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Mars 1976
Au Grand Feu de Bertrix, le Docteur Francis a cassé la gueule à un connard qui prétendait que sa sœur s’était barrée avec le fils Cléchard. N’importe quoi. Comme si Yves et sa sœur avaient tout manigancé. L’enfoiré sous-entendait que ces deux-là vivaient heureux à cougner comme des porcins, dans le Midi de la France, ou carrément à la Costa Brava, près de Degrelle, pendant qu’ici on se faisait un mauvais sang d’encre. Le fils de pute. Comme si sa propre sœur était une sale traînée qui aurait abandonné son fils… Tout le monde l’a retenu, calme-toi Francis. Il tremblait, le pauvre, il a même pleuré. La trop belle Chantal l’a un peu consolé, sa peau douce, son parfum, ses boucles blondes, sa bouche gonflée. Bernadette, la fiancée, avait justement une angine.
Le Beau Thierry aurait bien pleuré lui aussi pour être réconforté par la plus belle fille du monde. Mais le malheureux a l’alcool joyeux et s’est contenté d’aligner des blagues graveleuses qui n’ont pas eu le succès escompté. Chantal joue la délicate. Thierry est pourtant un gars bien, un joli parti lui aussi, gendarme depuis peu et caserné à Bruxelles, Boulevard Général Jacques, justement pas loin de son studio. Le vendredi, chaque fois que cela se met, il profite de la voiture de la belle pour rentrer en Ardenne, c’est plus rapide que le train. Durant le trajet, ils papotent tous les deux, il fait moins le fier. Les conversations sérieuses qu’il partage avec Chantal durant ces retours au bercail ne ressemblent pas aux grivoiseries qu’il se plaît à fanfaronner devant ses potes. Elle le lui a déjà fait remarquer. C’est plus fort que moi, a-t-il avoué. Elle a ri, avec grâce.
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