Chapitre 16
j'ouvris les yeux aux premiers rayons du soleil et laissai lentement mon esprit embrumé revenir à la réalité. Je décidai de pardonner à Adam et de m’excuser pour la gifle qu’il avait mérité en me disant que je devrais m’habituer à ce que ce type soit aussi bien un gentlemen qu’un enfoiré de première. A moi de découvrir auquel des deux il s’apparentait le plus.
A pas de louve et légèrement boiteuse, je sortis et découvris uvrais cet immense appartement silencieux en laissant derrière moi le long couloir où se trouvaient les chambres. J’entrai dans la grande salle de vie ou la décoration y était assez froide et très ordonnée. Un canapé noir en cuir faisait face à un écran de télévision gigantesque séparé par une table basse en verre vide de tout objet et assortit à la grande table de la salle à manger bordé de chaises en fer forgé, elle aussi vide. La cuisine ouverte très moderne, était noire et grise et comportait à mon avis de bien trop d’élément pour un homme demeurant seul. Je remarquai l’absence d’objet personnel, pas un seul vase, rideau, coussin, cadre photo… la pièce était triste aussi bien qu’elle pouvait l’être.
Je m’approchai de la fenêtre et regardai New York s’éveiller doucement quand une sonnerie venant de nul pars résonna dans la pièce et me fit sursauter. Je cherchai d’où pouvait provenir ce son ne voyant pas de combiné téléphonique aux alentours. L’objet semblait sonner des quatre coins de la pièce. Quand il s’arrêta enfin quelque seconde, la voix d’un homme remplaça celle-ci et je me raidis à nouveau.
Adam c’est ton père, je t’appelle pour te prévenir que la réception pour l’anniversaire de ta grand-mère est aujourd’hui. Non pas que je souhaite ta présence mais comme elle m’a demandé plusieurs fois si tu venais et qu’elle m’a fait promettre de t’appeler… enfin tu fais comme tu veux comme d’habitude… ce ne sera pas la première fois que tu la décevras mais ça pourrait bien être la dernière en revanche.
L’homme froid à la voix pleine de reproches raccrocha. Je restai interdite ne sachant quoi penser avant d’avoir l’envie pressante de retourner dans ma chambre pour ne pas être là quand Adam l’écouterait. Je me retournai et mon sang ne fit qu’un tour une troisième fois.Bordel je vais faire une crise cardiaquepensais-je le cœur en alerte.
- Je vois que tu as fait la connaissance avec mon père.
- Désolé je ne voulais pas…
- Ce n’est rien, je n’invite jamais personne ici en temps normal. J’aurais dû couper le haut-parleur.
- Tu vas y aller ? demandais-je curieuse.
- Ça en revanche ce n’est pas tes affaires. Rétorqua-t-il
- Et bien en réalité si… je te rappelle qu’on est sensés passer la journée ensemble, mais je comprendrai si tu annulais…
- Je n’irai pas, point. Lança-t-il avec autorité
- Très bien… je laissai en suspens une tonne de question en voyant sa réticence ne voulant pas trop tirer sur sa corde déjà bien tendue de bon matin.
- Ton pied ça va ? demanda-t-il en faisant chauffer l’eau de sa cafetière.
- Ça peut aller… mais je ne crois pas pouvoir faire le tour de la ville aujourd’hui.
- C’est ce que tu avais prévue ? dit-il l’air narquois
- Oui, pourquoi ?
- Pour rien, je pensais que tes péripéties d’hier t’en auraient dissuadée.
- Ça ne m’empêchera pas de vivre. grimaçais-je
- Alors que fait-on ?
- On va à l’anniversaire de grand-mère ! lançais-je d’un ton entrainant.
- Hors de question.
- Tu veux rentrer dans mon intimité n’est-ce pas ?! il ne répondit pas, attendant mes arguments de pied ferme. Alors commence d’abord à partager la tienne et je serai peut-être plus ouverte sur la question.
- Tu as entendu mon père et tu tiens quand même à le rencontrer ?
- Il ne m’effraie pas, à moi.
- Il ne m’effraie pas à moi non plus il m’insupporte, entre autres. Coupait Adam sur la défensive
- Et ta grand-mère à l’air de t’apprécier « elle » et je suis curieuse de savoir pourquoi. Le charriais-je
- Très bien, tu veux passer une mauvaise journée, c’est ton choix… annonça Adam en me tendant une tasse de café fumante.
- Je suis persuadée du contraire. Répondis-je en l’acceptant volontiers. Il me semble ne pas t’avoir dit que je buvais du café. Continuais-je
- C’était précisé sur ton profil. J’hochai la tête comme si cela me revenait. Je trouve qu’il ne reflète pas du tout ta personnalité au passage.
- Je crois bien avoir trop picolé le jour où je l’ai créé. Mentis-je maladroitement
Après avoir fini de boire notre café en silence, Adam s’enferma dans sa chambre pour passer un coup de fil confirmant notre venue. Il en sortit vingt minutes plus tard et me surprit une fois de plus.
