1 - Phase d’éveil à Coruscant (de Pigo Sellis)

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Phase d’éveil à Coruscant

Enregistrement audio – Strask Breil’lya, étudiant chercheur, second degré, spécialité Ère de l’Ancienne République

Coruscant 7H30 matin – heure locale – appartement officiel de l’Académie de Coruscant

Le bruit n’avait jamais cessé de l’entourer. Avait-il réussi à dormir ? Dehors, les speeders continuaient sans s’arrêter leur trafic perpétuel dans cette ville monde qui avait renoncé à la Nature. On pouvait en entendre certain, les moteurs débridés se lancer dans une course d’airspeeders avant que les forces de l’ordre y ajoutent leurs sirènes et leurs cris.

A l’intérieur de sa tête des Wookies faisaient du tam-tam. Il retira son drap, encore tout habillé. Strask massa sa longue face enfourrée. La douleur semblait s’apaiser le temps d’une caresse, puis revenir plus forte que jamais, irradiant ses muscles et ses cartilages.

Tout aurait été plus supportable si cela n’avait été qu’une cuite. Non bien sûr. Il se leva. Le miroir lui renvoyait une figure à peine tuméfiée. Ils avaient fait du bon boulot constata Trask en retirant sa veste et en regardant les traces des coups laissées sur son corps velu.

Une peau glabre ne peut cacher les sévices corporelles au contraire de sa peau en fourrure. Trask jeta douloureusement à travers la pièce sa veste en sueurs.

Comment avait-il pu ?

Lui qui était fils du célèbre Askrut Breil’lya, lui, Strask Breil’lya, d’un des plus grands clans de Bothawui, lui génie reconnu dans tout le système, recommandé en personne par le sénateur Savielk Trey'dra pour officier en tant que disciple du professeur Adawi, docteur spécialiste de l’Ère de l’Ancienne République. Qu’ils attendent que son père et le sénateur soient au courant, et ils paieraient leur affront. Comment ont-ils osé porter la main sur un Bothan !

Traité comme le plus huilé des Dugs. Vermine alien ! Sale Vermine alien ! Tu crois que tu ne sais pas ce que tu nous caches, on peut y rester toute la soirée si tu veux. Fallait qu’il soit tombé au mauvais moment, au mauvais endroit pour subir un interrogatoire serré d’un officier impérial un peu trop zélé. Pas besoin de disposer de je ne sais quel pouvoir de sorcier dérisoire pour deviner que ces enfoirés en armure ne rêvaient que d’une seule chose, de l’engraisser à coups de blasters bien sentis. A force de faire rebondir sa figure sur la table de chirurgie, elle avait fini par s’aplatir comme ses faces glabres. Laissez-le, nous en avons fini pour l’instant, je vous en prie professeur Brei’lya, retournez à votre appartement, mais sachez que nous vous gardons à l’œil.

« On dit d’un Céréen qu’il a deux cœurs et deux cerveaux. Je dis d’un Humain qu’il n’a ni cœur ni cerveau » murmura Trask à son reflet carnassier. Instinctivement, ses doigts s’étaient resserrés sur son commutateur vocal.

« On dit d’un Céréen qu’il a deux cœurs et deux cerveaux. Je dis d’un Humain qu’il n’a ni cœur ni cerveau. » répéta le commutateur vocal. Entendre sa voix apaisait Trask. C’était comme un baume, un refuge, plus efficace que se noyer dans une cuve à bacta.

La lumière naturelle commençait à percer à travers les stores, et l’intensité des feux de la rue s’amenuisait en retour. Quelle heure était-il ? Pouvait-il, devait-il reprendre la journée comme si tout cela ne s’était rien passé ? Trask ricana. Sa mère lui manquait, et la sagesse de son père également.

« Quand le monde se trouble, ton esprit ne doit pas se disperser. Il doit se renforcer dans les tâches qui font de lui un Bothan : sa force est son cerveau »

Telles étaient les propriétés de l’encéphale de son père, contenir et déverser le savoir-être Bothan. Trask ouvrit le placard et sortit rapidement des vêtements neufs. Il s’apprêta à ramasser sa veste quand une sonnerie retentit suivi de graves tambourinements à la porte. A contre cœur, il s’approcha de l’entrée et appuya sur le dispositif de communication sans regarder l’écran.

- Laissez moi ! Je ne veux voir personne ! Son ton le surprit lui-même, d’habitude, il se savait plus maître de ses émotions.

Le bruit reprit à la porte avec des cris.

- Trask, c’est moi, ouvre moi !

Reja Maad, sa voix grave résonnait à ses oreilles.

La seule voix grave humaine que Trask pouvait supporter. Trask ouvrit. Se jetant dans ses bras, et appuyant sur ses côtes douloureuses, Reja Maad le prenait dans ses bras. Ses longs cheveux châtains-roux rappelaient les plus fines étoffes et contrastait avec sa tenue habituelle d’humain, toute grise et inexpressive. Aujourd’hui elle portait un autre parfum. Comme l’Azira, l’ample douceur plus large que les nobles temples forestiers succédait à la fine aigreur titillant les muqueuses gustatives de Trask.

« Tu sens Trask. Tu ne t’es pas lavé ? J’étais tellement inquiète, je t’ai envoyé plusieurs messages à l’appart et tu ne répondais pas.

Trask s’efforça de retenir une grimace avant de la repousser délicatement.

- Les communications ne fonctionnent plus ici depuis leur dernière perquisition. Ces fils de rancor – Reja Maad posa ses mains sur sa bouche- ont du bousiller l’appareil. Regarde – Trask lui fit une démonstration, un hologramme clignota faiblement – rien à faire. Du bon boulot !

