OUTSIDE

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Hyde Park

Mortensen est allongée dans l'herbe, le regard rivé au ciel. Son portable vibre dans la poche de son blouson. Elle décroche.

— On a un client. C'est le directeur de Life Mag. Il a des soupçons sur un de ses journalistes. Il craint que celui-ci ne provoque les événements pour avoir le scoop...

L'enquêtrice raccroche. On ne chôme pas dans ce métier. Heureusement que Ren est là... Law se lève, sort du parc, puis décide de flâner dans les rues avant de se rendre à l'agence. Elle s'arrête devant un salon de thé, regarde la vitrine, pensive, comme Audrey Hepburn devant Tiffany's, puis reprend son chemin.

*

W. Agency - Vitoria

L'ex-flic sert la main du client, un homme aux cheveux châtain, mi-longs, les yeux noisette, grand, charismatique.

— Bonjour, Monsieur...?

— Ayden Forbes.

Elle lui fait signe de s'asseoir. Chaque jour la même chose : accueillir le client, lui proposer de s'asseoir, lui servir un thé, écouter le récit de son étrange histoire... Cela semble improbable que la routine s'installe dans le monde du bizarre et pourtant... La routine... elle s'installe partout, si l'on n'y prête pas garde.

*

A bridge on the Thames

Law se promène près des rives de la Tamise. Elle traverse un pont, puis s'arrête pour observer le fleuve. Le vent joue avec ses cheveux cuivrés. Pensive, la jeune femme observe les bateaux pullulant sur l'eau. Soudain, elle aperçoit non loin, un adolescent montant sur la rambarde. Elle l’imite. Se tenant d'un bras à une poutre du pont, suspendu à moitié au-dessus du vide, l’enquêtrice s'adresse au garçon :

— C'est moche de mourir seul. Je peux vous accompagner si vous le souhaitez.

Le jeune homme se tourne vers elle, surpris.

Depuis le temps que je suis dans le métier, je vois tout de suite si quelqu'un s'apprête à faire une connerie...

— C'est pour la rejoindre. Il n'y a que comme ça que nous pourrons être réunis.

— Tu me donnes ton nom avant de sauter. Que je puisse prévenir quelqu'un. Que ta mère ne passe pas des mois à te chercher.

— Connor.

Il regarde en bas. Prêt à plonger.

— Connor comment ?

— Griffiths.

— OK, Connor Griffiths. T'es pressé de sauter ou t'as deux minutes pour m'expliquer ce qu'il se passe ? Parle-moi d'elle.

Le garçon hésite. Il regarde en bas, puis regarde Mortensen.

— Cassiopée. Ça fait des mois qu'elle hante mes rêves... On voyage... J'ai vu des endroits, des univers, que vous ne pourriez imaginer !

— Que tu crois, prononce l'ex-flic à mi-voix, puis reprend plus fort : pourquoi mourir ?

— Je ne veux plus revenir ici. Je veux rester là-bas pour toujours.

— OK, je comprends, mais qu'est-ce qui te garantit que tu vas la rejoindre ? Et si mourir, au contraire, coupait le lien entre les deux mondes. Connor, les fantômes ça n'existe pas, quand on est mort, on est mort, il n'y a plus rien !

— Qu'est-ce que vous en savez ?

— J'en sais que c'est mon boulot. Ce lien que tu as avec Cassiopée, tu ne peux pas prendre le risque de le rompre. C'est ton corps, c'est cette vie, la connexion entre vos deux univers ! Et tu as pensé à elle ? Je suis sûre qu'elle ne veut pas que tu meures.

L'adolescent regarde l’eau sombre, attiré par les profondeurs de la Tamise.

— Connor ! On fait un deal. Cette nuit, tu rentres chez toi, tu vas dormir et tu demandes à Cassiopée ce qu'elle pense de tout ça. Elle a le droit de savoir, non ?

Il hésite. Il semble tenté par la proposition de la jeune femme. Il regarde en bas, puis regarde Law, et à nouveau en bas.

— Je ne sais pas... lance-t-il hésitant.

Mortensen voit qu'il n'a pas l'intention de changer d'avis :

— Bon. Moi d'abord.

L’ex-flic se laisse tomber. Choqué, Connor se fige, l’espace d’un instant, ne comprenant pas ce qu’il vient de se produire. Reprenant ses esprits, le garçon regarde à la surface de l'ondée noirâtre, en quête du moindre signe de vie. Elle n'apparaît pas. Griffiths descend de la balustrade. Perdu, il avance vers le centre du pont pour arrêter une voiture. Pas âme qui vive. Il tourne en rond, réfléchissant à une solution, puis revient vers la rambarde et se penche. Il observe les remous de la Tamise. Rien.

— Mon Dieu, qu'est-ce que j'ai fait ? crie-t-il affolé.

— Laisse Dieu où il est.

Connor se retourne, ahuri. Law se tient près de lui complètement trempée.

— Tu devrais piquer une tête. L'eau est assez bonne.

L'enquêtrice le prend par le bras :

— Bon maintenant tu arrêtes tes conneries.

L'adolescent la regarde, penaud, puis baisse la tête.

*

Pousse la porte entre les deux mondes, entrouvre la voie vers l'Univers de toutes les possibilités, l'Éther où tu deviens le créateur des beautés infinies, le sculpteur des étoiles, l'architecte des nébuleuses... Elle te prend par la main, cette Muse de sagesse. Elle sait. Elle te guide vers la connaissance ultime. Elle te prend par la main, elle t'éclaire la voie vers les profondeurs de ton âme, là où la création prend sa source...

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