2.1) Volodia
Nous prîmes la fuite, par nuit : moi, dans une longue cape noire qui me donnait l’allure d’une mite, la capuche rabattue jusque sous le menton, les yeux compressés sous les binocles anti-sable ; elle, dans une bonbonne hermétique qui servait d’ordinaire à transporter les friandises que le désert aurait fait fondre.
Je l’emmenai jusqu’aux portes de la ville où, faute de laisser-passer, je volai une bécane et fusai entre les gardes-frontières à l’assaut des vastes étendues ensablées. Je roulai des heures, sans décrisper les mains du guidon, émerveillée par l’immensité du désert, les éternelles mosaïques tracées sur le sol par les vents, les prémisses émulsifiés d’un avant-goût de liberté. Je ne poussai le frein qu’une fois le soleil au zénith, quand la chaleur devint intolérable. Je profitai de cette pause bien méritée pour enclencher le chargement voltaïque de la batterie à plat, puis je dressai une toile sous laquelle m’étendre, à l’abri du soleil et, la bonbonne de Sakineh serrée tout contre moi, j’écoutai apaisée le chant des oiseaux, sans songer que ces rapaces ne guettaient que mon trépas.
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