- Ils t’ont encore arrêtés ?

- Oh un simple petit interrogatoire. Combien tu en as eu depuis la semaine dernière ?

- Une fois.

- Chanceuse, ricana Trask, c’est mon cinquième épisode et le plus violent si tu veux mon avis. Ajouta-t-il en s’appuyant sur le canapé. A la quatrième perquisition, j’avais l’espoir que ce serait la dernière. Qui sait peut-être qu’au neuvième, l’histoire changera, qu’ils auront leur version, celles qu’ils veulent entendre ! Je n’ai pourtant fait que rapporter les faits tels qu’ils sont sans les déformer !

Reja Maad ramassa sa veste et le jeta sur son lit.

- Tu peux te déplacer ? Je vais chercher de la crème Bacta, tu en as toujours ?

- Dans la salle de bain. »

Trask sortit de nouvelles affaires du placard, sombres cette fois-ci. L’occasion s’y prêtait. Reja Maad revenue lui appliqua la pommade. Froide elle pénétrait difficilement la peau poilue.

« C’est ton costume.

- Oui.

- Le mien est dans ma valise. Je me change, tu te douches de ton côté ?

- Bien sûr »

L’eau chaude même recyclée était agréable, le jet massait ses muscles douloureux. Reja Maad circulait dans l’appartement à la manière d’un papillon voyageur de Maridun, regardant les vases, caressant les meubles.

« Les règles sont claires. Je n’ai pas le droit de toucher à la décoration de cet appartement. Rien qui ne soit de Bothawui donc, sinon cette petite statuette, porte-bonheur offert par ma sœur lors de mon départ. »

Affirma Trask ôtant son peignoir et commençant à enfiler sa veste.

« Tu as une sœur je ne savais pas.

- Riskyr Breil’lya. Jolie robe Reja » Mentit-il.

La robe de Reja Maad était longue et sombre comme l’uniforme d’un inquisiteur. Un léger voile dissimulait son visage.

« Tu vas enchaîner ensuite avec la conférence ?

- Les autorités ne l’ont pas décalé, tu sais comment elles sont, elles ne s’arrêtent pas à ce qu’elles considèrent être du détail et je ne pense pas que le docteur Adawi aurait voulu… »

Trask s’interrompit. Reja Maad sanglotait. Trask détestait la voir pleurer. A son tour, il s’approcha et la prit en douceur entre ses bras.

« Pourquoi a-t-il fallu qu’il se fasse assassiner ?

- Je ne sais pas, admit Trask. Nos recherches doivent vraiment être importantes. Sinon il n’y aurait pas eu de vol. Allons-y, je ne sais pas quelle heure il est, mais le plus tôt sera le mieux Reja. Mes connaissances ethnologiques de Coruscant me dépassent encore. Je ne connais pas les rites humains pour les circonstances.

- Tu es très beau dans ce costume. »

Trask força un sourire. Une tenue aussi sombre et grise ne provoquait chez lui qu’au mieux une indifférence. Cela ne faisait que quelques mois qu’il travaillait à Coruscant et la culture humaine contemporaine restait pour lui un mystère. Il lui paraissait plus facile de comprendre les civilisations anciennes, quelque part plus vivantes et captivantes que celles actuelles. Trask pouvait passer plusieurs heures sans se lasser à discuter et expliquer à des étudiants naïfs à ses yeux la chronologie, la mythographie, l’alienologie et l’anthropologie structurale avec une préférence pour les cultures aux approches totémistes des peuples des anciennes républiques ; et il répudiait également les définitions trop restreintes appliquées aux termes Jedi ou Sith par l’opinion publique qui ne parvenait pas à percevoir la richesse étymologique et par conséquence historique de tels termes. Comment pouvait-il alors trouver le gris, le noir, les pleurs comme étant les seuls gestes autorisés pour un enterrement ? Contrairement à Bothawui, ici à Coruscant, on ne célébrait pas la vie d’un individu sinon sa mort.

« J’ai besoin de faire un petit tour, seul, je me sens encore morne. Attends moi dans le speeder, j’arrive. »

Reja Maad acquiesça, elle ne pleurait plus et retrouvait son sourire habituel. Elle avait dû comprendre que Trask avait besoin d’enregistrer sa voix à nouveau à l’aide de son commutateur vocal pour canaliser ses émotions. En sentant à nouveau son parfum d’Azira tandis qu’elle partait, il songea qu’il n’avait jamais rencontré une meilleure stagiaire dans son équipe sinon peut-être de meilleure amie. Il s’approcha de la statuette. Il la souleva légèrement avant d’appliquer la pointe d’un de ses ongles sur un interstice invisible. Un cliquetis lui répondit tandis qu’un compartiment secret s’ouvrait livrant à Trask une sorte de bracelet enveloppé dans un tissu fin.

Il était gravé d’étranges symboles. Trask le glissa toujours emballé dans une de ses poches tout comme son commutateur vocal. Ce bracelet, ou pour être plus historiquement exact, cet holocron était ce pourquoi on avait volé et assassiné son tuteur le docteur Adawi. A l’heure actuelle seul Trask avait à sa disposition l’autre partie de ce mystérieux et ancien holocron. Le voleur où qu’il puisse être devait traîner les crocs sur le permabéton en se rendant compte qu’il ne l’avait pas au complet. Ce morceau d’holocron, il le présenterait lors de la conférence, celle qui résumerait les efforts de son équipe de recherche en histoire de l’Ancienne République. Équipe dont à présent, il devenait le directeur, remplaçant feu le docteur Adawi.

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