44- Instants volés

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Je sors du Cube de Combat en nage. D’habitude, une session comme celle-ci me détend. Pas cette fois, je suis toujours assailli par de multiples questions et aucune réponse plausible n’émerge. Cela m’inquiète et me met dans une colère noire.

Quand j’attrape ma serviette, je découvre Alka assise sur un banc, à quelques mètres.

  • Le réseau de surveillance est inactif pour une dizaine de minutes, m’informe-t-elle avec un sourire en coin.

Le regard qu’elle pose sur moi me fait un drôle d’effet, ma gorge se serre sans que je puisse en expliquer la raison. En plus, cette histoire de réseau de surveillance que l’on peut couper de manière répétée commence à me paraître bien suspecte. C’est un peu trop facile.

Perdu dans mes pensées, je ne l’ai pas vue s’arrêter à deux pas de moi. Elle me scrute, d’un air inquiet.

  • Noway, qu’y-a-t-il ?
  • Rien, ne t’inquiète pas, tenté-je de la rassurer en chassant ce sentiment de malaise. Et toi, comment vas-tu ? Comment s’est passée ton entrevue avec l’Agent ?
  • Oh, bien, ne te fais pas de souci, me dit-elle, me gratifiant d’un sourire mutin.

Subitement, elle franchit l’espace qui nous sépare, se pend à mon cou et s’empare de ma bouche. Surpris, je réponds tout de même à son baiser. Son corps se presse contre le mien.

  • J’ai envie de toi, tout de suite, me murmure-t-elle.

Une main autoritaire vient se plaquer sur mon entrejambe tandis que l’autre tente de se glisser sous mes vêtements.

Ça y est, je sais d’où vient ce sentiment de malaise. Je me sens épié.

  • Alka, arrête. soufflé-je, en m’écartant doucement d’elle.

Elle me lance un regard brûlant.

  • On a peu de temps. Je veux en profiter, pas toi ?
  • Si, je voudrais bien, mais c’est trop risqué.

Dans ses yeux, je discerne l’incompréhension. Elle ne fait pas le lien or, je ne peux pas le lui dire à haute voix. Je vais devoir trouver une raison.

  • Alka, j’aimerais aussi me laisser aller. La dernière fois que tu t’es montrée si… entreprenante, c’était merveilleux. Hélas, cela s’est aussi très mal fini.

Je me déteste de lui mentir ainsi alors que je sais la lutte permanente qu’elle mène…

Elle se fige, j’ai le sentiment qu’elle ne comprend rien à ce que je dis puis son visage se voile de déception :

  • Mais, je… Enfin, je suis plus expérimentée aujourd’hui. Je pense que je saurais faire face… me répond-elle, la voix tremblante de dépit.

Et merde ! Comme si c’était pas assez difficile pour elle, il faut que j’en rajoute avec ma parano. Pourtant, je ne peux me résoudre à baisser la garde. L’idée que MAGIE ou qui que soit d’autres puisse assister à nos ébats me révulse. Cela nous appartient !

  • On ne peut pas en être certains et je refuse de courir le risque, surtout ici. Je suis désolé, lui dis-je, en l’attirant doucement contre moi.

Du pouce, j’essuie les larmes qui dévalent ses joues et couvre son visage de baisers.

  • Ne sois pas triste. Tu n’y es pour rien.
  • C’est sûrement plus raisonnable, en effet, admet-elle tristement.

Je l’embrasse tendrement.

  • Alors, c’est vrai, cet entretien s’est bien passé ? lui demandé-je à nouveau.

Blottie contre moi, elle hoche la tête.

  • Oui. C’était un test. Cet agent voulait savoir si j’avais basculé de ton côté. Mais je pense que je m’en suis bien sortie. Pour l’instant.

Je réprime un frisson en songeant à l’inéluctable. Tôt ou tard, ils se rendront compte, si ce n’est déjà fait. Elle a sûrement perçu ma tension car à son tour, elle me questionne :

  • Et toi, qu’est-ce qui te préoccupe ?

Aussitôt, bien sûr, je repense aux révélations d’Ariel. Après un court instant d’hésitation, je m’abstiens de les lui révéler. Pour le moment, elles ne lui servent à rien alors autant lui éviter le poids d’un secret supplémentaire surtout si ce que me souffle mon instinct est juste.

  • Rien de nouveau, lui déclaré-je. Moi aussi, j’ai vu Aetna et elle semble effectivement te considérer comme hors de cause, c’est une bonne nouvelle. Mais elle m’a à nouveau menacé de quelque chose de pire que la mort, selon elle. J’essaie de ne pas y penser mais ignorer de quoi il s’agit, me pèse.

Alka me serre un peu plus fort contre elle et me caresse le dos tendrement.

  • Je comprends. J’essaierai de me renseigner auprès d’Edan.
  • Donc Edan est ici ? m’enquis-je, d’un ton étonné.
  • Bien sûr que non, me répond-elle. Nous sommes en contact via un réseau protégé sur Xnet.
  • Il t’a donné des nouvelles de l’Extérieur ?
  • Oui, un peu, mais rien de précis, nos communications sont très brèves.
  • Et alors ?
  • Il a parlé d’évolution positive… mais il dit que je dois me concentrer sur ce que j’ai à faire ici. Pour les mêmes raisons qui t’ont amené à me repousser… conclut-elle amèrement, en baissant les yeux.
  • Je ne t’ai pas repoussée, Alka, protesté-je en l’attirant contre moi. S’il y a une chance que tu puisses en réchapper…
  • Et si je ne veux pas, rétorque-t-elle d’un ton véhément.

Le bip de son bracelet retentit et met aussitôt fin à notre conversation. Dans la seconde qui suit, elle se détache de moi et arbore son expression figée de Bullite modèle.

  • Tu as récupéré toutes tes facultés, on dirait, me lance-t-elle de sa voix de robot.
  • Oui, maîtresse.
  • C’est une bonne nouvelle car tu vas en avoir grandement besoin dans la prochaine épreuve.
  • Vous pouvez préciser, maîtresse, s’il vous plaît ?
  • Tu as juste le temps d’aller prendre une douche. Je vous attends dans un quart d’heure pour un briefing. Je vous expliquerai tout. Allez, dépêche-toi ! me presse-t-elle, en me désignant la porte d’un geste autoritaire.

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