Il portait un costume noir et une chemise blanche. Ses cheveux coiffés en chignon changeaient complétement le personnage qu’il incarnait, enfin en apparence bien sûr.
- Tu es, très classe. Ces mots dépassaient ma pensée
- Merci, et toi toujours en pyjama… non pas que ça me déplaise.
- Mouai… je n’ai malheureusement pas d’autre vêtement.
- Gabriel va nous emmener à l’hôtel pour que tu puisses te changer.
- Génial ! ils vont encore bien rigoler quand ils vont me voir débarquer comme ça…
- J’en suis sûr. Sourit Adam
…
Adam resta dans la voiture pendant que j’arpentais les couloirs de la honte caché derrière mes lunettes de soleil. Il ne me fallut pas longtemps pour mettre la main sur une tenue adéquate pour l’occasion. Je voulais être coquète sans être remarquable et quoi de mieux qu’une robe blanche en dentelle passe partout mais élégante. J’optai pour des talons aiguille blancs dentelés eux aussi pour assortir le tout et manquai de me retrouver à quatre pattes par terre en prenant soudain trop d’assurance dans ma démarche. Non je n’étais pas faite pour les talons et ne le serai jamais.
Alix, aux premières loges de mon rattrapage navrant, se moqua ouvertement.
- Tu as été l’inspiratrice de la ballerine dans une autre vie.
- Ça va ! grondais-je
- Tu étais ou hier soir ?
- C’est une longue histoire, et là je suis assez pressée désolé…
- Fais court où je ne te laisse pas franchir cette porte.
- Ok, défilé Victoria Secret, rentrée tard, chambre d’amis du millionnaire, dormis, et là maintenant.
- T’as couché ? demanda Alix d’un air obscène
- Non ! m’offusquais-je
- T’as raison ne fait rien sans avoir le fric sur ton compte.
- Alix !
- T’es désespérante ma biche, c’est bon vas-y… lança-t-elle en libérant l’entrée afin de me laisser passer et rejoindre enfin la voiture.
Adam complimenta ma tenue avant de me redemander si j’étais sûre de vouloir aller en enfer. Je lui répondis que oui. Son corps se crispa mais il n’émettait aucune objection et resta silencieux tous le long du trajet.
Nous arrivâmes après moins d’une heure de route devant l’immense portail de la résidence. Celui-ci s’ouvrit à notre arrivée. La voiture s’immobilisa enfin sur un grand parking déjà presque plein. Adam vida entièrement ses poumons comme pour se préparer au pire avant de me regarder pensif.
- Tu l’auras voulu…
- C’est juste un anniversaire Adam. Soufflais-je. Il se moqua
- Et je suis sensé te présenter en tant que… ? Demanda-t-il
- Tu n’auras qu’à improviser, je suis sûre que tu es doué pour ça. Ironisai-je en fronçant les yeux. Je réussis à peine à détendre ses traits inquiets mais c’était toujours ça de gagné. Son angoisse me gagna à mon tour et s’installa tel une bille de plomb logée au creux de mon ventre.
Nous sortîmes de l’habitacle et je découvris alors une grande demeure pavillonnaire blanche qui se dressait sur un jardin de plusieurs hectares dont la pelouse dense taillée à la perfection donnait envie de s’y allonger. L’espace vaste et vide autour de moi me donna un sentiment d’apaisement et envie d’emplir mes poumons jusqu’à les faire éclater. On ne pouvait que se sentir bien dans un endroit pareil.
Je rejoignis Adam les chevilles vacillantes, il le remarqua et sans aucune réflexion, il me tendit son bras pour que je m’y agrippe. Sans réfléchir j’acceptai son geste et repris confiance dans ma démarche avant d’entamer le long chemin pavé rejoignant la porte d’entrée.
- Merci. Lui souris-je
- De rien, je ne voudrais pas que quelqu’un te voit marcher comme ça. Il pourrait croire que j’ai ramené la première soularde du coin. Je frappai son bras de ma main libre et voulu récupérer l’autre mais Adam la coinça en la serrant contre lui.
- Du calme je plaisante. Me dit-t-il d’une voix douce en collant son front au mien. Si tu n’arrives pas à contrôler tes émotions tu risques de ne pas survivre ou de tuer quelqu’un une fois cette porte franchit…
- Mais peut-être seront-ils plus gentils avec moi que tu ne l’es ? Adam rit presque à mes mots.
- Tu veux parier ? me demandait mon cavalier le visage toujours aussi près du mien comme par défi de ne pas flancher le premier.
Je le défiai à mon tour, les yeux pleins d’espoir de le contrer lorsqu’un sentiment m’envahit soudain. Il n’était plus question d’affront mais de confusion. Des sentiments contradictoires s’affrontaient en moi au souvenir de son baisé de la veille. J’avais envie de re-gouter à ses lèvres comme si celles-ci délivraient le sérum capable d’annihiler le venin de ses mots. Je sentis alors son souffle chaud sur mes lèvres quand la porte s’ouvrit juste devant nous.
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