est-ce que ça dit ? interrogea l'inspectrice, curieuse.

— Vas-y quand c'est moi qui propose on me dit que je suis con mais quand c'est une loli alcoolique, tout de suite c'est du génie... grommela Laitue.

Sardine haussa les épaules.

— Pfft, aucune idée. J'ai arrêté le latin en 3ème, à quoi ça sert d'apprendre une langue morte ?

La déception se peignit sur le visage de Litchi, qui ne parlait pas latin non plus. Laitue avait pris informatique au lycée. Quant à Nectarine, elle avait opté pour l'italien.

— Attendez, se ravisa Sardine. Je pense avoir compris le sens global d'une des phrases. Mais c'est un peu capillotracté, alors je ne suis pas sûre de moi...

— Dites toujours, ça peut nous aider, l'invita Litchi.

— Alors... Connaissez-vous quelqu'un du nom de M. Laitue ?

Le sergent cligna des yeux, surpris. Le message lui serait-il donc adressé ? Il était partagé entre la flatterie et l'inquiétude, car recevoir un message de la part d'une tueuse en série n'augurait rien de bon, a priori...

— C'est moi, répondit-t-il, la gorge sèche.

— Je croyais que vous étiez Litchi, vous... Bon, peu importe. Laitue, Litchi, ou qui que vous soyez, j'ai l'immense honneur de vous annoncer que la Dame Blanche est amoureuse de vous.

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